Abrogation de la Lépi

Retrait unilatéral du rapport de la commission des lois

Contre toute attente vendredi dernier et avec la complicité du présidnt du parlement, Mathurin Nago, le rapport de la commission des lois sur la proposition de loi visant à abroger la loi instituant la Lépi a été unilatéralement retirée par Hélène Aholou-Kèkè, présidente de la Commission et Thomas Ahinnou, rapporteur. La réaction des députés de l’opposition ne s’est pas fait attendre. Rosine Soglo, Ismaël Tidjani Serpos entre autres ont vivement protesté contre ce qu’ils ont appelé le fourvoiement de la présidente et du rapporteur de la commission des lois.

Au lieu d’assister le vendredi dernier en plénière à l’examen du rapport portant sur l’abrogation de la Lépi et du Réna, c’est à une scène inhabituelle qu’on a assisté à l’hémicycle. Après une suspension tout au début de la séance demandée par le député Fcbe Justin Sagui Yoto, les députés sont revenus au sein de l’hémicycle environ neuf heures  après. Le président Mathurin Nago invitera la présidente de la commission des lois et son rapporteur à se présenter à la tribune. D’un ton sec, le rapporteur de la commission Thomas Ahinnou déclare, « en ma qualité de rapporteur de la commission et au nom de la présidente de la commission auteur du rapport, nous demandons en application des dispositions de l’article 75.1 de notre règlement intérieur, le retrait du rapport oral que nous devions présenter ce jour, merci monsieur le président ».

Il sera appuyé dans ses propos par la présidente Hélène Aholou Kèkè qui précise : « nous sommes deux signataires auteurs du rapport, nous retirons le rapport et nous sommes en mesure de vous présenter un autre rapport le mardi matin, monsieur le président ». Aussitôt en tant que deuxième rapporteur de ladite commission, et se fondant sur les dispositions de l’article 75.2 du même règlement intérieur, le député Force Clé Lodjou Jude reprend la proposition de loi à son compte et demande que la discussion continue. Mais selon la présidente Hélène Kèkè, l’article évoqué par le député parle de proposition alors que les dispositions de l’article 75.1 parlent plutôt de rapport. C’est ce qui a suscité de vives protestations qui ont failli dégénérer au sein de l’hémicycle.

Vives réactions de l’opposition

Des rappels à l’ordre ont été faits aussitôt par la présidente Rosine Soglo suivie du député Prd Tidjani Serpos. Prenant la parole, la présidente Rosine Soglo proteste « je suis aussi membre de cette commission. Donc il faudra que la présidente et le rapporteur de la commission décident de retirer le rapport pour nous bloquer parce qu’ils ne veulent pas que cette proposition de loi passe ». Pour l’honorable Tidjani Serpos, il invite le président Nago à revoir attentivement le texte que la présidente de la commission des lois a évoqué et qui est interprété aujourd’hui à tort. Selon lui, la présidente et son rapporteur se sont fourvoyés dans l’interprétation de ces dispositions et il demande alors au président Nago de soumettre ces deux interprétations à l’appréciation de la plénière. Quant au député Lodjou Jude, il a demandé au président Nago de ne pas s’associer à ce théâtre qu’ils viennent de vivre. La décision qui a été prise en commission est pour toute la commission et non pour un groupe d’individus et qu’on cesse de distraire les députés. Le député Prd Augustin Ahouanvoébla précisera que l’article 75 est intitulé « retrait ou reprise des propositions de loi » mais miraculeusement les deux collègues qui ont signé au nom de la commission des lois ne sont mêmes pas auteurs de la proposition de loi. Il poursuit en disant que la présidente de la commission des lois a délibérément décidé de rejoindre leur place sans que le président Nago ne les ait autorisés, donc ils ont violé la police des débats que préside le président de l’Assemblée nationale. Eric Houndété dénoncera quant à lui une succession d’actes de tricheries avant de revenir sur toutes les péripéties qui ont jalonné depuis le début cette proposition de loi, de fausses signatures au retrait en passant par l’exception d’irrecevabilité formulé par le chef de l’Etat. Il dira que cette démarche n’honore pas le parlement et cela pourrait affecter la crédibilité du président Nago. « Acceptons parfois de perdre » a-t-il renchéri pour finir. Le questeur Sacca Fikara demande au président Nago de respecter son autorité et d’arrêter ce qui se passe. Il a précisé qu’ils sont prêts aussi à ‘‘foutre le bordel’’ dans la maison si cela continuait comme cela. « On n’a pas retiré la proposition de loi en conséquence le rapport ne peut pas être retiré » a-t-il expliqué. Mais d’avis contraire, les députés Fcbe Chabi Sika, Djibril Débourou ont trouvé que ce n’est pas pour la première fois qu’un rapport en étude se retire. Ils disent ne pas comprendre pourquoi cette proposition de la présidente de la commission des lois suscite tant de polémiques. Pour le député Rachidi Gbadamassi, il demande pourquoi toutes ces protestations. Selon lui, si les collègues ne sont pas d’accord, ils n’ont qu’à saisir la Cour constitutionnelle. « C’est au nom de la commission des lois que la présidente a retiré le rapport. Selon ses propos, en vertu du même article, le président Grégoire Laourou a retiré une fois un rapport, de même que la présidente de la commission des lois » a rappelé le député Amadou Taiyo. Quant à l’honorable Djibril Débourou, il est revenu sur certaines pratiques de partis politiques qui ont selon lui des techniques de fraudes huilées, c’est pourquoi ils ne veulent pas de la Lépi. Au terme de longues discussions, le président Nago va suspendre précipitamment la séance en la renvoyant à demain mardi.
Ismail Kèko

Les dispositions de l’article 75

Article 75 : Retrait et reprise des propositions de lois
75.1- Les propositions de lois, ainsi que les rapports de commissions, peuvent toujours être retirés par leur auteur, quand bien même leur discussion est engagée.
75.2 – Toutefois, si un autre député reprend une proposition retirée par son auteur, la discussion continue.

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