L’Union fait la nation : une machine en panne

Difficulté à transcender les divergences internes, leaders toujours en voyage, suspicion, prise de décision malaisée… la grande Union fait la Nation (Un) annoncée pour broyer le pouvoir n’arrive pas toujours à retrouver ses marques. Quelques mois après sa naissance, elle baigne dans une apathie inouïe, laissant un goût d’inachevé sur toutes ses actions. En un mot, c’est  un moteur diesel qui peine à démarrer vraiment.

Dans l’histoire politique du Bénin et même de l’Afrique, la création de l’Union fait la Nation est simplement une innovation du génie béninois. Réunir dans une même coalition  des formations politiques qui se sont combattus tout le temps et qui plus est, sont d’idéologies politiques différente relève d’un exploit. C’est ainsi qu’à l’issue du congrès des 27 et 28 Novembre 2009, beaucoup de béninois et d’observateurs attentifs de la scène politique ont applaudi la naissance de cette union née pour éradiquer la balkanisation du pays. L’Un est un  impressionnant attelage politique qui, en terme de suffrage et de région couverte,  doit faire frémir tous ceux qui oseront se mettre devant elle pour l’affronter. Numériquement- si on tient  compte des dernières élections- c’est la première force politique du pays avec plus de 60% des suffrages au niveau national. Autre atout majeur, c’est la carte de visite de ses principaux animateurs. Un ancien président de la république et tous les anciens présidents de l’Assemblée nationale du Bénin depuis 1990.C’est donc la crème de la politique béninoise. Nicéphore Soglo, Adrien Houngbédji, Bruno Amoussou, Idji Kolawolé et bien d’autres encore ont déjà derrière eux deux décennies de carrière politique. Mais malheureusement, tous ses atouts ne sont pas ressentis actuellement dans les actions de ce groupe politique même si par on sent plus d’assurance et de maturité dans ses actes et plus de pertinence dans le discours  que ceux de la mouvance politique actuelle. En effet, l’Union est née déjà avec une infirmité qui pourra le suivre pendant longtemps si rien n’est fait. Il s’agit de l’ambiance de suspicion qui prévalait au moment de sa naissance. Si bien que, des mois après cette naissance, l’Union n’arrive pas à retrouver sa cohésion interne. Il faut donc travailler dur pour dissiper les relents solitaires, aplanir les divergences, discuter, concéder…pour ne plus en finir. Un véritable travail de fourmi qui prend assez de temps et ne permet pas aux véritables ténors de s’occuper de l’essentiel. L’autre difficulté du groupe c’est la prise de décision. Avec des leaders souvent en voyage à l’extérieur et la mobilité extrême de ses têtes de pont, la prise de décision est très malaisée dans ce groupe. Il faut toujours attendre le retardataire, avoir l’avis d’un absent, faute de quoi cette décision peut être remise en cause. Aussi fragile de l’intérieur l’Union ne peut qu’être absent sur le terrain abandonné presque à Boni Yayi et à sa majorité. C’est d’ailleurs ce qui a amené certains à qualifier cette union de « tigre en papier ». A forte raison ?

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La politique de l’échec

Si dans d’autre pays du monde l’opposition est toujours à l’affût pour bondir sur la moindre erreur du pouvoir, au Bénin c’est plutôt le pouvoir qui bondit sur ses propres erreurs pour les transformer en exploit. L’opposition, elle, reste groggy, complètement tétanisée, amorphe et même aphone, indifférente à tout. Et chaque fois qu’elle rente de le faire c’est toujours en retard. C’est ainsi qu’elle a choisi de se murer dans un silence inquiétant alors que se joue actuellement un drame national : l’affaire Icc-services. Bon nombre de militants n’arrivent pas s’expliquer comment l’Un puisse se taire alors que ces militants sont grugés avec à la clé une complicité de plus en plus avérée de l’Etat. « A quoi elle servira donc cette opposition ? », se demande-t-on dans les contrées et les hameaux du pays. Dans les coulisses, on apprend l’organisation d’une marche de protestation contre le gouvernement mais depuis, les choses vont d’ajournement en ajournement. L’autre mauvais visage que montre de plus en plus cette opposition ce sont les chantiers laissés chaque fois inachevé. La tournée d’explication du président Houngbédji abandonné alors qu’il devrait le poursuivre dans les autres communes.

Idem pour la séance d’explication aux femmes bénéficiaires de micros crédits après les marches forcées de certaines femmes. Là aussi plus de suite. Il suffit que le gouvernement commence à critiquer que cette opposition est dissuadée et abandonne le terrain pour la mouvance qui l’occupe à merveille.  Selon certains leaders de ce groupe, c’est au dernier moment qu’il faut sortir la grande artillerie. Sera-t-elle payante cette politique du dernier moment ? En tout cas, si au soir des élections présidentielles de mars 2011, l’Un arrivait à perdre le pouvoir, elle ne peut s’en prendre à elle et à elle seule.

Marcel Zoumènou

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