CENA: Gnonlonfou autorisé à destituer les démembrements

Encore une décision à polémique de la Cour constitutionnelle. Suite au recours à elle adressé le 26 Avril dernier par le Président de la Céna, recours en dénonciation du blocage des élections législatives du 30 Avril prochain par les démembrements de son institution, au motif de revendication de primes. La Cour en sa décision El 11-006 du 27 Avril donne carte blanche au Président de la Céna de destituer et ceci sans délai tout membre défaillant des démembrements de son institution et de procéder, en cas de nécessité à leur remplacement.

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Décision EL 11-006 du 27 Avril 2011

La Cour Constitutionnelle,

VU la Loi n° 90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin ;

VU la Loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la Loi du 31 mai 2001 ;

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VU le Décret n° 94-012 du 26 janvier 1994 modifié par le Décret n° 97-274 du 09 juin 1997 portant attributions, organisation et fonctionnement du Secrétariat Général de la Cour Constitutionnelle ;

VU le Décret n° 96-34 du 05 février 1996 portant création, organisation et fonctionnement du Greffe de la Cour Constitutionnelle ;

VU le Règlement Intérieur de la Cour Constitutionnelle ;

VU la Loi n° 2009-10 du 13 mai 2009 portant organisation de recensement électoral national approfondi et établissement de la liste électorale permanente informatisée ;

VU la Loi n° 2010-33 du 07 janvier 2011 portant règles générales pour les élections en République du Bénin ;

VU La Loi n° 2010-35 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’Assemblée Nationale ;

VU la Loi n° 2011-03 du 04 mars 2011 portant habilitation spéciale des organes en charge de la réalisation de la liste électorale permanente informatisée et de l’organisation du double scrutin de l’année 2011 ;

VU la Loi n° 2001-21 du 21 février 2001 portant charte des partis politiques ;

VU le Décret n° 2011-132 du 1er avril 2011 portant convocation du corps électoral pour l’élection des membres de l’Assemblée Nationale ; Ensemble les pièces du dossier ;

Oui Maître Robert S. M. DOSSOU en son rapport ; Après en avoir délibéré,

Considérant que par requête du 26 avril 2011 enregistrée à la même date à son Secrétariat Général sous le numéro 1019/012/EL, le Président de la Commission Electorale Nationale Autonome forme devant la Haute Juridiction un recours en dénonciation du « blocage des élections législatives du 30 avril 2011. » ;

CONTENU DU RECOURS

Considérant que le requérant expose : « … Certains présidents des CED ont décidé de bloquer le processus qui doit conduire aux élections législatives de 2011. Il s’agit essentiellement du président CED Atlantique, et aussi ceux du ZOU, du Borgou, de l’Alibori, de l’Ouémé et du Plateau.

Ainsi après avoir formulé des revendications de primes ou autres indemnités, je les ai reçus et leur ai demandé de désigner trois délégués ; ce qu’ils ont fait. Des séances de travail ont été organisées avec les délégués après que la séance plénière de la Commission Electorale Nationale Autonome a examiné toutes leurs exigences. Il a été décidé de leur octroyer même par anticipation tout ce à quoi ils ont droit à savoir carburant en espèces, frais de communication en dehors de leurs primes et rémunérations. Mais en ce qui concerne les doléances que la plénière a eu à étudier à la baisse, je les ai informés qu’elles étaient à l’étude avec le Ministère chargé des Finances. Les intéressés ont semblé accepter et ont d’ailleurs perçu tout ce à quoi ils ont droit. Mais contre toute attente certains ont décidé de bloquer le processus devant conduire aux élections tant que leurs doléances ne seront pas satisfaites alors qu’une évaluation desdites revendications se chiffre à plus de quarante huit milliards (48 000 000 000) de francs CFA.

Ils ont en conséquence pris la résolution :

de fermer les bureaux des CED ;

de ne pas poursuivre la suite des opérations devant conduire à la date du 30 avril 2011 aux élections législatives ;

de refuser de réceptionner les listes électorales et de les afficher ; ce qui aura pour conséquence des votes par dérogation, les électeurs intéressés n’étant pas au courant de leur nouveau bureau de vote ;

de ne pas participer à des séances de formation des formateurs. » ; qu’il développe : « Pour ce  faire, ils ont organisé une conférence de presse à la Maison des Média à Cotonou pour, disent-ils, dénoncer « l’injustice que la CENA fait à leur endroit, cette CENA dont les membres seraient payés à vingt deux millions (22 000 000) de francs CFA à l’issue des élections. L’organisation d’une telle conférence de presse est contraire à notre règlement intérieur.

Ayant posé des actes de nature à entraver le bon fonctionnement de nos institutions républicaines et démocratiques en se livrant à des actes qui conduiront à ce que les législatives ne se déroulent pas à la date du 30 avril 2011, terme que la Haute Juridiction a fixé pour ces élections, les présidents des CED se mettent en travers de la Décision EL 11-001 du 31 mars 2011 de la Cour Constitutionnelle et viole l’article 35 de la Constitution qui dispose : ‘’ les citoyens chargés d’une fonction publique ou élus à une fonction politique ont le devoir de  l’accomplir avec conscience, compétence, probité, dévouement et loyauté dans l’intérêt et le respect du bien commun.’’ » ; qu’il demande en conséquence à la Cour de « bien vouloir sommer les présidents des CED Mono, Couffo, Zou, Plateau, Ouémé, Borgou, Alibori et Atlantique et les démembrements de la CENA de mettre en oeuvre la décision ci-dessus visée ; de décider que les présidents et les membres des démembrements qui résisteraient à la présente décision seront automatiquement et immédiatement remplacés par la CENA ; que ceux qui auraient touché des primes alors que les services n’ont pas été rendus seront mis en débet et qu’ils seront déclarés incapables d’officier dans les CENA à venir.» ;

