Houngbédji dépose un recours à la cour constitutionnelle

MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE

COTONOU

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OBJET :    Recours en annulation totale ou partielle

du premier tour du  scrutin présidentiel du 13 mars 2011.

Monsieur le Président,

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J’ai l’honneur de porter  par la présente  à votre connaissance les faits et actes ci-dessous exposés aux fins pour votre haute juridiction de les constater d’une part, et de les sanctionner conséquemment d’autre part.

I- EXPOSE DES FAITS

1.1.1 Inexistence d’une liste électorale constitutive du corps électoral

Sur autorisation et proposition de votre haute juridiction, le Président (candidat à sa propre succession) a convoqué le corps électoral pour le dimanche 13 mars 2011 en vue de la tenue effective du 1er tour du scrutin présidentielle : decret n° 2011. A la date de convocation du corps électoral, il est non contestable que le BENIN ne disposait pas d’une liste Electorale Permanente Informatisée comme le prescrivent les lois 2009-10 du 13 mai 2009 (articles 3, 8, 11, 30, 31, 32 et 34) portant organisation du recensement électoral national approfondi et établissement de la LEPI, et la loi 2010-33 du 7 janvier 2011 portant règles générales pour les élections (articles 4, 5 et 7).

Il s’en est suivi que la CENA a été incapable de nous fournir la liste électorale constitutive du corps tel que convoqué malgré ma sommation de la faire (PV de sommation interpellative de l’étude de Me Laguidé adressée à ma requête à divers responsables de la CENA  (Pièce jointe n°1)

1.1.2 Inexistence d’une liste exhaustive des bureaux de vote et création clandestine de bureaux de vote le jour du scrutin.

Le principale caractéristique de ces bureaux de vote crées le jour même du scrutin, c’est que je n’ai évidemment pas pu y faire désigner des représentants. Et jusqu’à ce jour, la CENA interpellée n’a pas été en mesure de me produire la liste exacte des bureaux de vote arrêtée par elle (PV de sommation interpellative de l’étude de  Me Laguidé adressée à ma requête aux responsables de la CENA).

Pour illustrer davantage cette situation, je me bonnerai à citer le témoignage de Mr Razaki AMOUDA membre de la CENA, coordonnateur départemental de la CENA dans le Borgou-Alibori.

Le jeudi 17 mars 2011, ce magistrat a déclaré devant toute la presse réunie :

« La Lépi qui devrait être faite 60 jours avant le scrutin n’était pas prête même le jour du scrutin. Et je pense que nous avons organisé les pires élections aujourd’hui au Bénin parce qu’au moins avant on avait une liste même si elle était manuelle. Nous avons été amenés à organiser des élections sans liste. Personne ne connait le corps électoral. Ceci étant, j’ai noté notamment dans le Borgou qu’il y a eu beaucoup de bureaux pirates et je m’explique.

En tant que coordonnateur départemental, le rôle qui m’a été assigné et à tous les coordonnateurs départementaux d’ailleurs, c’est de nommer le personnel des bureaux de vote sur proposition donc des CEC. Donc en ma qualité du coordonnateur de ce département, je devrais aussi procéder à cette nomination. J’ai eu à le faire et cela m’a permis de connaitre le nombre de bureaux de vote qu’il y a dans chacune des communes de ce département. Parlant du Borgou, je prendrai la commune de Bembèrèkè. Il y a eu 103 bureaux de vote et le personnel de bureaux de vote a été nommé pour ces 103 bureaux de vote.

Pour Kalalé, il y a 104, pour N’dali 147, Nikki 241, Parakou 375, Pèrèrè 87, Sinendé 117, Tchaourou 253. Donc voilà les bureaux de vote dont le personnel a été régulièrement nommé. Et nous nous sommes entendus avec les coordonnateurs, les bureaux de la CED Borgou et le bureau de la CED Alibori qu’il ne devrait pas avoir d’autres bureaux de vote sans qu’en tant que coordonateur je n’en sois informé. Mais il faut dire que c’était impossible même déjà de désigner d’autres bureaux de vote parce que le matériel n’était pas disponible pour la création de nouveaux bureaux de vote. Donc de nouveaux bureaux de vote n’ont pu être créés régulièrement.

