Sept Dg au Port Autonome de Cotonou depuis 2006: quand l’instabilité tue la compétitivité

Dans les jours prochains, un nouveau Dg, le septième depuis 2006, va prendre service à la tête du Port autonome de Cotonou. Au-delà de la satisfaction donnée à ses alliés, cette nomination pose le problème de la précarité du poste et met le port dans une instabilité préjudiciable à son rayonnement et à son développement. Surtout dans un contexte sous régional où la compétition est rude entre les différents ports.

Comme Sisyphe, le Port autonome de Cotonou semble être condamné à l’éternel recommencement de ses œuvres. Un Dg vient, fait quelques mois, se fait limoger -souvent sans raison- et part dans l’amertume. Son remplaçant prend, tout souriant, service, savoure pendant quelque mois les délices et le confort de Dg avant qu’un limogeage ne vienne mettre fin à ses rêves. Le rituel est connu désormais. Depuis 2006, Joseph Tchaffa, Christophe Aguessy (venu tout frais de la Boad comme Yayi), Jérôme Dandjinou, Cyriaque Atti- Mama, et Albert Houngbo ont ainsi fait l’amère expérience. Sans oublier les intérims de quelques jours assurés souvent par le Dga Lazare Gnonlonfin. Eux tous, sauf hypocrisie, en ont gardé un mauvais souvenir. Un monsieur comme Dandjinou, venu au poste pour la deuxième fois sous Yayi et limogé dans des conditions affreuses, en est psychologiquement atteint jusqu’à ce jour, selon ses proches. Hélas, le cycle continue et pourra permettre à Joseph Ahanhanzo de faire son expérience. Peut- être, n’aura-t-il jamais, comme ses prédécesseurs, la chance de faire ses preuves. Dans ce flux et reflux contrastant de joie et d’amertume, le port gagne-t-il en quelque chose? Pas si sûr. La plupart des Dg limogés, dans leurs discours de passation de service ont souvent révélé que c’est au moment où ils commencent à prendre leurs marques que le limogeage est venu mettre fin à leurs ambitions. Chose pourtant compréhensible au regard des rouages, de la lourdeur et des cachoteries propres de l’administration béninoise. Ce qui aggrave la sentence, c’est que pour la plupart, ces différents Dg ne sont pas spécialistes des affaires portuaires. Christophe Aguessy est un financier, Jérôme Dandjinou est l’ancien Dg de l’Asecna donc avec un hobby pour les transports aériens. Cyriaque Atti Mama est sociologue. Albert Houngbo est administrateur des impôts. Joseph Ahanhanzo est un gestionnaire et spécialiste de la planification. Un autre détail important, Cyriaque Atti Mama, Albert Houngbo Joseph Ahanhanzo, tous militants actifs des Fcbe ont plus bénéficié d’une récompense politique que d’une promotion technique. Résultat des courses, le port semble mal se porter. Le dernier conseil des ministres en donnent l’illustration. Plusieurs scandales ont été révélés au port. «En effet, suite aux informations persistantes qui lui sont parvenues courant le mois de mars 2010, au sujet du caractère non transparent des conditions dans lesquelles a été passé et s’exécuté le marché de confection des cartes d’accès sécurisées et de mise en place de dispositifs de contrôle automatique des accès piétons et véhicules au Port Autonome de Cotonou (PAC), notamment des cas de détournements de fonds au sein de cette structure, le Président de la République a dépêché la Commission d’enquête suscitée dans cette entreprise d’Etat pour vérifier le bien fondé desdites informations», précise le communiqué du conseil des ministres. Plus loin, on peut lire que des sanctions disciplinaires seront prises à l’encontre de MM. Cyriaque Atti Mama et Jérôme Dandjinou, Dg à l’époque des malversations et du président du conseil d’administration, Armand Zinzindohoué. De ce conseil des ministres, on comprend que le port souffre de plusieurs maux: dysfonctionnement du conseil d’administration, opacité dans la gestion et la passation des marchés. Avec le temps, on put comprendre que le changement fréquent de directeur n’a rien apporté à la société. Et le Chef de l’Etat devrait lui-même se reprocher quelque chose.

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Mauvais élève de la sous-région

A l’analyse, on se demande si le port autonome de Cotonou dispose d’un plan prospectif de développement ou si le gouvernement est dans l’option de faire du port une référence dans la sous-region? Tout le monde sait qu’aucun développement ne peut marcher dans cette instabilité dans la gestion de cette structure. La preuve, au port d’Abidjan, un des plus grands de la sous région, c’est le même Dg Marcel Gossio qui est resté pendant plus de dix ans. Pendant que nous gérons les choses avec légèreté, les autres se prennent au sérieux. Conséquence: le lot des clients du port se réduisent chaque jour comme une peau de chagrin. Il a fallu toute une offensive diplomatique pour faire revenir les Nigériens. Le Burkina vient de faire construire un terminal à conteneurs au port de Lomé. Plusieurs transitaires et consignataires sont allés s’installer à Lomé ou à Accra où plusieurs des armateurs ont décidé d’accoster. Alors qu’on parle de guichet unique, d’informatisation des procédures au cordon douanier et de l’arrivée des grandes firmes comme Bolloré et Grimaldi, on se complait dans la mauvaise gestion. Et si on n’y prend garde, Areva pourrait demander que l’uranium du Niger passe par Lomé. Les investissements colossaux de Mca Bénin pourraient s’avérer comme un échec. Et «le poumon de l’économie» tant vanté ne pourrait devenir qu’un «scandale national».

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