Omar al Bachir

/food/gnonhoue.jpg » hspace= »6″ alt= » » title= » »  » /> "Aucun chef d'Etat ne doit se croire tout permis "
La Cpi se prononcera sous peu sur la requête du Procureur, relative à un mandat d'arrêt à l'encontre du Président Omar Al Bachir, auteur présumé de crimes de droit international au darfour. Mais le 17 Septembre 2008, la France, soutenue par le Royaume Uni, a exprimé l'idée d'un sursis au profit du Président soudanais. Monsieur Jean-Baptiste Gnonhoué, Président de la Coalition Béninoise pour la Cpi, apprécie .

La Nouvelle Tribune:Qu'est ce qui a motivé la procédure envisagée par la France ?
Jean-Baptiste GNONHOUE: La requête du procureur de la CPI, a suscité de nombreuses réactions, les unes positives, les autres négatives. Les jeux de coulisse, les pressions de toutes sortes ont été exercées sans doute plus tard par la ligue arabe et l'Union Africaine sur des occidentaux, membres permanents du Conseil de Sécurité, notamment la France et le Royaume Uni, puisque la Chine et la Russie sont les alliées du Soudan. La procédure envisagée par la France, soutenue par le Royaume Uni est donc le fruit de ces pressions incongrues.

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Cette procédure est-elle défendable selon vous ?
Je dis non catégoriquement. Surseoir aux poursuites est une procédure qu'autorise l'article 16 du traité fondateur de la Cour Pénale Internationale, mais pas n'importe comment, pas à n'importe quel  prix. Le président soudanais n'a pas voulu se conformer au droit international émis par la Cpi contre deux acteurs clés de la crise au Darfour. Il s'agit de Ahmed HAROUN et Ali. Pour provoquer, pour défier la communauté internationale, il a fait de Haroun, ministre des affaires humanitaires, co-président du comité soudanais chargé d'enquêter sur les violations des droits de l'homme et superviseur du déploiement de la mission conjointe Nations-Unies – Union Africaine, une opération qui ne s'effectue pas convenablement, une opération qui ne connaît que des entraves. Actuellement, plutôt récemment, les forces armées régulières ont bombardé les zones rebelles, occasionnant ainsi de nombreuses victimes. Le Conseil de Sécurité, à mon avis, devrait prioriser absolument la protection des populations, en renforçant le mandat du contingent mixte et en mettant à sa disposition les moyens lui permettant de faire face à la situation, en s'appuyant justement sur les dispositions pertinentes de la charte de l'Onu, instrument fondateur de l'ordre international d'après guerre. Voilà, il faut être clair. Je m'autorise de l'escalade armée du gouvernement soudanais, qui d'ailleurs est une stratégie d'intimidation, pour dire que le sursis envisagé par la France n'est pas du tout fondé.

Que pensez-vous des conditions posées par la France pour rendre effectif ce sursis ?
A ce sujet, la France doit savoir que l'opinion publique n'est pas composée de naïfs. Les conditions posées par ce pays ne seront pas toutes remplies. C'est certain. On parle de cessation des bombardements, du dialogue et du jugement des deux personnalités ciblées par la cour avant la demande d'arrêt international sollicitée par le procureur contre le président soudanais. Qui va juger Haroun et son compagnon ? Pourquoi d'ailleurs juger ces deux personnalités et laisser le président Omar Al Bachir, alors que s'impose, ce que l'on appelle le défaut de pertinence de la qualité officielle pour les crimes internationaux. En outre, j'allais oublier, l'article 60 de la constitution soudanaise, prémunit le président et le premier vice président contre toute action punitive à l'échelon national.  Il pourrait y avoir à la rigueur une parodie de justice pour les deux autres personnalités pour dire ça y est, maintenant, on peut aller au sursis. Mais Omar El Bachir, qui va le juger au Soudan ? Personne, puisqu'il est protégé par la constitution. Alors, c'est quoi ça ? Est-ce que vous, journaliste, vous pouvez accepter cela, tout de même ?

Comment comprenez-vous les inquiétudes de certaines organisations comme l'Union Africaine la ligue arabe et d'autres personnalités ?
Je ne comprends pas du tout leurs inquiétudes. Ecoutez, entre nous, dites-moi ce que tout ce monde là a fait pour obliger le président soudanais à laisser se déployer sans condition le contingent mixte Onu-Ua? Qu'est ce que ces organisations et ces personnalités ont fait pour faire exécuter le mandat d'arrêt international à l'encontre de Haroun et de son compagnon ? Rien du tout, on craint que les exactions ne continuent, que l'on n'expulse le contingent mixte Onu-Ua. Les gens utilisent une rhétorique de circonstance, très malsaine d'ailleurs pour faire peur, pour forcer le sursis. Le Conseil de Sécurité doit recourir aux moyens légaux à sa disposition pour imposer la présence du contingent Onu-Ua, aussi longtemps que cela sera nécessaire et pour mettre un terme radical aux exactions.

Que faire finalement?
Je suis défenseur des droits de l'homme et j'entends être clair. Il faut tuer dans l'œuf, l'idée de sursis dès maintenant, et attendre l'opinion de la chambre préliminaire de la Cpi sur les charges retenues contre Omar El Bachir et qualifiées de sérieuses par le Bureau du procureur. Si ces charges sont confirmées, la communauté internationale aura le devoir d'agir pour envoyer un signal fort à tout le monde. La Cpi, l'une des institutions emblématiques de la judiciarisation internationale des droits de l'homme et des normes du droit international humanitaire doit faire son travail sans entrave. Personne quelle que soit sa qualité officielle ne doit se croire tout permis vis-à-vis de la dignité humaine. Aucun chef d'Etat ne doit se croire tout permis vis-à-vis des populations dont il a la charge. Par ailleurs, mon souhait est que la France s'abstienne très tôt de toute action en tachant préserver sa réputation de patrie des droits de l'homme.

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Les puissances impliquées dans ce dossier sont-elles prêtes à faire prévaloir la justice ?
La France, le Royaume Uni, la ligue arabe et l'Union Africaine doivent se persuader que la justice conduit à la paix. C'est même la voie royale. La judiciarisation internationale des droits de l'homme et des normes du droit international humanitaire est une nécessité de notre temps.

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