Le Professeur Idrissou Abdoulaye, Directeur général du Cnhu apprécie ici l’évolution du système sanitaire béninois au cours des 50 ans d’indépendance. Il estime, entre autres, qu’il faut penser à construire d’autres centres de référence pour désengorger le Cnhu.
Le Bénin vient de célébrer les 50 ans de son accession à l’indépendance. Quels sentiments vous animent en tant que Béninois tout simplement ?
C’est un sentiment de fierté et en même temps d’interrogation sur les 50 années d’indépendance que nous venons de passer. Je me pose toujours la question de savoir où nous allons quand bien même je reconnais les différents efforts qui sont consentis par les gouvernements successifs depuis 1960. Mais le plus important est de savoir ce que chaque Béninoise et chaque Béninois ont pu faire à leur propre niveau pour le développement de ce pays. Quand je prends le secteur de la santé principalement qui est le plus social au Bénin, je crois qu’il y a encore beaucoup à faire.
Justement, en tant que professionnel de santé de haut niveau, quel regard portez-vous sur l’évolution du système sanitaire national au cours de ces 50 ans ?
Je dirai que le secteur a évolué en dents de scie. S’il est vrai qu’aux lendemains des indépendances, il y a eu beaucoup de choses qui ont été amorcées, il n’est pas moins vrai qu’à la suite, nous avons un peu bégayé, et chacun a naturellement des responsabilités dans ce bégayement. Nous devons nous dire maintenant qu’il y a un appel au devoir pour chacun et pour tous. Nous devons nous demander de plus en plus ce que nous pouvons amener à notre pays et non ce que notre pays peut nous amener, pour paraphraser ce grand homme des Etats-Unis.
Le Cnhu a aussi son histoire à raconter durant ces cinq dernières décennies. Qu’est-ce que vous en retenez?
Le Cnhu étant un élément du système de santé national en général, son évolution est un peu la photocopie de l’évolution de ce système de santé. Mais, il est vrai que ces dernières années, il y a eu beaucoup d’améliorations dans les prestations de cet établissement sanitaire qui demeure le seul grand centre de référence en la matière dans notre pays. Je crois que nous, personnel de la santé, devons nous remettre au travail pour que la population soit mieux soignée.
Dans quel état se trouve exactement le Cnhu au jour d’aujourd’hui ?
Vous savez, je suis le secrétaire général du Réseau des hôpitaux d’Afrique, de l’Océan indien et des Caraïbes, et si je dois me livrer à une comparaison de tous les centres de santé des pays membres qui ont le même statut que le Cnhu, je crois même que nous sommes, toute modestie gardée, parmi les premiers, sans occulter le fait qu’il y a encore beaucoup de choses à faire et que nous avons un génie béninois que nous n’exploitons pas encore suffisamment. Nous pouvons faire mieux, l’essentiel est de croire à nos valeurs, ce qui nécessite comme le dirait l’autre, un réarmement moral empreint d’ingéniosité du travail et du travail bienfait.
Etes-vous heureux d’être un Directeur général du Cnhu qui n’en finit pas toujours avec ses problèmes ?
Biensûr que oui, je suis heureux d’être le Directeur général du Cnhu et je remercie d’ailleurs l’autorité qui a bien voulu me nommer à ce poste. Je crois que tant qu’il y a la vie, il y aura toujours des problèmes, et c’est justement parce qu’il y a des problèmes qu’on m’a mis là. Mon devoir est donc de tout faire pour les résoudre. Mais je dois que si les problèmes dont vous parlez, nous les grossissons, c’est tout simplement parce que le Cnhu reste le seul hôpital de référence au Bénin, si on en avait 4, 5, 6, ces problèmes seraient moindres. Nous devons donc travailler à multiplier des centres de ce rang dans les 50 prochaines années.
En plus de votre fonction de Directeur général, vous continuez également de diriger le service de biochimie du Cnhu. Dans quel état de se trouve-t-il aujourd’hui et quelle place occupe-t-il au sein du Cnhu ?
C’est un service dont je suis fier et que je dirige depuis les années 1997-1998. Il n’a rien à envier à ses homologues des pays du Nord. Et pour cause, tous les américains et tous les européens qui viennent ici au Bénin nous tirent leur chapeau. Mais, nous pouvons mieux faire encore dans ce service qui est un service d’appoint pour les services cliniques et chirurgicaux.
Que proposez-vous concrètement pour rendre plus efficace et plus opérationnel le système sanitaire béninois dans les cinquante prochaines années ?
Cette question est un peu délicate pour moi. Je crois que c’est l’autorité qui va en décider, mais je continuerai à jouer mon rôle de conseiller auprès de mon ministre de tutelle pour que le système sanitaire puisse devenir plus efficace et plus efficient partout, car il faut le dire, nous investissons beaucoup dans ce secteur et les résultats doivent nous interpeller tous.