Controverse autour de la Lépi: une élection contraire aux principes des droits de l’homme

Bénin – Par  des arguments, des comparaisons, l’on justifie la non prise en compte de plus d’un million de Béninois ayant l’âge de voter et exprimant ce désir de participer au scrutin devant leur permettre d’élire le prochain Président de la République. A  analyser de près, les arguments avancés par ceux qui justifient  cette situation, ils évoquent le comportement  des  politiciens ayant  lancé des mots  d’ordre en occultant malheureusement  les dysfonctionnements qui ont émaillé le processus. La lecture juste et objective de la loi n°2009-10 du 13 mai 2009 portant organisation du recensement électoral national  approfondi et  établissement de la liste Electorale permanente Informatisée (lépi) montre que les  délais légaux qui entourent le processus ont été manifestement violés. Rien qu’à prendre l’article 30 qui réglemente  la correction de la liste Electorale Informatisée provisoire (Leip), l’on se demande si le processus prévu par le législateur est  respecté.

-Présentation de la liste électorale informatisée provisoire par village ou quartier de ville, par arrondissement, par commune par circonscription électorale  et par département ;

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–        Affichage à plusieurs  endroits du village  ou du quartier de ville pendant quinze(15) jours ininterrompus ;

– Réclamation des citoyens en rectification, inscription et radiation  des électeurs frauduleux ;

–       Période de traitement des réclamations dans un délai de dix (10) jours ;

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–       Saisine  de la cour constitutionnelle  dans un délai de 5 jours.

Selon l’article 30 de cette loi, les délais statutaires à respecter en matière de réclamation sont imposés  par la loi. Ainsi, les réclamations doivent se faire dans un délai de 15 jours si l’on prend en compte l saisine de la cour constitutionnelle.

Mais à quoi avons-nous assisté ?

Tous ceux qui sont au Bénin pendant la période même ceux qui  aujourd’hui  justifient la non prise en compte  de nos compatriotes, reconnaissent  que les délais n’ont pas été respectés. Et pourtant l’on justifie cette situation en prenant des exemples d’autres pays.

Cessons avec ces arguments car ailleurs la liste électorale ne se fait pas dans la précipitation et l’on ne viole pas les textes pour la réaliser. Les textes régissant la (lépi) ont été manifestement violés au vu et au su de tout le monde, y compris des institutions chargées de garantir le droit de vote.

Sinon, comment comprendre qu’aucun requérant ayant soulevé les réclamations (radiation des  de citoyens, rectification des erreurs dans les données ou changement de données) n’ait reçu la notification qu’impose le dernier alinéa de l’article 30 de la loi n°2009-10 du 13 mai 2009 portant organisation de recensement électoral national approfondi et établissement de Informatisée (LEPI)

La loi n’a-t-elle pas stipulé à l’article30alinea 8 que « dans tous les cas, les réclamations (radiation  de citoyens, rectification des erreurs dans les données ou changement de données)   et portées au fichier électoral national doivent faire l’objet de notification au requérant, à toute personne concernée et à toutes les autorités administratives de son lieu de résidence pour information« 