Mais au dépouillement au niveau du département quand j’ai voulu faire le point des urnes, le nombre d’enveloppes parvenues à la CED est ceci. A Bembèrèkè, il y a 166, ce qui veut dire qu’il y a 05 bureaux de vote complémentaires dont je ne connais pas le personnel. A Kalalé 166, ce qui fait 32 bureaux de vote en plus. N’dali 140 au lieu de 147 ce qui fait une diminution de 07 bureaux qui est aussi injustifiable.

On peut commenter cela dans tous les sens. A Nikki 241 au lieu de 246, à Parakou, il y a eu 381 au lieu de 375, Pèrèrè 100 bureaux de vote au lieu de 87, donc 13 en plus, Sinendé 01 en moins et Tchaourou 287 au lieu de 253, ce qui fait 34 bureaux de vote irrégulièrement créés. Voilà donc le point de bureaux de vote que je peux appeler de pirates dans ce département ».

1.1.3 La création de plusieurs bureaux de vote fictifs

Plus de quatre cent (400) bureaux de vote fictifs ont été dénombrés dont la liste est jointe au présent recours (Pièce jointe n°2)

A raison de trois cent cinquante (350) votants par bureau, c’est plus de cent quarante mille (140 000) voix qui ont été par ce truchement frauduleusement portés au crédit du candidat YAYI Boni. Et cette liste n’est pas exhaustive ! (Dans sa déclaration relative aux seuls départements du Borgou-Alibori, le magistrat Amouda Razak corrobore la création de bureaux de vote fictifs lorsqu’il affirme qu’il était  ‘’impossible même déjà de désigner d’autres bureaux de vote parce-que le matériel n’était pas disponible’’ ; les bureaux de vote étaient donc fictifs)

1.1.4 Erection du vote par dérogation en principe général de vote, avec liberté à chaque électeur de voter dans le bureau de vote de son choix, sans nécessairement figurer sur la liste électorale d’un bureau de vote, et sans document véritablement identifiant.

En raison même de son caractère, le vote dérogatoire est strictement réglementé pour éviter les cas de fraude qu’il génère : l’article 61 de la loi portant règles générales pour les élections cite clairement les cas où le vote par dérogation est autorisé.

Or la CENA, pour n’avoir pas pu traiter selon les règles et intégrer au fichier national les électeurs enrôlés jusqu’à la veille du scrutin, a autorisé des électeurs à voter avec des documents non identifiants, alors qu’aucune disposition des lois 2009-10 (Lepi) et 2010-33 (Règles générales) ne lui permet de prendre une telle liberté totalement contraire à la transparence du scrutin.

Mieux, la CENA a complété l’arsenal de fraudes en élargissant le vote par dérogation à tous les électeurs prétendus, sous prétexte d’une part de suppléer à l’absence de liste d’électeurs, et sous prétexte d’autre part de rapprocher les bureaux de vote du lieu de résidence des électeurs.

Grâce à la généralisation du vote dérogatoire, la CENA a facilité les votes multiples, les votes de mineurs et d’étrangers dans les régions favorables au candidat YAYI Boni, le bourrage d’urnes, la nomination univoque des membres de bureaux de vote, les permutations autoritaires des présidents de bureaux de vote au profit du candidat YAYI Boni, les libéralités le jour même du scrutin, etc. …(Cf. PV.  des études de Me Gilles Agossou et Honvo ; pièces n° 3).

L’ampleur du vote par dérogation et son impact sur le dépouillement ont été tels que le service informatique de la CENA a dû demander au Président de la CENA l’autorisation de sauter les verrous de sécurité qui avaient été mis en place pour assurer le sérieux et la sincérité de la compilation des résultats : (Cf la fiche de Monsieur Jacques TEVOEDJRE, responsable CTIS-CENA 2011 à l’attention du président de la CENA, pièce n°4).

1.1.5 Nombre de votants supérieurs au nombre d’inscrits

Dans de nombreux bureaux de vote de zones favorables au candidat YAYI Boni, le nombre de votants était supérieur au nombre des inscrits !

La preuve de cette assertion est rapportée par :

–      La fiche de Mr Jacques Tévoédjrè ci-dessus citée où l’intéressé écrit expressément : ‘’les suffrages exprimés dans les bureaux de vote sont souvent supérieurs au nombre des inscrits’’.

