Drôle de pardon à Adja Ouèrè

Yayi tombe dans le piège de Fagbohoun

A l’orée de 2011, Yayi multiplie compromis, contradictions et pardons. Trois ans après l’arrestation de Séfou Fagbohoun, Yayi s’est présenté samedi 19 décembre à Adja Ouèrè pour lui demander pardon. En fait, c’était une parodie de pardon montée par le président de la république pour séduire l’électorat du Plateau. Mais sans s’en rendre compte, c’est à Fagbohoun qu’il fait le plus grand bien. Obsédé par le second mandat, Yayi est prêt à ravaler ses vomissures. L’homme qui est présenté au début de l’avènement du changement comme un prédateur économique de la pire espèce qu’il faut faire rendre gorge et punir, est devenu subitement un digne fils de la république. Le Chef de L’Etat peut même se déplacer jusqu’à Adja Ouèrè pour lui demander pardon. Pardon pour l’avoir jeté en prison alors qu’il n’a rien fait. Les mots utilisés le montrent : «Je n’en ai été pour rien. Le dossier était là avant mon arrivée. J’invite les populations à demander pardon  en mon nom à mon frère Séfou Fagbohoun. Je lui demande d’oublier le passé ». Un discours d’une crédulité inouïe difficilement acceptable de la part d’un président dont on connaît la ruse politicienne. Il est important de rappeler que l’honorable Séfou Fagbohoun a été arrêté un dimanche sur ordre de Nestor Dako, alors directeur de cabinet du président de la république. En son temps, Fagbohoun avait fait circuler au parlement une lettre où il expliquait les circonstances de son arrestation. Le gouvernement ne l’a pas démenti. Le temps a-t-il rendu les gens aussi amnésiques pour oublier tout cela ? Dans de tel dossier, c’est celui qui met la sanction en application qu’on voit et non celui qui l’a initié. En tout cas, les populations du Plateau qui ont fait le déplacement ce jour ont compris que Boni Yayi n’était pas sincère et qu’il était à la recherche de voix captives pour les prochaines élections présidentielles. Pourquoi demander pardon à quelqu’un qui est absent ? S’étonnent les populations d’Adja Ouèrè. Normalement si ce n’est pas pour moissonner dans le champs de Fagbohoun, le président Boni Yayi pouvait attendre le retour de « son frère » de la France avant de visiter Adja Ouèrè. Certes rien ne l’empêche de visiter cette commune quand il veut mais venir demander pardon  en l’absence de quelqu’un est ridicule.

A malin, malin et demi

Si l’objectif du président Boni Yayi, en faisant cette tournée, est de tenter d’extraire Fagbohoun du G4 et de récupérer son électorat comme le disent beaucoup de personnes, il s’est trompé de région et de stratégie. Contrairement à ce qu’il pense, il a plutôt relancé la carrière politique de Séfou Fagbohoun. En effet, l’image de ce dernier a été, qu’on le veuille ou non, un peu édulcorée après son séjour carcéral. Dans la pensée de certains, un ancien prisonnier à qui l’on reproche d’avoir « acheté sans payer » la Sonacop n’est plus digne pour être un leader politique. L’essoufflement financier qui a suivi cet emprisonnement a rendu le richissime homme d’affaires un peu vulnérable sur le plan politique. La preuve, son parti a perdu du terrain dans certaines localités du Plateau reconnues comme ses fiefs lors des dernières élections communales. Avec cette visite et surtout ce pardon, Yayi a gommé la souillure qui entachait  l’image de Fagbohoun. Il donne confirmation aussi à la thèse de l’emprisonnement politique, donc extrajudiciaire fait dans le dessein de nuire à quelqu’un dont la fortune et l’ascension politique gênent. Cela va susciter une union sacrée autour de l’intéressé.

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Ainsi requinqué par ce blanchiment présidentiel, Fagbohoun peut récupérer les indécis et les résignés qui lui faisaient tête dans le Plateau. Il redevient l’homme puissant du Plateau. En 2011, sa consigne de vote sera bien suivie. D’ailleurs, il sera difficile que Fagbohoun suive encore Yayi, connaissant l’ego de ce self made man issu d’une famille modeste et qui a acquis une grande fortune grâce à sa témérité et à son dévouement.

Marcel Zoumènou

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