Afrique : enfants des rues

Les enfants des rues  sont devenus un aspect familier de la vie des métropoles africaines. Pauvreté, guerres, industrialisation désordonnée, sida, sont à l’origine du phénomène. Placés dans des situations désespérantes, ces enfants font preuve d’une débrouillardise et d’une force incroyables. Mais la moitié d’entre eux ne survivent pas longtemps à cette existence sans avenir. Les plus jeunes ont cinq ans, parfois quatre. Le plus souvent, ce sont des garçons. Les filles, en général, sont plus âgées, mais n’en sont pas moins vulnérables. Ils vivent en bande, les plus faibles se plaçant sous la protection des plus forts. Ils seraient entre 40 et 60 millions sur la planète dont presque la moitié en Afrique : 15 000 au Kenya, plus de 5000 dans la capitale congolaise, 7000 au Tchad… Et combien ailleurs ? Difficile de recenser ces enfants, très mobiles. Ni de faire la différence entre les enfants « des rues » et les enfants « dans la rue », qui y travaillent mais rejoignent le soir leur foyer familial.
 

Un phénomène complexe.

Rares finalement sont les enfants abandonnés par des parents trop pauvres pour les nourrir. La rue est plutôt une alternative à l’insupportable pour des enfants battus (20% des enfants, souvent suite au remariage d’un parent), subissant des violences sexuelles dans leur foyer ou encore considérés comme des enfants sorciers (voir article précédent sur ce site). Elle peut aussi être un choix pour les plus âgés (la majorité des enfants arrivent dans la rue vers l’âge de 12 ans) qui fuient la misère des campagnes, attirés par le mirage des villes.
 
Mais surtout, l’enfant des rues reflète les crises des sociétés africaines : dans la région des Grands Lacs par exemple, le nombre d’enfants seuls a augmenté avec la fin des conflits armés : enfants perdus pendant la fuite familiale, enfants soldats démobilisés incapables de retourner vivre en famille ou rejetés par elle et surtout enfants orphelins de guerre (150 000 pour le seul Rwanda). Le sida enfin jettent à la rue par milliers les enfants. Certains, parmi les 13 millions d’orphelins du sida en Afrique – disent avoir perdu tous les membres de leur famille. Les autres, souvent parce qu’ils sont eux mêmes séropositifs, ne trouvent aucun parent prêt à les accueillir.
 

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Des conditions de vie épouvantables

Une fois à la rue et livrés à eux-mêmes, ces enfants doivent survivre à la misère et à la violence quotidienne. Ils dorment à même le trottoir ou dans des abris en carton. Pour trouver de quoi subsister, ils mendient ou exercent une multitude de petits métiers : porteur, livreur, cireur de chaussures. Mais beaucoup, aussi empruntent la voie de la criminalité. Libérés de toutes contraintes sociales, rejetant lois et institutions, de véritables gangs d’enfants vivent de cambriolages et d’agressions et deviennent de véritables fléaux sociaux.
 
Sans défense, malgré leur dérive délinquante, les enfants sont aussi victimes d’abus de toutes sortes. Ils doivent affronter les coups ou les insultes des commerçants, mais aussi des forces de l’ordre qui les rackettent sous prétexte d’assurer leur protection. Beaucoup tombent dans la prostitution. Quoique illégale, la prostitution infantile est une industrie florissante qui se banalise sur le continent africain. Les petites filles des rues sont sollicitées très jeunes, parfois enlevées pour être placées dans des bordels.
L’usage de la drogue leur permet enfin de couper les effets de la faim. Et il n’est pas rare de croiser ces enfants divaguant, anesthésiés par la colle et le guinz, (un diluant à base d’hydrocarbures).
 

Adultes demain

Aux difficultés quotidiennes de ces enfants s’ajoutent des problèmes de fond qui les poursuivent leur vie durant. Pour ceux d’entre eux qui survivront et qui deviendront des rescapés de la rue, la vie restera de toute façon difficile. Marginalisés pendant l’enfance, rares sont ceux qui arrivent arriveront à se réinsérer correctement une fois adulte. Et, puisque sans d’éducation, leurs perspectives d’avenir sont limitées. Pour Médecins du Monde, « reconstruire une alternative à la rue suppose d’abord la survie de l’enfant, mais ensuite et surtout la reconstruction de sa personnalité et de son identité d’acteur social ».
 
Une charge qui incombe théoriquement aux Etats, en vertu de la Convention des droits de l’enfant. Pourtant, ces enfants sont loin d’être prioritaires pour les gouvernements débordés par les crises économiques et politiques, le sida et les autres pandémies. Beaucoup préfèrent abandonner le fardeau aux ONG, négligeant que les enfants des rues d’aujourd’hui seront aussi des adultes demain.
(source : lemagazine.info)

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