–      Les fiches de dépouillement de quelques bureaux de vote dans l’Alibori. (Pièce n° 5)

1.1.6 L’approvisionnement opaque de zones favorables au candidat YAYI   BONI de certains documents électoraux.

Monsieur Amouda Razacki a dit dans sa déclaration précitée :

« . J’ai noté donc que le jour du scrutin, un hélicoptère a amené des bulletins de vote dans le Borgou et en tant que coordonnateur, je n’ai pas été informé de cela. Ces bulletins de vote sont arrivés et descendus directement à Tchaourou par hélicoptère.

Donc les membres de la CEC Borgou ne sont pas au courant de la quantité de bulletins déversés à Tchaourou. Le reste a été convoyé à Parakou et 5.000 bulletins de vote ont été envoyés dans chaque commune du Borgou par des personnes que je ne maîtrise pas ».

Cet approvisionnement anarchique et opaque des bulletins de vote dans des zones favorables au candidat Boni YAYI est intervenu hors du contrôle des autorités locales compétentes de la CENA, ce qui a favorisé des fraudes massives dans les zones concernées. En tout état de cause, le nombre de bulletins débarqués dans ces zones n’étant point connu, tous les excès deviennent possibles dans le contexte de création sans limite de bureaux de vote et de systématisation du vote par dérogation instauré par la CENA.

1.1.7  Distribution de bulletins de vote pré estampillés « YAYI Boni » aux électeurs contre rémunération ou promesse de bénéfice de micro finance.

Des dénonciations ont fait état de l’utilisation de bulletins pré estampillés par les partisans du candidat Boni YAYI  qui les confient à l’avance aux électeurs contre rémunération ou promesse de bénéfice de micro crédit surtout en ce qui concerne les femmes. Des urnes entières ont été bourrées de ces bulletins pré estampillés comme peut l’attester le PV de l’huissier DAGBENONBAKIN ;   (pièce n° 6).

La plupart de ces bulletins ne sont pas venus d’un carnet à souche, et portent souvent une estampille différente de celle de la CENA 2011 : la Cour pourra le vérifier.

1.1.8 Des scellés portant les mêmes numéros facilitant les manipulations frauduleuses.

Ils proviennent tous des zones favorables au candidat YAYI Boni.(Voir pièce n° 7  jointe en annexe).

1.1.9   Des Plis électoraux non scellés transportés à la CENA dans des cantines  non munies de cadenas.

Ces faits été totalement avérés le président de la CENA a fait obstruction à toutes les démarches de mes mandataires en vue de faire constater par voie d’huissier le transport  de plis électoraux non scellés dans des cantines non munis de cadenas en provenance du département du Borgou. (Cf. PV de constat  des études de Me LAGUIDE  et de Me BANKOLE ; pièces n°1).

1.1.10  Transmission tardive à la CENA et à la COUR Constitutionnelle des documents électoraux de l’Alibori.

L’article 85 de la loi portant règles générales pour les élections en République du Bénin dispose en son alinéa 7 : « En tout état de cause, la centralisation des cantines et des plis scellés doit être terminée au niveau de la CENA, quarante-huit heures au maximum, après le jour des élections ». Or les cantines provenant du département de l’Alibori ne sont parvenues à la CENA que le mercredi 16 mars à l’aube, soit plus de quarante-huit après le scrutin. La transmission tardive, selon la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle tirée de sa décision rendue en 2006 est une cause de nullité. En conséquence, tous les suffrages provenant du département de l’Alibori devraient être annulés. (Sur la transmission tardive des cantines et plis électoraux en provenance du département de l’Alibori, Cf PV. de constat de Me LAGUIDE, pièce n°1)

1.1.11 De l’ouverture des enveloppes et de leur reconditionnement : le flagrant délit de la commune de OUESSE. (Cf pièce jointe n°8).

