Le cas Zinzindohoué et les tares du régime du changement

Son limogeage fait des vagues depuis mercredi nuit dernier. Le ministre de l’intérieur, Armand Zinzindohoué vient d’être rejeté de la barque du changement, à un moment où on s’y attend le moins. L’affaire  Icc services qui l’emporte ainsi  est une énième nébuleuse de  l’ère Yayi qui  brise davantage les idéaux que défend   l’apôtre du changement.

Ses hochements incessants de tête chaque fois qu’il parle de Boni Yayi vont enfin s’arrêter. Car il part dans un contexte peu honorable. La nouvelle est tombée depuis mercredi nuit. Armand  Zinzindohoué est relevé de ses fonctions de ministre de l’intérieur et de la sécurité publique.  Entre autres raisons, l’on évoque ses relations suspectes avec  les responsables de Icc services. Il aurait  mis à leur disposition des gardes de corps policiers armés et aurait  donné l’autorisation de port d’arme à l’un d’entre eux. D’autres informations font état de ce qu’il percevait de gros sous auprès de ces derniers, chaque fin de semaine. Près de 20 millions de Fcfa pour les multiples et suspects services qu’il leur rendrait.  Sous réserve des raisons officielles  qu’attend impatiemment le peuple,  ces faits demeurent regrettables à tout point de vue.  Ils souillent davantage  l’image  déjà pas trop reluisante du régime du changement.

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Qui est cet homme ?

Beaucoup de Béninois avaient émis des doutes sur ses capacités à diriger un département ministériel, quand Boni Yayi lui avait  fait appel dans son gouvernement. D’abord en tant que ministre du transport et des travaux publics, puis après ministre de l’intérieur. On l’a vu évoluer  à ces deux postes dans un style de travail plutôt brouillon. Sauf qu’il savait jouer au bon joker sans jamais réussir à l’être réellement.  Il avait surtout l’art des allégeances interminables envers  le Chef de l’Etat.  Tellement il en multipliait que certains Béninois ont fini par le qualifier du fan le plus attitré de Boni Yayi. Zinzindohoué ne manquait en effet  aucune occasion pour  louer  les actions et les œuvres de son chef.  Il pérorait à tout vent  tout  ce dont les béninois bénéficieraient   depuis son   arrivée au pouvoir en 2006. Cela fait rire parfois quand on le voit tout en transe, courant derrière Boni Yayi lors de certaines sorties présidentielles.  Armand Zinzindohoué semblait donner l’impression  qu’il n’avait  d’yeux que pour Yayi, tel un disciple très attaché à son maître et prêt à tout pour lui.  A la tête du département des travaux publics et des transports, c’était également le champion des descentes sur les chantiers. Avec sa bande de collaborateurs qui ont fini par s’habituer à ses élans de « fougueux » au contenu vide. Puisqu’il disait plus qu’il n’en faisait.

Bref, la comédie  à la Zinzindohoué était devenue  si agaçante que très  peu de gens   prêtaient encore flanc aux propos et aux actes de l’homme. Chose  curieuse, il  connaîtra une nouvelle  promotion, encore plus importante  que la première. Yayi le nomme   ministre de l’intérieur et de la sécurité publique à l’étonnement général. La saga  des improvisations et des mesures décousues se poursuivra de plus bel. Inutile de dérouler la bande ici.

 Plutôt  ministre des religieux !

La  nouvelle mission ainsi confiée à Armand Zinzindohoué a fait mouche.  « Inadmissible ! Compréhensible ! Impossible ! » ont crié  les uns et les autres. Mais le fait est là. Il est ministre de l’intérieur. Un ministre qui se force d’être influent, mais qui n’en a guère la carrure, sauf qu’il peut servir de commis ou de marionnette.  D’aucuns ont d’ailleurs fini par le nommer ministre des religieux, puisqu’il passait la plupart de ses temps dans les temples des églises, pendant que les braqueurs opéraient sur le terrain.  Il savait  partager des dizaines de millions au nom de Boni Yayi,  partout ou des groupements se constituaient  pour évoquer Jésus-Christ.  Lui-même, évangéliste émérite de son état, se plaisait bien dans ce rôle aux côtés des siens.
En lui confiant  la sensible mission de la sécurisation de tout le territoire national, Boni Yayi pensait pourtant bien faire, auréolé par les sentiments directs et les allures d’enfant de chœur que  Armand Zinzindohoué affichait à son égard. Le Président se disait sans doute, qu’avec cet homme,  la quiétude allait s’établir définitivement dans le pays.  Mais c’était sans oublier aussi que cette personnalité n’était pas la plus catholique de la place. Bien au contraire. L’affaire Icc Service qui vient de l’éclabousser  dit  long sur sa moralité et ses motivations personnelles. Il a fait du faux et du flou.

 Après Tawéma, Zinzindohoué

La vérité coule comme l’eau de source depuis avant-hier sur les complicités longtemps entretenues par l’ex ministre de l’intérieur avec  les responsables de Icc service. Comme un certain Hamani du temps du ministre Tawéma, Zinzindohoué a réédité la même stupidité en signant l’autorisation de port d’armes à  l’un  des hommes influents de Icc services, Emile Tégbénou. Devant le Chef de l’Etat, ce dernier a tout avoué. Il a raconté la longue histoire qui a existé entre Armand Zinzindohoué et lui. Il a pu révéler aussi comment il était rondement traité par les   mirobolantes caisses de  la société. La grande honte.   Yayi ne s’en revenait pas.  L’un de ses  ministres chéris vient ainsi de le trahir. Il se voyait comme un président cocu.     Il croyait à peine aux tares longtemps cachées de l’homme qui lui vouait presque un culte de personnalité. A cette audience qui débouchera sur  la décision de limogeage, l’atmosphère serait  devenue subitement  très indigeste entre les deux  personnalités. La confiance est rompue  à jamais.

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  A huit mois de fin  de mandat,  Boni Yayi  essuie  une nouvelle grosse déception dans son propre entourage. Après l’affaire Cen-Sad, qui l’a contraint à limoger son ministre des finances d’alors, le dossier Icc services lui cause aujourd’hui les mêmes gènes et les mêmes désagréments. Car  l’implication  dangereuse de son ministre de l’intérieur qu’il vient de relever de ses fonctions est un désaveu cinglant pour les idéaux de bonne gouvernance, d’équité, de  probité et autres vertus qu’il s’efforce  d’inculquer  en vain à ses collaborateurs.

Christian Tchanou

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