La refondation par notre rétroviseur

Il y a exactement un an, jour pour jour, nous diffusions une chronique sous le titre : «Refondation : pourquoi et pour quoi faire?» Un nouveau concept vient d’être lancé par le Chef de l’Etat. Voici ce que nous disions dans cette chronique en date du 8 juillet 2010.

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La refondation de la République. Voilà le nouveau dada qui risque d’occuper le plus clair du temps des Béninois dans les jours à venir. En visite dans quelques localités du pays, le Chef de l’Etat a lâché la bombe. Il promet d’expliciter sa pensée et d’aller plus loin dans les tout prochains jours. C’est suffisant pour mettre le pays en émoi, dans une attente fébrile.

Parce que la refondation, s’agissant d’un pays, est un concept fort. Elle n’appelle pas moins de repartir avec de nouveaux principes ou de reconstruire sur de nouvelles bases. Elle n’exclut donc pas un bouleversement de l’architecture institutionnelle actuelle, la révision intégrale de nos fondamentaux en matière de démocratie et de gouvernance.

Est-ce à une Conférence nationale bis que le Chef de l’Etat nous convie ? Qu’est-ce qui peut justifier de sa part une telle audace réformatrice à quelques mois de la fin de son quinquennat à la tête de l’Etat ? Le concept du changement sur lequel il a su mobiliser ses compatriotes, il y a quatre ans, va-t-il être abandonné, restauré ou approfondi ?

Pour l’heure, les Béninois se perdent en conjectures, anticipant sur ce qui pourrait bien être cette « refondation » promise. Dans tous les cas et en ce qui nous concerne, si refondation il devait y avoir, nous souhaiterions qu’elle prenne en compte au moins quatre piliers fondamentaux déjà bien présents dans le scénario Alafia Bénin 2025. Nous avons nommé : mentalité, identité, subsidiarité, moralité.

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Par mentalité, nous invitons à reconnaître que ce qui est premier, c’est l’esprit. La première chose à refonder, c’est la tête de chaque Béninois. Parce que la prospérité tout comme la pauvreté des Béninois se trouvent dans leurs têtes. (…) Les termes de l’équation sont simples. Les Béninois veulent-ils grandir, pousser sur leurs propres racines ou veulent-ils végéter, pourrir sur pieds, se laisser glisser dans le trou sans fond de la misère, de la pauvreté ? Une refondation qui ne prendrait pas la forme d’un shampoing mental risque de tourner à une opération cosmétique : ni durable, ni profitable. Un coup de pub pour rien.

Par identité, il faut comprendre que les Béninois, au terme d’un demi-siècle d’indépendance, ne savent pas vraiment qui ils sont, se connaissent à peine les uns les autres. (…) Ils vivent par procuration. Ils sont sous perfusion. Ils pensent avec la tête d’autrui. Ils consomment ce qu’ils ne produisent pas. Ils n’ont pas confiance en eux-mêmes. Ils continuent de croire que le salut, c’est là-bas avec l’argent des autres, plutôt qu’ici grâce à leurs propres forces de conception, d’imagination, de création et de production. La refondation, dans le cas d’espèce consistera, pour chaque Béninois, à prendre possession de son esprit pour penser par lui-même et pour lui-même. (…)

Par subsidiarité, nous faisons allusion à la décentralisation. Celle que nous expérimentons en ce moment est largement bureaucratique. C’est davantage un processus administratif imposé qu’un vécu naturellement endossé. Le pouvoir doit revenir à la base. C’est là où se trouve son siège social naturel. C’est là qu’il libère la participation créatrice des populations, plus que jamais dans la proximité de ce qui les concerne, de ce qui les touche.(…)

Par moralité, d’un mot et pour faire court, nous désignons les valeurs, notamment les valeurs morales et éthiques. Car, au-delà de la loi des hommes, il y a les lois de la nature. Il s’agit de normes auxquelles nous devons nous conformer. Il s’agit de nos repères existentiels pour que la vie en société ne soit pas une jungle, le bal masqué des nantis et des déshérités. « Gbê do su » disent les Fons du Bénin. C’est notre première richesse. Et la richesse, la vraie, disent les Rwandais, c’est celle qui donne la beauté aux laids, des pieds aux boiteux, des yeux aux aveugles, de l’intérêt aux larmes. Monsieur le Président, si la refondation c’est cela, alors en avant toute ! Voilà ce que nous disions le 8 juillet 2010. Que faut-il ajouter ? Que faut-il retrancher? Rien!

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