ANALYSE DU RECOURS

Considérant que les articles 114, 117, 3ème tiret et 124 alinéas 2 et 3 de la Constitution disposent respectivement : « Article 114 : La Cour Constitutionnelle … est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics.;

Article 117, 3ème tiret : La Cour Constitutionnelle… statue, en cas de contestation, sur la régularité des élections législatives. ;

Article 124 alinéas 2 et 3: Les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles. » ; que les articles 12 alinéas 1 et 2, 18 et 24 alinéa 1er de la Loi n° 2010-33 du 07 janvier 2011 portant règles générales pour les élections en République du Bénin énoncent :

Article 12 alinéas 1 et 2: « Les élections sont gérées par un organe administratif dénommé Commission électorale nationale autonome (CENA). La Commission électorale nationale autonome dispose d’une réelle autonomie par rapport aux institutions de la République (Exécutif, Assemblée Nationale, Cour Constitutionnelle, Cour Suprême, Haute Cour de Justice, Conseil Economique et Social, Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication), sous réserve des dispositions des articles 49, 81 alinéa 2 et 117, 1er et 2ème tirets de la Constitution du 11 décembre 1990 et des articles 42, 52 et 54 de la Loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ;

Article 18 : La Commission électorale nationale autonome est représentée dans chaque département par une Commission électorale départementale (CED) …

La Commission électorale départementale officie sous l’autorité et le contrôle de la  Commission électorale nationale autonome. ;

Article 24 alinéa 1er : La Commission électorale nationale autonome est chargée de la préparation, de l’organisation, du déroulement, de la supervision des opérations de vote et de la centralisation des résultats » ;

Considérant que sur requête du Président de la CENA, la Haute Juridiction, par Décision EL 11-001 du 31 mars 2011, a autorisé le report de la date de l’élection des membres de l’Assemblée Nationale à une date qui ne saurait aller au-delà du 30 avril 2011 ; qu’en application de la décision précitée, le Président de la République a, par Décret n° 2011-132 du 1er avril 2011, convoqué le corps électoral pour ladite élection le 30 avril 2011 ; que la date du 30 avril 2011 devient donc une date impérative qui ne saurait être remise en cause sans violer l’article 124 précité de la Constitution ;

Considérant qu’en l’espèce, il ressort des éléments du dossier que les Commissions Electorales Départementales (CED) ont formulé des revendications de primes et autres indemnités ; qu’après avoir examiné en plénière leurs exigences, la CENA a pris des dispositions utiles pour leur donner satisfaction en leur octroyant une dotation en carburant et des frais de communication et est entrée en discussion avec le Ministère des Finances pour les autres doléances ; que malgré ces différentes initiatives, les présidents des Commissions Electorales Départementales (CED) de l’Alibori, de l’Atlantique, du Borgou, de l’Ouémé, du Plateau et du Zou ont tenu une conférence de presse et décidé de ne pas reprendre leurs activités devant permettre la tenue des élections législatives du 30 avril 2011 ;

Considérant que le comportement des présidents des Commissions Electorales Départementales (CED) précités vise en fait à empêcher la tenue des élections législatives le 30 avril 2011 ; que ce comportement viole les prescriptions de l’article 35 de la Constitution aux termes duquel : « Les citoyens chargés d’une fonction publique ou élus à une fonction politique  ont le devoir de l’accomplir avec conscience, compétence, probité, dévouement et loyauté dans l’intérêt et le respect du bien commun. » ; que pour éviter tout blocage, il échet pour la Cour Constitutionnelle, organe régulateur du fonctionnement des institutions, d’ordonner toutes mesures utiles au bon fonctionnement de la CENA et au bon déroulement du processus électoral en cours ; que la CENA, disposant d’une réelle autonomie par rapport aux institutions de la République, (Exécutif, Assemblée Nationale …), est donc autorisée à procéder sans délai à la destitution des membres défaillants de ses différents démembrements (CED, CEC et CEA) et, si nécessaire, à leur remplacement immédiat afin de garantir la tenue effective des élections législatives le 30 avril 2011 ; et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres demandes ;

DECIDE

Article 1er.-: Les présidents des Commissions Electorales Départementales (CED) de l’Alibori, de l’Atlantique, du Borgou, de l’Ouémé, du Plateau et du Zou ont violé l’article 35 de la Constitution.

Article 2.- Le Président de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) est autorisé à destituer sans délai tout membre défaillant des démembrements de la CENA (CED, CEC et  CEA) et à procéder, en cas de nécessité, à leur remplacement.

Article 3.- La présente décision sera notifiée à Monsieur le Président de la Commission Electorale Nationale Autonome, à tous les Présidents des Commissions électorales départementales, à Monsieur le Président de la République, à Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, à Monsieur le Président du Cadre de Concertation de la Société Civile et publiée au Journal Officiel.

Ont siégé à Cotonou, le vingt sept avril deux mille onze,

Monsieur Robert S.M. DOSSOU Président

Madame Marcelline-C GBEHA AFOUDA Vice-Présidente

Messieurs Bernard D. DEGBOE Membre

Théodore HOLO Membre

Jacob ZINSOUNON Membre

Le Rapporteur, Le Président,

Maître Robert S. M. DOSSOU Maître Robert S. M. DOSSOU.-

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