1.1.12 Du vote des mineurs dans l’Alibori et le Borgou :

Ces votes irréguliers effectués dans deux départements favorables à YAYI Boni n’ont pu que lui profiter. ( Cf  DVD ; pièce n°9)

Les procédés de fraudes étaient si variés et les fraudes si massives dans le Borgou et l’Alibori  qu’un collectif des mandataires et membres de bureaux de vote de ces deux départements s’est constitué, a mis sur pied un bureau et a fait à la presse une déclaration liminaire dénonçant les irrégularités, menaces et intimidations. (Pièce n°10)

 

II- Parti pris du Président de la CENA en faveur du candidat YAYI Boni

La CENA, organe en charge de la préparation, de l’organisation, du déroulement, de la supervision des opérations de vote et de la déroulement, de la supervision des préparations de vote et de la centralisation des résultats, ayant tout pouvoir d’investigations pour assurer la sincérité du vote (cf. article 24 de la loi n° 2010-33 du 07 Janvier 2011, portant règles générales pour les élections en République du Bénin) d’une part, est tenue de s’assurer de l’exactitude et de la pertinence des données électorales selon les dispositions de l’article 8 de la loi 2009-10 précitée d’autre part ; or elle s’est complue dans un mutisme quant à l’inexistence de la liste électorale comme prescrite par la loi en République du Bénin. De ce point de vue, elle n’a cru devoir appeler l’attention du Président de la République sur ce fait, à l’occasion de la convocation du corps électoral, mais encore saisir votre haute juridiction, seul juge du contentieux électoral en l’espèce.

Elle a plutôt organisé dans ce contexte d’inexistence de la liste électorale  le scrutin du 13 Mars 2011 en violation de toute règle de transparence exigée en cette matière par les lois précitées. En effet, la liste électorale n’a jamais été publiée selon les dispositions de l’article 32 de la loi 2009-10 précitée.

Elle n’a pas pu, non plus,  fournir aux candidats, dont moi,  la liste des bureaux de vote avant le déroulement du scrutin ainsi que le prescrit opportunément l’article 58 de la loi 2010-33 précitée : «  la liste des centres et bureaux de vote créés et arrêtés par circonscription administrative est portée à la connaissance des candidats, des partis politiques ou alliances de partis politiques  et citoyens par voie d’affichage et autres moyens appropriés quinze jours minimum avant le jour du scrutin… » Pour réaliser leur dessein d’assurer un bâillonnement total et frauduleux du processus électoral, la CENA s’est autorisée à nommer dans des bureaux de vote des personnes non qualifiées telles que des élus locaux, contrairement aux dispositions de la loi. (Cf  PV  de l’étude de Me HONVO ; pièce n°11).

Le même article 58 sus-cité précise que le bureau de vote est tenu selon le cas par 3 ou 4 agents électoraux nommés par la CENA après leur désignation au niveau de la CEC sur proposition des candidats ou des partis ou alliances de partis politiques en lice ; il est donc irrégulier que de nombreux bureaux de vote à travers le territoire national soient truffés d’agents électoraux d’un seul et unique bord politique, à savoir la mouvance présidentielle. Du reste, toujours selon les dispositions dudit article, les propositions de tous les candidats ou listes de candidats doivent être prises en compte dans les centres et bureaux de vote de l’arrondissement de sorte que deux membres d’un bureau ne puissent provenir d’un même candidat ou d’une même liste.

Il s’ensuit donc, au regard de tout ce qui précède une absence de liste électorale nationale  et l’inexistence d’une liste fiable des centres et bureaux de vote dans le cadre du scrutin du 13 Mars 2011.

Cet acharnement à ne pas assurer la transparence du scrutin s’est aggravé par l’autorisation  donnée par la CENA, la veille du scrutin, de  création tous azimuts de nombreux autres bureaux de vote incontrôlés par elle, encore moins par les candidats, y compris moi – même.

C’est dans cette ambiance de confusion généralisée que la CENA a autorisé sans aucune mesure de sécurité l’élargissement du vote par dérogation.

Fait plus grave, la distribution des cartes d’électeurs n’étant pas achevée jusqu’à moins de 24 heures du démarrage du scrutin, la CENA a instruit ses démembrements  d’accepter le vote à partir des récépissés d’enregistrement de l’électeur, la fiche d’indication du bureau de vote de l’élection.

L’élargissement du vote par dérogation couplé à la possibilité de voter avec des documents autres que la carte d’électeur, a entrainé dans de nombreux centres de vote, surtout contrôlé par la mouvance présidentielle au pouvoir les votes multiples, ceux des mineurs et des étrangers. (Voir DVD joint en annexe dans lequel, sous le regard constant de représentants de la Cour Constitutionnelle, des mineurs, munis de documents électoraux, ont pu voter ; pièce n°9).

