Recours suspect d’un gouvernement toujours dans l’œil du cyclone

Le décret 2011-335 du 29 avril, pomme de discorde entre le gouvernement et les autres travailleurs de l’administration publique, avait mis le gouvernement dans une position insoutenable. Le marteau des institutions de Bretton Woods (la Banque mondiale et le FMI) et l’enclume des travailleurs, paralysaient l’administration publique pour protester contre la disparité salariale instituée, par ce décret entre les Agents de l’Etat.

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Et contre toute attente, vint une décision de la Cour constitutionnelle qui déclare contraire à la Constitution ce décret, suite à un recours d’une certaine Ingrid Houessou. Ce recours opportuniste, qui vient à point nommé offrir une porte de sortie au gouvernement, paraît suspect à plusieurs points de vue. Comme par hasard, c’est au moment précis où le mouvement de débrayage lancé par la Coalition des syndicats nationaux de l’administration  publique (Cosynap) rencontre un succès, malgré les menaces du chef de l’Etat que surgit dame Ingrid Houessou. Comme de nulle part. Il faut dire que ce mouvement de grève aura de graves impacts sur les ressources de l’Etat en le mettrait en difficulté face à ses engagements nationaux et internationaux. Pourquoi la Cour ne s’était pas autosaisie de cette fragrante violation de la Constitution et des lois qu’avait engendrées le décret 2011-335. Qui est Ingrid Houessou, se demande-t-on. Rappelons que la grève a été déclenchée le 15 juin et que le recours est déposé le 16 juin. Alors, Ingrid Houessou est-elle un fonctionnaire de l’Etat? Ceci n’est évident pas car elle n’aurait pas attendu la grève pour saisir la Cour. L’hypothèse la plus plausible est bien le fait qu’il s’agit, tout simplement d’un montage grossier du pouvoir pour se tirer d’affaire. La menace proférée le 14 juin par Boni Yayi, n’ayant pas eu d’effet le 15, le gouvernement a mis en œuvre son plan B, le jour suivant. Convaincu que la Cour donnerait un avis favorable à ce recours parce que acquise à sa cause. Il suffit de lire la réponse du gouvernement à la mesure d’instruction de la Haute Juridiction pour s’en  convaincre. En effet, dans sa réponse à la Cour constitutionnelle, le gouvernement n’a pas défendu sa décision du Conseil des ministres encore moins ce décret, et avoue avoir déjà violé ses engagements internationaux en dépassant largement le seuil des 35% en 2009 et en 2010. De ce point de vu, on peut dire que la violation des engagements internationaux évoquée par la Cour n’est pas valable. Car, malgré l’annulation de ce décret le Bénin ne se serait toujours pas conformé aux normes des institutions de Bretton Wood notamment avec le Fmi qui a fixé un cadre des dépenses salariales compris entre 25 et 35% des recettes totales inscrites au budget général de l’Etat. En prenant le décret 2011-335 du 29 avril 2011 portant institution d’un coefficient de revalorisation des traitements indiciaires des agents de l’Etat du ministère des Finances, le gouvernement a donc pris la mesure des choses. C’est pourquoi le président Boni Yayi dans son discours du 14 juin a voulu rassurer les travailleurs au regard de la décision qui va s’étendre à petit coup au niveau de tous les autres travailleurs. Selon ses dires, c’est ce qui aurait était convenu entre le gouvernement et les centrales syndicales. Mais pourquoi dans sa réponse à la Cour, cette assurance a laissé place à son plaidoyer d’enfant agonisant?

Le bout du tunnel est encore loin

Malgré l’irruption de cette dame Ingrid et l’injonction de la Cour dans ce bras de fer entre gouvernement et travailleurs, la fin n’est pas pour demain. Quoi qu’en soit le faux jeu du gouvernement et la complicité mal voilée de la Cour, les travailleurs qui ne sont pas dupes, ne sont pas prêts à démordre. Et le mouvement promet d’ores et déjà de s’endurcir. D’une part, les agents du ministère des finances ne voudraient renoncer sous aucun prétexte à leurs droits acquis. Le secrétaire général de la Fédération des syndicats des travailleurs de ce ministère s’est d’ailleurs montré menaçant sur cette décision de la Cour. D’autre part, la Cosynap n’a pas non plus levé sa motion de grève et n’entend pas le faire de si tôt, même si pour ces responsables, la décision de la Cour montre la justesse de leur mouvement. Le gouvernement a donc du pain sur la planche et est contraint de reprendre les négociations. Ce qui s’annonce très rude, alors même que l’administration publique reste paralysée.

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