Présidentielles au Togo/Après la proclamation des résultats

Surprise et désenchantement à Lomé 

Le jeudi 04 mars à partir de 17heures, les premiers résultats commencent à tomber sur la capitale, la ville qui a gardé un calme inhabituel jusque là devient subitement grouillante et animée. Les loméens qui se sont recroquevillés dans leurs maisons une fois qu’ils ont accompli leur devoir civique, ont commencé à converger vers les bureaux de vote pour suivre le dépouillement.

 

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A 17 h 30 à l’école primaire de Gbenyèdzi Kopé, les forces de l’ordre, ces anciens « voleurs d’urnes » devenus aujourd’hui « Force Sécurité Election » (Fosep) se mobilisent au centre de l’école. L’inquiétude et la peur gagnent certaines personnes qui n’hésitent pas à rebrousser chemin et à rentrer chez eux. La prudence est mère des sûretés. « C’est ainsi qu’ils ont commencé il y a cinq ans », avertit un habitant du quartier qui hâtait ses pas pour sortir de l’enceinte de l’école. Ils se concertent, devisent un peu mais  n’interviennent dans aucune des salles où se passaient les dépouillements. Au contraire, c’est eux qui demandent à certains votants très surexcités de garder leur calme et de ne pas faire trop de bruit pour déranger les scrutateurs et ceux qui s’occupent du dépouillement. Le dépouillement commence à l’heure prévue dans tous les bureaux de vote. Femmes, enfants, jeunes et même des personnes très âgées… personne ne veut se faire conter l’événement.

Dès que le dépouillement commence, c’est l’Ufc qui annonce les couleurs. Le sourire et l’espoir s’aperçoivent désormais sur ces visages naguère fermés. Les cris de joie se font entendre. Dès l’annonce du nom « Rpt » (parti au pouvoir), les malédictions et les injures sont proférées à l’endroit de ceux qui ont osé mettre un tel bulletin dans l’urne. « Ce sont des enfants bâtards », lancent-ils en choeur.  Vers 18 h, tous les dépouillements sont terminés. Le résultat rassure un peu ces populations puisque l’Ufc bat de loin le Rpt. Plus de 85% en moyenne du suffrage exprimé revient à l’Ufc contre 8% environ pour le Rpt. Les jeunes se mettent alors en groupe pour chanter et danser à travers le lieu de vote. Dans d’autres quartiers de la ville comme Bè, Agouè, Tokoin, Ablogamè, Kodjoviakopé et dans presque toute la ville d’ailleurs, cette tendance est la même. C’est la réjouissance et la joie un peu partout à Lomé. Mais certains jeunes restent un peu prudents.

Selon eux, les résultats qui seront proclamés ne sont jamais la réalité sortie des urnes. « En 2005, le score de l’Ufc était mieux que celui qu’il a obtenu aujourd’hui et pourtant c’est le Rpt qui est déclaré gagnant », affirme un jeune de Bè très remonté contre le régime Rpt. Et comme si ces propos étaient des prémonitions, le samedi 06 mars la Commission Electorale Nationale Indépendante (Ceni) déclare Faure Eyadéma du Rpt gagnant avec plus de 60% du suffrage exprimé. Jean Pierre Fabre conteste, ses partisans prennent d’assaut les rues pour contester ces résultats. Les Fosep s’interposent et le Togo se renoue  avec ses vieux démons.

M. Z. (de retour de Lomé)

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