Par conséquent, toutes ces irrégularités ont été commises en violation des dispositions de l’article 10, 61 et 58 alinéa 1, 2, 3, 4 et in fine de la loi 2010-33 du 07 Janvier 2011 précitée.

Plus spécialement et nonobstant toutes les autres dispositions précitées, la CENA en organisant le scrutin du 13 Mars 2011 a violé de façon  rédhibitoire l’article 4 de la loi 2010-33  qui dispose, (citation) :

« L’élection a lieu sur la base d’une liste électorale permanente informatisée (LEPI) ».

« C’est une liste unique exhaustive et nationale avec photos de tous les citoyens en âge de voter ».

« Il existe au niveau de chaque village ou quartier de ville, de l’arrondissement, de la commune, du département et de chaque représentation diplomatique ou consulaire, une liste électorale qui est un extrait de la liste électorale nationale ». (Fin de citation).

Comme il plaira à votre haute juridiction de le constater, toutes nos démarches à l’endroit de la CENA sont restées vaines du fait de cet organe par l’instrument de son président qui,  dans l’impossibilité matérielle de nous fournir de telles listes, n’a fait  qu’user de dilatoires pour se dérober à la loi (cf. PV étude Me LAGUIDE . Pièce n°1)

Il y a donc lieu de sanctionner ces irrégularités.

Poursuivant la violation de la loi, la CENA, organe en charge de la gestion du scrutin, s’est opposée, par l’entremise de son Président, de façon véhémente à la manifestation de la vérité aux fins de transparence  et de sincérité du vote en empêchant des huissiers de justice d’opérer les constats découlant de la transmission tardive des documents électoraux provenant de l’Alibori ainsi que, les cantines et plis non scellés du département du Borgou (Cf. PV étude Me LAGUIDE ; pièce n°1).

Il en résulte une volonté manifeste de l’organe, par le truchement de son Président,  de s’associer à la fraude  en empêchant par tous les artifices  les  constats d’huissier pour la pré constitution  des éléments de preuve de certaines dérives observées. Par exemple  les huissiers dépêchés pour constater la transmission tardive des plis électoraux ou l’acheminement  à la CENA de cantines et plis non scellés en ont été empêchés par certains responsables de la CENA ; Certains d’entre eux ont même  été brutalisés et mis à la disposition de l’officier chargé de la sécurité de la CENA pendant des heures.

Il est de jurisprudence constante de la Cour Constitutionnelle de sanctionner la transmission tardive des plis scellés à elle destinés. Ce principe a été réaffirmé dans  la proclamation des résultats de l’Election Présidentielle du 5 Mars 2006. Cette censure s’impose au sens de   l’article 85 alinéa 7 de la loi 2010-33 précitée. Au sens de cette disposition, toute transmission de plis électoraux ou de cantines les contenant  parvenue à la CENA plus de 48 heures après le jour du scrutin est réputée tardive.

En l’espèce, l’opposition outrancière de la CENA, par les sorties médiatiques de son Président, participe d’une dissimulation délibérée de cet organe en charge d’assurer la sincérité et la transparence du scrutin du 13 Mars 2011. La collusion du Président de la CENA avec le candidat de la mouvance présidentielle, Yayi Boni, dans l’instrumentalisation avérée de la CENA est évidente. Le Président de la CENA, le Porte-parole de la CENA et certains responsables de la Majorité Présidentielle ont reconnu au cours de diverses interventions et sorties médiatiques que les faits de transmissions tardives et d’existence de cantines et plis non scellés provenant de l’Alibori et du Borgou sont vérifiés ; toutefois selon eux, ils ne seraient pas de nature à entacher la sincérité du vote. Mais alors l’on est en droit de se demander pourquoi ces acteurs  du processus électoral se substituent à Votre Haute Juridiction pour apprécier la gravité desdites irrégularités. Dans tous les cas de figure, il conviendrait que la Cour ne se laisse pas embarquer dans une démarche de banalisation de vastes fraudes à la loi, largement diffusées dans les mass media (radios, télévisions, journaux et déclarations de divers candidats….), même si tout  a été tenté  pour les camoufler par une farouche résistance de la CENA à la pré constitution des preuves des dispositifs ayant favorisé  le tripatouillage des documents électoraux sensibles dans les divers bureaux de vote dans les parties du territoire national mises sous contrôle par le pouvoir  exécutif et sa mouvance présidentielle au profit du candidat Yayi Boni. Somme toute, Votre Haute Juridiction devra constater l’opposition illégale de la CENA pour me permettre de constituer des preuves inattaquables de violation de la loi et de fraudes dans la gestion et l’acheminement des documents électoraux sensibles après le déroulement du scrutin. Elle constatera aussi que cette résistance injustifiée enfle à tout le moins une suspicion légitime sur l’impartialité de la CENA à assurer la sincérité du scrutin et sur la fiabilité des travaux de compilation des chiffres à vous adressés par cette dernière. Aussi votre Haute Juridiction devra-t-elle censurer conséquemment ces irrégularités.

