Une Fondation pour célébrer l’excellence

Tenons-le pour un scoop : la création prochaine d’une Fondation consacrée aux meilleurs fils et filles du Bénin. C’est Mme Koubourath Osséni, Grande Chancelière de l’Ordre national, qui l’a annoncée. Ce fut le vendredi 12 août 2011, lors de la cérémonie d’hommage et de décoration du professeur Jean Pliya élevé au grade de grand Officier de l’ordre national.

Pourquoi une telle Fondation ? Certainement pour célébrer le mérite. Sûrement pour honorer la mémoire. La Fondation, de ce point de vue, inscrira dans son livre d’or aussi bien des vivants que des morts. Le lien entre les premiers et les seconds, c’est la valeur d’exemple, étant entendu toutefois que les vivants finiront par rejoindre les morts.

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De toutes les créatures sur terre, c’est seulement chez l’être humain que la référence à hier, que le souvenir de ce qui fut participe d’une préoccupation vitale. Du reste, les Béninois, à travers leurs diverses cultures, honorent leurs morts, vivent avec et dans leur souvenir. Il n’a manqué jusqu’ici qu’une expression officielle, publique et organisée pour mieux situer la mémoire et le souvenir des meilleurs d’entre nous.

C’est dans ce contexte que l’idée d’une Fondation consacrée aux personnalités les plus représentatives de notre pays est de nature à combler un vide. Elle prend, en même temps, valeur d’une réparation. Notre histoire nationale a souvent bégayé, omission, amnésie, ignorance, approximation y faisant bon ménage. Comme si le souci d’assurer le pain d’aujourd’hui prenait le pas sur la nécessité de faire d’hier notre boussole dans notre marche vers demain.

La mémoire de tout un peuple est en souffrance quand rien ne rappelle, par exemple, à la jeune génération de nos compatriotes, qui fut Louis Hounkanrin. Nous avons fortuitement découvert la tombe de ce dernier à l’ancien cimetière de Porto-Novo. Une tombe quasi anonyme dans la ville qui, pour être celle de naissance du grand homme, ne semble pas moins l’avoir oublié. Par une terrible ironie de l’histoire, le tout-venant dans cette ville est accueilli sur une place baptisée du nom d’un étranger, Jean Bayol. Quand finirons-nous d’immortaliser les autres, alors que nous continuons d’enterrer, chaque jour, les nôtres, nos héros nationaux, sous plusieurs couches d’oubli et de mépris ?

Dans un pays comme le Bénin qui a bénéficié de bonne heure, de l’action incisive et décisive d’une presse pionnière, la Maison des médias, par exemple, devrait accueillir tout visiteur par une véritable galerie de portraits des tout premiers animateurs de cette presse. Qui contera aux nombreux héritiers de ces combattants de l’aube la force de conviction d’un Louis Hounkanrin, le courage exemplaire d’un Paul Hazoumè, la détermination enthousiaste d’un Dorothée Lima, le nationalisme sourcilleux d’un Augustin Nicoué, des frères Zinsou Bodé, d’un Santos ou d’un Lawson ?

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Et c’est parce que rien ne nous aide à prendre la juste mesure de la personnalité d’un Alexandre Adandé que nous assistons, indifférents et impuissants, à la mort programmée du musée ethnographique de Porto-Novo, auquel, pourtant, nous avons voulu attacher son nom. Il eut mieux valu encore confier l’illustre muséologue et homme politique à l’oubli plutôt que de se faire complice de sa seconde mort, sous prétexte de l’immortaliser.

Ne préjugeons pas ce que proposera la Fondation projetée. Prenons le risque, cependant, d’affirmer que celle-ci ne fera œuvre utile et ne donnera un contenu pertinent et convaincant à son action qu’en couvrant tous les aspects d’hommage, de célébration et d’illustration des meilleurs d’entre nous. Au fait, que font les autres ?

Ils distinguent dans divers ordres nationaux les plus méritants. Ils baptisent les rues et artères, les places et édifices, les promotions d’élèves et d’étudiants… des noms de ceux qui méritent d’être immortalisés. La France fait entrer ses meilleurs fils et filles au panthéon, ce monument consacré à la mémoire de ses héros. Il y a aussi le musée Grévin. On y expose les statues en cire, grandeur nature, de ceux qui, vivants ou morts, sont rappelés à la conscience des leurs. Que dire de plus ? Que la Fondation naisse. Que le Bénin renaisse à travers les meilleurs de ses fils et filles.

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