Front social : la patrie contre la grève

Le Benin peut bel et bien trouver sa tombe sur le front social. Ce qui s’y passe est grave. C’est de nature à conditionner notre présent. C’est de nature à déterminer notre avenir. Le gouvernement a raison de paniquer face à la montée des périls. Un cataclysme est à nos portes. Toute cessation de paiement aurait des conséquences incalculables. Les syndicats des travailleurs ont raison de réclamer leurs droits, dès lors qu’ils ont su s’engouffrer astucieusement dans la brèche ouverte par le gouvernement lui-même. Le risque n’a-t-il pas été pris d’avoir, dans l’administration publique, deux poids, deux mesures ? En témoigne la discrimination positive en faveur des fonctionnaires du ministère des Finances. La Cour constitutionnelle a raison de rejeter la décision du gouvernement d’accorder une hausse des taux indiciaires salariaux aux agents du ministère des Finances. C’est la seule manière de remettre les pendules à l’heure et les compteurs à zéro. Sachant qu’en le faisant, on enjambe le principe des droits acquis cher aux syndicats.

Si finalement tout le monde avait raison dans cette histoire aux allures d’une tragédie grecque, quelle raison avons-nous   de soutenir que le Bénin pourrait trouver sa tombe sur le front social ?  Quand on affirme, et nous n’avons aucune raison d’en douter, qu’environ 75% des recettes propres du Bénin vont à 1% de la population, rien qu’au titre des dépenses de fonctionnement et des salaires, on tient et on avance- là une donnée  massive. Elle a valeur d’une grave interpellation.

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Personne ne peut fermer les yeux sur ces chiffres. Personne ne peut balayer ces chiffres du revers de la main. Personne ne peut faire la sourde oreille, jetant par-dessus les moulins l’intérêt supérieur de notre pays. Personne ne peut se permettre de botter ses responsabilités en touche, pour rester tassé sur la position extrême du « se soumettre ou se démettre ». Personne ne peut se prévaloir des recettes du droit pour passer par pertes et profits les exigences du devoir.

Il était une fois un grand  trou, un trou immense à l’appétit vorace. Tous ceux qui s’approchent imprudemment de ce trou prennent un risque mortel. Un faux pas. Une glissade. Le pire est vite arrivé. C’est dans la nature des hommes de tenter le diable. Mais un individu qui décide de se suicider n’a pas besoin que de se faire accompagner. Le suicide n’est pas un pain qui se partage.

Ce décor de conte, pour nous ramener à nos préoccupations premières. Le danger commun pour nous, aujourd’hui, gouvernement, syndicats, population et Cour constitutionnelle comprise, c’est ce trou-tombe qui devrait nous empêcher de dormir du sommeil du juste. Face au danger, le gouvernement n’a pas besoin d’un parapluie, d’un  parachute juridique. Il a plutôt besoin de privilégier l’exercice patient de l’explication pédagogique pour convaincre les Béninois. L’heure est plus gave que nous ne le pensons. Le   salut du pays se joue maintenant. C’est une question de vie ou de mort. Les syndicalistes doivent admettre, pour le salut du pays, l’arithmétique de «  un peu moins pour chacun, pour un peu pour tous », plutôt que l’arithmétique de « tout pour quelques uns et rien pour tous », y compris pour les syndicalistes eux-mêmes ». A l’affiche de nos engagements  patriotiques, trois tâches.

Premièrement. Nous devons nous préoccuper de fermer le trou-tombe qui nous menace tous ou nous devons l’isoler pour qu’il ne soit plus un danger pour chacun et  tous. Faisons-le ensemble.

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Deuxièmement. Nous devons prendre de bonnes résolutions pour définir des modalités de coopération plus étroite, les maîtres mots restant : franchise, confiance réciproque, transparence, amour du pays. Réussissons-le ensemble.

Troisièmement.  Nous devons mettre en place, d’accord parties, des structures consensuelles pour un dialogue ouvert et permanent. Face aux intérêts supérieurs de la nation qui a intérêt à jouer au chat et à la souris ? Et qui veut donner raison à l’auteur de cette définition : «Le Bénin est un pays où les travailleurs font semblant de travailler, face à un gouvernement qui fait semblant de les payer»?

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