Michèle Alliot-Marie : dernière naufragée du mal diplomatique français

La France a mal à sa diplomatie. Depuis 2007, il y a manifestement un boulon qui s’est grippé dans l’appareil diplomatique de la grande France désormais en mal de lisibilité. Après le french Doctor qui n’était pas franchement dans son élément, Nicolas Sarkozy a jugé utile de confier les destinées de la France à une dame. C’était inédit en France, mais ça s’est déjà vu ailleurs. Auprès d’un allié admiré et envié. Michèle Alliot-Marie devait probablement incarner une Madeleine Albright, une Condoleeza Rice ou plus prosaïquement encore une Hillary Clinton présente sur tous les fronts.

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Il n’est pas singulier de nourrir des ambitions. Encore faudrait-il avoir les moyens de les assouvir. Ou plutôt les hommes ou les femmes (en l’espèce), pour y donner vie. Dommage, MAM aura fait long feu. La faute, non seulement à un empêtrement coupable dans une série de scandales et de polémiques, mais la faute aussi à une diplomatie qui depuis quatre ans, grille ses acteurs.

 

En accédant à la haute fonction présidentielle en 2007, Nicolas Sarkozy a professé vouloir incarner une « rupture » dans la conduite des relations extérieures de la France. Force est de constater qu’il n’a pas échoué. Sauf que la rupture annoncée n’est pas celle advenue. Aux inévitables jeux d’intérêts (qui a jamais cru la France capable de se passer de son pré carré africain ?), le président français a ajouté un indescriptible embrouillamini couronné comme on l’a vu par des échecs successifs. Avec Bernard Kouchner au Quai d’Orsay, il n’aura pas fallu bien longtemps pour commencer à regretter le temps des Védrine, Villepin et autre Barnier. Sont-ce les méthodes exubérantes de l’ancien patron de MSF et quelques propos malencontreux qu’il a tenus qui l’ont mis si tôt en disgrâce ? Ou alors doit-il aux révélations de la presse française sur les gigantesques commissions qu’il se faisait verser pour ses consultations même en Afrique, d’avoir autant malmené l’image et le symbole de l’ouverture à gauche et de la tournure pro-démocratique de la nouvelle France ? Une chose est certaine, Nicolas Sarkozy n’aura pas attendu le moindre faux-pas de son ministre pour se poser en premier et presque seul concepteur et metteur en scène de la diplomatie française de ses premières années de présidence. Dans le même temps, la clarté des positions et des principes défendus par la France dans le monde était peu évidente. Pendant de nombreuses années, l’organisation pratique des institutions de la politique extérieure de la France étaient confuse. Et ce ne peut pas être du seul fait de Bernard Kouchner. Outre le très actif président de la République, une cellule diplomatique installée à l’Elysée et pilotée par l’éminence grise Claude Guéant a pu brouiller les cartes. Sans compter la petite Rama Yade qui, du haut de son Secrétariat d’Etat aux Affaires étrangères et aux droits de l’homme a marqué de son empreinte la politique extérieure de la France par un certain nombre d’actions et de déclarations. Va Savoir comment se sent aujourd’hui Nicolas Sarkozy qui en 2009 a sévèrement réprimandé la jeune secrétaire d’Etat pour non seulement avoir refusé de participer à l’accueil en France du Guide libyen, mais en plus de l’avoir fait savoir !

On s’en rend compte aujourd’hui, les recadrages, restructurations et remaniements de toutes sortes ne suffisent pas à guérir le mal diplomatique français. Et n’y suffiront certainement pas. N’en déplaise à Michèle Alliot-Marie, le passé antérieur (à Nicolas Sarkozy) de la diplomatie française, s’il ne cadre pas complètement avec la proclamation de nation des droits de l’homme que la France se veut être, porte en elle les traces d’une gloire perdue. C’est en reconnaissance de cette époque dont il est un des acteurs clé qu’Alain Juppé a sans doute été choisi pour reprendre le flambeau. Et s’il est vrai que c’est par son fait que Claude Guéant est entré à son tour au gouvernement pour ne pas gêner son action depuis sa cellule diplomatique élyséenne, la stratégie n’est pas malheureuse. Car les chances de succès de l’ex-premier ministre seront fonction de la capacité de leadership que pourra déployer ce dernier dans l’exercice de ses nouvelles fonctions.

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A un an de la fin de son mandat, alors qu’il est au plus bas dans les sondages et au moment où lui échoient les présidences du G8 et du G20, Nicolas Sarkozy a intérêt à laisser la gestion des affaires diplomatiques et de l’image extérieure de la France à des professionnels. Ceux qui dans le tourment des tribulations du monde arabe, sont capables de voir venir et d’assumer leurs vues. Ceux qui peuvent remettre une doctrine dans la conduite de la diplomatie française. Ceux par qui la France pourra parvenir à redresser cette image autant froissée à l’extérieur. Quant à Michèle Alliot-Marie dont j’ai été l’un des premiers à annoncer il y déjà un mois, la chute probable, elle peut se rassurer. En politique française aussi, on peut rebondir. Elle n’aura qu’à demander conseil à son illustre successeur au poste.

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