Où situer ce qui fait la force d’un peuple ? Dans l’acceptation résignée des coups du sort ou dans la capacité volontariste d’agir sur les événements ? Celui qui se résigne est à l’image de quelqu’un qui se tasse sur lui-même. Il est dans une posture défensive. Par contre, celui qui a choisi de faire face à l’adversité, reste debout. Il regarde devant. Le Bénin, en ce mois de mars 2011, aborde un scrutin présidentiel crucial. Non que l’exercice soit difficile. Mais il est fort singulier. Parce que dominé par deux soucis contradictoires. L’un et l’autre souci mettent en situation deux catégories de citoyens. L’une et l’autre catégorie de citoyens regardent dans des directions opposées.
Il y a, d’une part, le souci de capter le maximum de suffrages et de gagner. On veut accéder au pouvoir sans se poser trop de questions. Il y a, d’autre part, le souci de faire gagner des points à la démocratie, avec la conscience qu’on s’investit dans une lutte de longue haleine. Il faut alors se frayer un chemin à travers des passions débridées, des ambitions déchaînées.
La plupart des politiciens ne pensent qu’à gagner. Ils se montrent peu regardants sur les moyens à mettre en œuvre pour parvenir à leurs fins. Qu’importe, comme qui dirait, que le chat soit noir, jaune ou bleu : pourvu qu’il attrape des souris. Voilà qui explique pourquoi nous n’avons pas de vrais partis politiques, hors d’un ramassis de clients, de courtisans et de sympathisants, sous le charme ou sous la houlette d’un Président-fondateur-bailleur. La cote d’amour de celui-ci auprès de ses acolytes est indexée sur son degré de générosité.
La Constitution, en son article 5, dispose : « Les partis politiques concourent à l’expression du suffrage. » Or, nos partis n’animent rien, n’informent de rien et ne forment personne. Leurs chefs ont juste besoin de gagner. Résultat des courses, un bétail électoral à disposition, pour un juste retour sur investissement. Tant qu’il en sera ainsi, aucune Liste électorale permanente informatisée (Lépi), aussi performante soit-elle, ne pourra rien contre la fraude et les irrégularités dans nos élections.
Dieu merci, cette tendance essentiellement manipulatrice et fondamentalement instrumentaliste reflue et recule depuis que s’ouvre, ici et là, ce qu’il convient bien d’appeler la saison des peuples. Ainsi, si le politicien n’est attaché qu’à l’objet présent de sa conquête, les peuples, de plus en plus, affirment la conscience d’être des sujets d’histoire lancés à la quête de la démocratie.
En fait foi, le réveil inattendu, ces jours derniers, de certains peuples de l’Afrique du Nord. En fait encore foi, la maturité du peuple béninois au premier tour du scrutin présidentiel du 13 mars 2011. Selon un tel schéma, la plupart des politiciens sont des gens du passé, en passe d’être dépassés, ligotés qu’ils sont à leurs vielles habitudes, préoccupés, en définitive, de manger, au présent, leur maïs en herbe. C’est pourquoi ils n’investissent rien. C’est pourquoi ils ne capitalisent rien. C’est pourquoi ils sont à l’image du personnage mythique fon de « Yogbo ». C’est pourquoi cela leur va comme un gant l’expression populaire de « So tcha du tcha ». A traduire à peu près par : « Prends ta part, bouffe et ne te soucie point du lendemain ».
L’investissement pour l’avenir se concentre et se condense sur tout ce qui participe, de près ou de loin, à l’amélioration, au renforcement, à l’enracinement de la démocratie. C’est la raison pour laquelle, les peuples, dans leurs marches de libération, placent la démocratie sous trois instances :
– Sous la direction d’une valeur, la liberté ;
– Sous l’éclairage d’une norme, la loi ;
– Sous le sceau absolu de l’Absolu, c’est- à-dire Dieu.
Oui, à voir tout ce que nous voyons, il devient nécessaire et impérieux d’appeler la crainte de Dieu dans l’arène publique, la crainte de Dieu dans toutes nos élaborations politiques. Que celui qui s’inscrit en faux contre cette idée nous jette la première pierre.
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