Pour nous convaincre de cette volonté d’écarter des citoyens, l’on peut se référer  au site web du CPS  LEPI. Sur ce site (http://cpslepi-benin.INFO/telechargement.shtml), il est mentionné un citoyen à la rubrique « la libre tribune  » du site. Monsieur KOUKPONOU  G .Rémy raconte: « Moi et ma petite famille avions été recensés pour la première phase .Mais nous n’avons vu personne au Recensement porte à porte .Nous nous sommes présentés à  l’enregistrement des Données Biométriques pour nous entendre dire que sans  le RPP, nous ne pouvions pas être recensés après une journée entière de rang .En guise de réconfort moral on a pris nos contacts  téléphoniques. Inquiets de ne recevoir aucun appel, nous nous sommes déplacés au chef lieu de notre arrondissement, le 9ème de Cotonou et l’équipe en place nous a demandé de passer le vendredi 28 janvier 2011 après avoir enregistré nos noms et prénoms dans un cahier. Mais après un quart d’heure environ dans les rangs, on nous signale que l’enregistrement des données biométriques ne se fera que pour ceux qui avaient le ticket du RPP. On nous a apaisés en disant de ne pas nous inquiéter et que de toutes les façons, notre enregistrement se fera. Grande est alors ma surprise et mon désarroi d’apprendre de ma femme vers 13 heures ce jour mardi 1er février 2011 que les enregistrements sont définitivement terminés et qu’ils ne reprendront qu’après les élections présidentielles et législatives. Alors si cette information est vraie, dois-je comprendre que je ne peux pas être éligible et électeur pour les prochaines élections au moins et pour les dix prochaines années si par la faute des équipes d’enregistrement, moi et ma famille n’arrivions pas à nous faire recenser comme c’est le cas actuellement?

Si ce commentaire est publié sur le site officiel de la Cps-lépi cela veut dire que les acteurs du processus sont bien conscients de la situation. Ce que ce Monsieur a dit, beaucoup de Béninois sont dans cette situation.

Il n’est donc pas normal ni acceptable que l’on aille aux élections en excluant les citoyens.

Se faire élire dans une pareille situation c’est ‘’voler’’ les élections avec toutes les conséquences que cela peut engendrer. Jamais au grand jamais depuis le début de notre processus démocratique, nous sommes arrivés à une pareille situation où les citoyens en âge de voter et qui ont le droit de voter, qui le manifestent clairement se retrouvent exclus du vote par un processus appelé lépi.

Ne doit-on pas assimiler la situation de ceux qui ont régulièrement voté et qui par le fait de la lépi sont exclus du vote à la jurisprudence de «l’effet-cliquet»  inaugurée par la Cour constitutionnelle dans sa décision DCC 10-049 du 5 avril 2010?

Selon cette jurisprudence l’effet-cliquet est un phénomène qui empêche le retour en arrière d’un processus une fois un certain stade dépassé, un mécanisme qui empêche un système de revenir en arrière et la force implicitement à aller de l’avant.

L’effet cliquet a été utilisé par la jurisprudence du conseil constitutionnel français pour procurer une protection particulière à certaines libertés, concernant par exemple la presse, les professeurs d’université ou la liberté d’association. Cette protection consiste à considérer comme inconstitutionnelles toutes les lois qui, au lieu de les rendre plus effectives, auraient pour objectif de revenir en arrière pour édicter un régime plus sévère ou restrictif.

En clair, une loi appelée Lépi ne peut et ne doit pas empêcher le citoyen régulièrement électeur et ayant été enrôlé de ne pouvoir pas voter ou exprimer son vote.

Le droit de vote est un droit constitutionnel que la Cour constitutionnelle doit protéger.

Une analyse objective des résultats de la lépi par département montre clairement les problèmes que pose la mise en œuvre de ce processus sans prendre en compte les exclus.

Cessons de jouer avec le peuple et réglons cette situation qui frise de l’injustice

Où étions-nous lorsqu’on violait allégrement les délais constitutionnels pour en faire maintenant une condition lorsqu’il s’est agi de rectifier l’erreur d’exclusion des milliers de citoyens du processus électoral?

Le délai constitutionnel pour la mise en place de la Céna ou de la mise à disposition de la lépi est-il respecté?

Le retard dans le processus (retard dans l’installation de la Céna, disponibilité de la lépi) ne doit pas nous amener à repenser la date prévue pour le premier tour?

Pourquoi cette rigidité s’il est clair pour tout le monde que des Béninois en âge de voter sont exclus?

Les citoyens qui sont exclus sont-ils des morts comme on semble l’affirmer?

Non ! Le mort ne se manifeste pas.

Il faut qu’on cesse de vouloir se faire élire dans une pareille situation car, le droit de vote est un élément fondamental de l’Etat de droit.

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