Dans le même ordre d’idées, de façon partisane, à tout le moins propagandiste, le Président de la CENA, agissant pour le compte de l’institution, a violé son serment dans son aspiration forcenée à rendre service à son camp politique en publiant sans aucune précaution des indications qui seraient issues des travaux de compilation des résultats par la CENA.

Mais force est de constater qu’il s’agit ni plus ni moins d’une opération commanditée dont il a été l’agent servile  dans le seul but  de conditionner le peuple à accepter un hold-up électoral  validé par la Haute Juridiction en raison des données inexactes tripatouillées à elle transmises.

Aussi votre Haute Juridiction devra-t-elle constater à l’examen de l’allocution de présentation des résultats de l’élection du 13 mars 2011, prononcée le 18 Mars par le Président de la CENA, le caractère partial et entièrement orienté de ce discours alors que la loi 2010-33 en son article 24 est formelle et lui interdit désormais une telle  intervention dans le processus électoral.

En agissant comme il l’a fait, le Président de la CENA a engagé l’organe dans une forfaiture que votre Haute Juridiction devra sanctionner.

En effet, l’article 34 alinéa 5 prescrit : « après centralisation des élections législatives et présidentielles, la Commission Electorale Autonome le transmet à la Cour Constitutionnelle pour vérification de leur régularité, examen des réclamations et proclamation des résultats définitifs. »

Dés lors, sauf manipulation intéressée, il n’appartient plus à la CENA de publier désormais « des indications » comme le soutient le Président de la CENA.

Au demeurant, cette publication illégale préjudicie aux prérogatives de la Cour Constitutionnelle et illustre une imposture qui décrédibilise dans tous les cas de figure les travaux de compilation et leur transmission.

III- EN DROIT

Des faits et griefs évoqués, il ressort la violation des articles 45 et 47 de la Constitution et des articles 4, 58, 60, 61, 64, 80, 85, 107, de la loi 2010-33 portant règles générales ainsi que les dispositions de la loi complétive.

3.1.1 Violation de l’article Art 47. de la date et du délai de trente jours au moins et quarante jours au plus avant la date d’expiration des pouvoirs du Président en exercice pour l’organisation du 1er tour de l’élection.

En violation de l’article 47 de la Constitution, le scrutin présidentiel a eu lieu le 13 mars 2011 à 25 jours du terme du mandat prévu pour le 6 avril 2011 soit moins de 30 jours avant le terme constitutionnel du mandat en cours. Dans ces conditions, le premier tour qui devrait avoir lieu au plus tard le 06 mars 2011 pour permettre au processus électoral de disposer de tous les délais nécessaires au traitement et aux contestations des résultats afin que la Cours constitutionnelle puisse statuer et qu’il soit possible d’organiser un second tour s’il y a lieu, a conduit dans les faits, en raison de la violation dénoncée, à la contrainte d’aboutir à un seul résultat face à l’impossibilité d’achever ce processus électoral s’il y avait lieu d’envisager convenablement un second tour. Ce qui en plus de violer la Constitution, empêche aux candidats de jouir de leur droit de contestation, aux organes en charge d’organiser l’élection d’envisager toute possibilité d’organiser un second tour et en conséquence, tout ceci met en doute la sincérité du scrutin et de ses résultats face aux nombreuses irrégularités ci-après qui ont émaillé le scrutin.

3.1.2 Violation de l’article Art 45. -Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour de scrutin, il est procédé, dans un délai de quinze jours, à un second tour.

