La Cour relève la non poursuite de Dayori
Conformément aux pièces versées au dossier relatif à la requête du député Antoine Dayori dans une affaire de poursuite pour viol, la Cour constitutionnelle déclare irrecevable l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par le député au motif qu’il n’est pas concerné par les poursuites engagées. Lire l’intégralité de la décision. Saisie d’une requête du 03 janvier 2008 enregistrée à son Secrétariat à la même date sous le numéro 0011002/REC, par laquelle Monsieur Antoine Dayori, ayant pour Conseil Maître Paul Kato-Atita, transmet à la Haute Juridiction un exemplaire des conclusions en exception d’inconstitutionnalité déposées par son Conseil le 02 janvier 2008, en leurs bureaux respectifs, au Président du Tribunal de Première Instance de Natitingou et au Procureur de la République près ledit Tribunal dans la procédure de flagrant délit n° 843/RP-07 ; Saisie en antre par lettre du 04 janvier 2008 enregistrée à son Secrétariat le 07 janvier 2008 sous le numéro 0025/005/REC, par laquelle le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de Natitingou fait tenir à la Haute Juridiction les conclusions de Monsieur Antoine Dayori relatives à l’exception d’inconstitutionnalité à lui déposées par l’intéressé dans la procédure de flagrant délit visée plus haut, et d’une correspondance du 23 janvier 2008 par laquelle le Président du Tribunal de Première Instance de Natitingou transmet à la Cour un extrait du jugement avant dire droit n° 08/08-1ère chambre du 22 janvier 2008 portant sursis à statuer dans ladite procédure;
Vu la Constitution du 11 décembre 1990 ;
Vu la Loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la Loi du 31 mai 2001 ;
Vu le Règlement Intérieur de la Cour Constitutionnelle;
Ensemble les pièces du dossier;
Après en avoir délibéré,
Considérant que les deux (02) recours portent sur le même objet et tendent aux mêmes fins; qu’il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule et même décision;
Considérant qu’a l’appui de ladite exception, le requérant expose « que les pouvoirs conférés au Procureur de la République par les dispositions des articles 60 et 354 du code de procédure pénale ont indiscutablement permis de réaliser le détournement
de procédure à son préjudice ; qu’en effet, les dispositions du code de procédure pénale portant sur les pouvoirs du Procureur de la République en République du Bénin ainsi que sur ceux de ses Officiers de Police Judiciaire permettent à ce magistrat et ou à ses Officiers de Police Judiciaire de décider seul de l’opportunité de poursuivre un citoyen en procédure de flagrance ; que ces dispositions du code de procédure pénale ont un caractère d’ordre général ; qu’elles ne font aucune référence ni à la lettre de l’article 90 de la loi fondamentale ni à son esprit en ce qui concerne le député à l’Assemblée Nationale du Bénin ; que la faiblesse ainsi relevée dans ces dispositions du code de procédure pénale sont de nature à faciliter toute fraude à
la volonté du constituant béninois de voir sécuriser l’élu du peuple qu’est le député dans ses difficultés avec la justice; qu’en application de ces textes attaqués, il suffit de recourir à la procédure de flagrance contre le député pour en faire échec à l’esprit de l’article 90 de la Constitution et à la vision du constituant béninois » ;
Considérant qu’il développe «que le constituant béninois ne saurait prétendre ainsi qu’il est dit à l’article 90 de la Constitution sécuriser le député tout en laissant son sort dans les mains d’un magistrat légalement dépendant à qui il revient la charge de décider de l’opportunité de le poursuivre par une procédure dont lui seul a l’initiative et qui de surcroît échappe à tout contrôle; que le député est un homme politique et de par cette fonction, il est exposé à diverses actions nuisibles en raison de ses idées politiques, de ses prises de position, de son refus de collaborer avec tel ou tel homme politique que le magistrat du parquet est placé sous l’autorité directe du Ministre de la Justice de qui il reçoit des ordres et est
