Pour une journée internationale du sommeil

C’est confirmé : nous dormons de moins en moins. Toutes les études le montrent et le démontrent. Et si l’on n’y prenait garde, le manque de sommeil, sinon les troubles du sommeil, risqueraient de devenir la marque distinctive, le signe caractéristique du Béninois, de l’Africain, citadin notamment.

Car le sommeil n’est pas un luxe, un exercice facultatif pour passer le temps. Le sommeil, selon les spécialistes, répond à un besoin physiologique et psychique fondamental. Il occupe le tiers de l’existence d’un être humain. Ce qui voudrait dire qu’une personne de 30 ans a dormi ou aurait dû dormir 10 ans durant sa vie.

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Les recherches récentes concluent au fait que la génération de nos grands-pères et pères dormait 9 heures par nuit. Avec la génération actuelle de nos compatriotes, ce temps s’amenuise. Il est de 6 heures en moyenne par nuit. C’est insuffisant pour que le sommeil ait toute son action réparatrice et revitalisante.
Le mal est profond. Il touche aux deux principaux aspects des anomalies qui affectent le sommeil. Il s’agit d’une part des dyssomnies, c’est-à-dire des perturbations touchant aussi bien à la qualité qu’à la quantité du sommeil, comme les insomnies, les hypersomnies. Il s’agit d’autre part des parasomnies. Elles concernent les phénomènes anormaux qui interviennent au cours du sommeil, comme le somnambulisme, le cauchemar, les terreurs nocturnes.

Ainsi, dans nos villes, évoluant à un rythme de plus en plus infernal, désordre et pagaille en sus, vaquent à leurs occupations des malades qui s’ignorent, au milieu d’un concert de bruits divers. C’est assez agressif pour dérégler la mécanique mentale la mieux articulée. C’est assez dépressif pour que le logiciel mental le plus performant soit à plat. Un peu à l’image de l’eau qui, tombant goutte à goutte, finit par avoir raison du rocher le plus dur, les nuisances de la grande ville, à force de bombarder nos cerveaux, par touches continues, finissent par les laisser en miettes.

On peut ajouter à ces nuisances, la compétition sociale. Elle fait de nous des marathoniens de l’avoir et de l’avoir plus, obnubilés par l’argent, lancés dans une course éperdue au gain, taraudés par le poids des défis et des enjeux. Il s’y ajoute l’anxiété née des peurs séculaires que nous trimbalons après nous comme un legs sacré. C’est le fruit des rivalités anciennes entre clans, des haines inextinguibles entre communautés, des méfiances interpersonnelles qui font de chacun de nous un loup pour chacun de nous. Et pour coiffer le tout, il y a la pauvreté. Elle a la vertu corrosive de faire des misérables. Elle pèse sur les êtres et les choses comme une chape de malédiction.

L’insomnie ou plus généralement les troubles du sommeil sont et restent comme les toutes premières réponses à cet ébranlement général des individus, à ce délabrement de nos cadres qui, pour la plupart, partent battus pour la dure bataille du développement. Il est difficile d’espérer gagner avec une armée en lambeaux dont les soldats sont laminés et lessivés par la fatigue et la dépression.

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Les spécialistes du sommeil ont égrené pour nous le long chapelet des handicaps liés aux troubles de sommeil. Nous devrions nous en libérer, contre vents et marées, si nous souhaitions être dans la caravane du développement, la caravane des peuples qui gagnent. Ces spécialistes sont intarissables sur les maux liés au manque ou aux troubles de sommeil : accélération du processus du vieillissement, prise de poids et obésité, mauvaise régulation du taux de sucre dans le sang, prédispositions au diabète, diminution des défenses immunitaires, diminution de l’efficacité dans des opérations mentales complexes, dépression, irritabilité et instabilité psychomotrice, manque de dynamisme au travail, somnolence au volant et risques d’accidents de la circulation, échec scolaires pour les élèves et étudiants…

Il n’y a rien à dire, tous ces maux liés au sommeil mettent à mal la ressource humaine, le levier de tout vrai développement. Aussi urge-t-il de rétablir le sommeil dans sa fonction physiologique, vitale, rythmique et évolutive. Il est indispensable à la vie. Pour cette affaire qui nous concerne tous, nous sollicitons, à travers la présente chronique, l’attention et l’intérêt des bonnes volontés d’ici et d’ailleurs. Soutenons l’idée d’une journée internationale du sommeil.

Rassurons-nous : ce jour-là ne nous trouvera pas couchés, en train de faire dodo, mais debout pour partager l’espérance qu’au nombre des ingrédients propres à assurer notre développement, le sommeil sera inscrit en bonne place. Si vous êtes prêts, engageons-nous à faire de cette idée une réalité.

Jérôme Carlos

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