En violation des dispositions de l’article 45 de la Constitution, la proclamation des résultats intervenue le 22 mars 2011 après la violation du délai constitutionnel de 30 jours ci-dessus évoqué, n’avait pas d’autres issues possibles que de déclarer un résultat donnant la majorité absolue à un des deux candidats dans la mesure où, le second tour qui devrait intervenir dans un délai de 15 jours risquait de ne pas permettre de respecter le délai constitutionnel du terme du mandat en cours le 06 avril 2011 qui interviendrait dans les 15 jours sans la connaissance du Président élu. Dans ces conditions, les décomptes ont été extrapolés et les vérifications de la régularité du scrutin par les organes habiletés ont été négligées ainsi que le droit aux contestations et requêtes hypothéqué d’avance.

3.1.3 Violation de l’Article 64 de la loi 2010-33 : …Les bulletins uniques sont présentés sous forme de bloc de cinquante (50) bulletins auto détachables sur des souches numérotées consécutivement. Les numéros des blocs de bulletin envoyés dans une commune doivent être consécutifs, puis répertoriés dans un registre signé et paraphé par tous les membres du bureau de la Commission électorale nationale autonome. Ils sont fournis par la Commission électorale nationale autonome. Le jour du vote, ils sont mis à la disposition des électeurs dans le bureau de vote en nombre au moins égal à celui des électeurs inscrits. Procès-verbal en est dressé.

En violation des dispositions de l’article 64 de la loi 2010-33 portant règles générales pour les élections, des bulletins sont parvenus par d’autres moyens que la CENA aux bureaux de vote. La matérialité des faits peut être vérifiée par le contrôle de toutes les souches de bulletins réguliers à comparer au nombre de bulletins dépouillés en vue de l’élimination de tous les bureaux de vote dont les bulletins dont les numéros de souches sont intrus et non consécutifs conformément aux blocs reçus de la CENA, ainsi que constater en l’absence de répertoire signé et paraphé par tous les membres du Bureau de la Commission électorale nationale autonome pour tout bloc de bulletins. Un nouveau décompte doit être donc réalisé en comptant pour nuls les bulletins des bureaux dont les numéros de souches sont intrus conformément à l’article 80. Par ailleurs, le nombre de bulletins de vote dans les bureaux n’étaient en nombre au moins égal au nombre d’inscrits en violation du présent article de la loi qui peut faire l’objet de vérification sur les quantités mentionnées dans les procès verbaux de réception comparés aux quantités effectivement utilisés dans les bureaux.

3.1.4 Violation de l’article 80 de la loi 2010-33 : Les bulletins nuls ne sont pas considérés comme suffrages exprimés lors du dépouillement. Sont considérés comme bulletins nuls : les bulletins irréguliers ; les bulletins sans choix ; les bulletins portant plusieurs choix ; les bulletins portant une marque ou une inscription pouvant permettre d’identifier l’électeur ; les bulletins entièrement ou partiellement barrés.

En violation de l’article 80 de la loi 2010-33, de nombreux bulletins irréguliers qui ne remplissent pas les conditions de l’article 64 ont été comptés comme suffrages exprimés et d’autres sont en raison de leur falsification parce que pré-estampillés pour un candidat, remis à des électeurs qui, soit,  sont contraints à exprimer un seul vote possible correspondant à celui du candidat pré-estampillé, soit exprimer un vote nul s’ils choisissent un autre candidat. Il doit donc être procédé à une évaluation en présence de tous les candidats ou leurs représentants, les cas d’annulation des votes par double-estampille avec une similitude entre les estampilles, et également juger de la régularité des estampilles sur chaque bulletin en les comparant aux estampilles régulières du bureau de vote, pour connaître de l’issue transparente du scrutin.

3.1.5 Violation de l’article 85 de la loi 2010-33 : … relative à la transmission des plis scellés destinés respectivement à la Cour Constitutionnelle ou à la Cour Suprême et à la Commission électorale nationale autonome auxquels est joint chaque fois un procès-verbal de constatation, …

La transmission des plis scellés dans les délais prescrits par la Loi doit être vérifiée par l’existence de preuves de cette transmission sur la base des dates de signatures des responsables dûment mandatés par la loi à la livraison et à la réception à savoir le président et le rapporteur de la Commission électorale départementale et le coordonnateur départemental de la CENA avec les preuves de réception signées par les destinataires.

