Mondial 2010 : le vivre ou le subir ?

Encore un mois. L’Afrique du Sud sera le rendez-vous mondial du football. Tous les cinq continents répondront présents, à travers seize nations lancées à la conquête du trophée qui, ici et là dans le monde, hante tous les esprits, entretient les rêves les plus fous, allume tant de passions. C’est désormais une tradition bien établie : la Coupe du monde de football est un événement de portée universelle qui, tous les quatre ans, bouleverse autant qu’il recompose la physionomie de la terre. Aucun événement, dans l’agenda international, n’a autant d’impact sur les êtres et le cours des choses.

Le Bénin, notre pays, ne sera pas au nombre des six représentants africains appelés à porter haut levé le drapeau d’un continent où le football est le sport roi. Des agglomérations urbaines aux plus modestes hameaux, le même culte du ballon rond unit et confond, dans une même ferveur, des hommes et des femmes de tous âges, de toutes conditions.
Le Bénin sera absent de ce rendez-vous de l’élite mondiale du football. Mais il ne sera pas, pour autant, en reste. Il suivra devant les postes de télévision, qui ne se sont jamais aussi bien vendus que ces jours derniers, les exploits des uns, les déboires de certains, les désillusions des autres. C’est la dure et implacable loi de toute compétition sportive. C’est, du reste, ce qui en assure l’exquise saveur, avec en arrière goût le bon et chaud piment de nos marchés. Pas de souci : les Béninois qui ne seront ni sur les stades de Johannesburg ni sur ceux du Cap suivront cependant le mondial comme s’ils y étaient. Le miracle de la technologie, dans un monde globalisé !
N’empêche. La coupe du monde nous offre l’occasion de mettre le doigt sur l’une de nos grandes faiblesses : un grave déficit du sens de l’anticipation. Pour dire que nous ne montrons pas assez de capacités à nous projeter dans l’avenir. Face à un événement, pourtant bien en vue, nous préférons attendre scotchés à nos pantoufles. Les peuples qui se développent savent que l’avenir n’est pas un destin aveugle ; qu’il est ouvert à plusieurs futurs possibles. Ces peuples ont développé des capacités d’agir, par anticipation, sur les événements, plutôt que de se mettre en situation de subir le cours des choses.
Par rapport à la coupe du monde 2010, que pouvons-nous imaginer pour nous mettre dans les conditions d’un exercice d’anticipation ? Nous pouvons prendre, dès aujourd’hui, en amont, un certain nombre d’initiatives. Celles-ci nous aideront à dépasser le stade primaire d’une simple et plate consommation des images qui nous viendront d’Afrique Sud et à vivre l’événement de manière optimale et dans toutes ses dimensions. Voici, pour cet exercice, quelques propositions.
Premièrement : aller à l’école de l‘Afrique du Sud. C’est la première fois que l’Afrique organise une coupe du monde. Bien que le pays de Nelson Mandela, du fait de son avance sur la plupart des pays africains, ne se cale pas très exactement sur le standard africain, nous avons tous à apprendre de son expérience de l’organisation d’un événement de la taille d’une coupe du monde de football. Une telle expérience peut être utilement capitalisée par notre pays qui aura bien besoin de savoir et de comprendre. Sous ce rapport, la Fédération, le Ministère des Sports pourraient diligenter une équipe d’experts béninois en Afrique du Sud, à charge pour celle-ci de faire, au bénéfice de notre pays, une large moisson de l’expérience sud-africaine. Cela finira par servir. Car comme le disent les sages peul : « Celui qui sait ce que tu as mangé connaît la manière dont tu t’es rassasié »
Deuxièmement : étudier, selon les horaires des matches, un système de journées continues. Parce que ces choses-là ne s’improvisent pas. Parce que, sur ce chapitre, une étude sera nécessaire pour aider à concilier des intérêts peut-être contraires. Une programmation corrective sera à mettre en place pour sauvegarder notre amour du jeu sans porter atteinte à nos enjeux de toujours.
Troisièmement : mutualiser les ressources de nos 77 communes pour y monter, en des lieux déterminés, des écrans géants. On relayera ainsi les images de la télévision nationale au profit du plus grand nombre. Les mairies de notre pays rentreront ainsi dans l’événement mondial sur lequel elles pourraient utilement greffer des événements locaux. Il suffirait de convoquer l’imagination.

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Quatrièmement : impulser une coopération entre nos différentes radios et télévisions. Elle n’ont que trop travaillé, jusqu’ici en vase clos, en s’illustrant dans un desséchant « Chacun pour soi, Dieu pour tous ». Le Mondial leur offre l’opportunité d’une révision positive de leurs rapports. Par exemple : un même grand jeu-concours, sur toutes les chaînes de Cotonou, pourrait ouvrir entre ces radios et télévisions l’ère nouvelle d’une fructueuse collaboration. Il s’agira, ce faisant, de montrer et de démontrer que ce n’est pas un pétard mouillé l’idée selon laquelle l’union fait la force.

Jérôme Carlos

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