tenu de les exécuter; que le Ministre de la Justice dépend lui-même du Président de la République de qui il reçoit des ordres et est tenu de les exécuter; que dès lors, les articles 60 et 354 du code de procédure pénale dans leurs dispositions actuelles ne confèrent aucune sécurisation judiciaire à l’élu du peuple qu’est le député; qu’elles constituent les voies officielles pour vider
l’article 90 de la Constitution de toute sa portée et en tous ses alinéas; que c’est donc à bon droit que ces textes qui soutiennent la procédure engagée contre le député Dayori Antoine sont attaqués par la procédure d’exception en inconstitutionnalité …»; qu’il précise que la lettre du Procureur de la République en date du 08 décembre 2007 au Président du Tribunal de Première Instance de Natitingou sollicitant la mise en place d’une formation collégiale après deux audiences au fond déjà tenues par un Juge unique au motif tiré de la sensibilité du dossier et du sérieux des discussions, atteste que le Ministre de la Justice ne vise que la personne du député Dayori Antoine; qu’il allègue « que les articles 60 et 354 du code de procédure pénale dans leurs dispositions actuelles ne sont pas en adéquation avec les dispositions de l’article 90 de la Constitution et son esprit; … qu’en se fondant sur ces articles attaqués, un Procureur de la République, Magistrat non indépendant peut sur ordre
de sa hiérarchie, en l’espèce le Ministre de la Justice, membre du Gouvernement, engager par le biais d’un détournement de procédure, des poursuites malveillantes contre un député sous l’apparence d’une procédure de flagrance, qu’un tel détournement de fraude à l’article 90 de la Constitution»; qu’il demande à la Haute Juridiction de déclarer les dispositions des articles 354 et 60 du code de procédure pénale contraires à l’esprit de l’article 90 de la Constitution en ce qu’elles offrent au Magistrat du parquet, la voie de mettre en poursuite, par une procédure en apparence fondée, un député à l’Assemblée Nationale à qui l’on veut régler des comptes sans être contraint de se soumettre à la formalité constitutionnelle préalable de saisine de l’Assemblée Nationale;
Considérant qu’aux termes de l’article 122 de la Constitution: «Tout citoyen peut saisir la Cour Constitutionnelle sur la constitutionnalité des lois, soit
directement, soit par la procédure de l’exception d’inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui le concerne devant une juridiction. Celle-ci doit surseoir
jusqu’à la décision de la Cour Constitutionnelle qui doit intervenir dans un délai de trente jours» ; qu’il découle de cette disposition que l’exception d’inconstitutionnalité doit être soulevée par un requérant dans une affaire qui le concerne devant une juridiction ;
Considérant qu’il ressort des pièces au dossier et notamment du jugement n008/08-1ère chambre du 22 janvier 2008 portant sursis à statuer suite à l’exception
d’inconstitutionnalité que les poursuites du Ministère public dans la procédure de flagrant délit n° 843/RP-07 sont dirigées exclusivement contre Messieurs Nouhoun
Orou Bare Fousséni et Vincent Alommandon ; qu’il n’est fait aucune mention de poursuite à l’encontre de monsieur Antoine Dayori, auteur de l’exception d’inconstitutionnalité ; que dans ces conditions, Monsieur Antoine Dayori n’a pas qualité pour soulever l’exception d’inconstitutionnalité dont s’ agit ; que, dès
lors, il échet de dire et juger que l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par Monsieur Antoine Dayori est irrecevable
DECIDE:
Article 1er L’exception d’inconstitutionnalité invoquée par Monsieur Antoine Dayori est irrecevable.
Article2 La présente décision sera notifiée à Monsieur Antoine Dayori, au Président
du Tribunal de Première Instance de Natitingou, au Procureur de la République près
le Tribunal de Première Instance de Natitingou et publiée au Journal Officiel.
Ont siégé à Cotonou, le neuf septembre deux mille huit,
Mme Marcelline C. Gbèha Afouda Vice-président
Bernard Dossou Dègboé Membre
Théodore Holo Membre
Zimé Yérima Kora-Yarou Membre
Robert Tagnon Membre
Madame Clémence Yimbéré Dansou Membre
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