3.1.6 Violation de l’article 107 de la loi 2010-33  : Est punie … – toute personne qui … a … réclamé ou obtenu son recensement deux (02) ou plusieurs fois ; – toute personne qui, à l’aide de déclarations fausses ou de faux certificats, s’est fait recenser ou a tenté de se faire inscrire sur une liste électorale ou qui, à l’aide de moyens frauduleux, a fait inscrire ou rayer indûment un citoyen.

De nombreux citoyens ont profité de l’absence d’une liste électorale sécurisée pour voter plusieurs fois ou voter sans être effectivement inscrits. En agissant ainsi, ils ont joui indûment de leur inscription multiple sur la liste erronée. Afin de vérifier cet état de fait, toutes les listes d’émargement doivent être vérifiées pour s’assurer que les personnes y ayant émargé sont réellement présentes dans la base des électeurs de la LEPI, et que leurs noms ne figurent pas plusieurs fois dans les listes d’émargement.

3.1.7 Violation des articles 4, 60 et 61 de la loi 2010-33 : relatifs à … la liste électorale permanente informatisée (LEPI), … liste unique, exhaustive et nationale avec photo de tous les citoyens en âge de voter…

La liste électorale est inexistante jusqu’au jour du scrutin et le vote a eu lieu sur la base d’une liste douteuse, incomplète et non exhaustive en raison de l’exclusion du vote de nombreux citoyens. Par ailleurs, l’inexistence de la liste a permis des votes multiples ou de personnes ne remplissant pas les conditions dans la mesure où les votes par dérogation avec des récépissés se sont réalisés sans des dispositions pouvant efficacement empêcher les votes multiples. Pour en vérifier la preuve, les listes d’émargement peuvent être consultées pour l’ensemble du territoire national et comparées aux données du fichier électoral inachevé de la LEPI, en vue de détecter tous les individus ayant profité des failles du dispositif et ayant donc voté plus du nombre de fois qu’ils devraient le faire. (Pièce n°12)

3.1.8 Violation de l’article 58 de la loi 2010-33 : La liste des centres et bureaux de vote créés et arrêtés par circonscription administrative est portée à la connaissance des candidats, des partis politiques ou alliances de partis politiques et des citoyens par voie d’affichage et autres moyens appropriés quinze (15) jours minimum avant le jour du scrutin.

La liste des centres et bureaux de vote n’a été non seulement pas disponible jusqu’au jour du scrutin et en plus, de nombreux bureaux de vote improvisés ont été des moyens de fraudes massives. Outre le fait que les candidats, les partis politiques ou alliances  n’ont eu droit à aucun affichage ni moyen d’accès à aucune liste de centres et bureaux de vote jusqu’au jour du scrutin et à la date du présent recours contrairement aux dispositions de l’article 58, la matérialité des faits relatifs à la non existence et la qualité de la liste des centres et bureaux de vote frauduleux peut être vérifiée en constatant la non réception par aucun des ayant droit d’une telle liste ainsi que la comparaison entre toute liste de centres et bureaux de vote supposée provenir des organes habiletés et les listes de centres et bureaux de vote dont il a été pris en compte les résultats dans le cadre du scrutin, afin de conclure la validité.

Au regard de toutes ces irrégularités dont la survenue a été massive ainsi que les possibilités existantes d’en vérifier la matérialité des preuves, nous déposons les présentes contestations et faisons la requête que tous les plis soient vérifiés par une expertise sur les estampilles des bulletins de vote, les souches de bulletins de vote, les listes de centres et bureaux de vote, les nombres d’électeurs et la sincérité des résultats. L’expertise demandée devra se faire en présence de tous les candidats ou leurs représentants, et les moyens, efforts et temps pour le faire sont de loin moindres par rapport à ceux nécessaires pour un scrutin qui aurait été réalisé au second tour.

CONCLUSION

Il est de principe général de droit et de jurisprudence que lorsqu’un processus devant conduire à une solution est vicié, le résultat auquel il a abouti est par nature vicié et partant, nul et non avenu.

En conséquence, je sollicite qu’il plaise à la haute juridiction :

–      Au principal, annuler purement et simplement le scrutin du 13 mars 2011.

–      Subsidiairement, personne n’étant autorisé à tirer bénéfice de sa propre turpitude, annuler l’ensemble des voix obtenues attribuées dans des conditions irrégulières au  candidat YAYI  BONI, et en tirer telle conséquence que de droit.

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