Décision N°11-020/HAAC: la Haac manie sa hache

Bénin – Après les restrictions  décrétées sur les libertés publiques par le gouvernement, l’instance de régulation de l’information (Haac)  met le couperet sur la liberté de presse. Non satisfaite  de n’avoir rien fait contre les auteurs de la brouille des ondes de Rfi, avant-hier, elle en rajoute de plus grave et s’attaque à la libre diffusion de l’information. Ceux qui dénoncent la mise en œuvre d’un plan pour liquider la démocratie n’ont vraiment pas tort. Tout semble être fait pour que nous atteignions cette extrémité. Palier par palier, le gouvernement gravit les étapes dans cette volonté. Après la privation des libertés publiques avec la répression systématique de toutes les marches et meetings de protestation, le gouvernement, par le truchement de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (Haac) vient de prendre une décision inique. Cette décision, comme beaucoup l’ont vu, décrète une restriction de la liberté de presse. On y interdit simplement «la diffusion ou la publication d’information de nature à troubler l’ordre public et la paix sociale, à inciter à la désobéissance aux organes publics constitués, à mettre en péril la cohésion nationale ou à ternir l’image de la république». Une mise en garde ferme est formulée à l’endroit des journalistes qui se rendraient coupables en tant qu’auteurs ou complices de la violation de cette décision. La même mise en garde est adressée aux partis politiques ou tout autre groupe constitué menacés d’interdiction d’accès aux médias. On comprend que la Haac a versé dans l’excès et manie ainsi dangereusement et avec une maladresse inouïe, la cognée qu’on lui a confiée pour protéger les journalistes.

D’abord, il s’agit là d’une violation pure et simple de la Constitution, en ses articles 8 et 142 qui régissent la liberté de presse. Violation plate à laquelle les «considérants» de la décision n’enlèvent pas la substance. La Constitution stipule clairement que la liberté de presse est reconnue au Bénin et que c’est la Haac qui la régule. Réguler et non réprimer. Mais à la place de la régulation, la Haac a  choisi, depuis peu, la répression. Pourquoi apporter des restrictions à la loi alors que le code d’éthique et de déontologie de la presse a déjà précisé les sujets et les périodes où celles-ci sont nécessaires. On note une volonté de faire plaisir à un pouvoir. L’essence de l’article 1er de cette décision ne trompe personne. On y lit en filigrane une volonté de museler complètement l’opposition dont la coalition ABT et surtout Me Adrien Houngbédji qui rejette la décision de la Cour constitutionnelle proclamant Boni Yayi vainqueur au premier tour. En contestant ainsi ces résultats et surtout en demandant au peuple de résister, Houngbédji passe pour un subversif à leurs yeux. Et pourtant, il suffit de lire cette déclaration pour comprendre qu’il demande de lutter pour empêcher l’avènement de la dictature au Bénin. Quoi de plus légitime. Et d’ailleurs, si l’intention de son auteur est l’incitation du peuple à la révolte, a-t-il besoin de passer à la télévision pour le dire ou le mettre en application? Un simple coup de fil ou une petite rencontre avec quelques partisans peut déjà susciter une insurrection. Enfin, les partis politiques ou les coalitions sont menacés d’interdiction d’accès aux médias s’ils sont auteurs de la violation de cette décision. Ridicule, la Haac décide comme si elle n’est pas au Bénin. L’accès aux médias de service public était depuis si longtemps mal aisé pour les partis politiques de l’opposition. L’ambition de la Haac serait-elle désormais de l’étendre aux médias du privé? Non, la Haac se trompe de combat. Les accointances politiques ne doivent pas obscurcir nos jugements. Vivement le discernement!

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