L’Assemblée nationale béninoise a adopté dans la matinée de ce lundi matin le projet de loi contre la corruption et les infractions connexes en République du Bénin. Une grande étape vient d’être franchie dans la traque contre la corruption, mais pour nombre d’observateurs la grosse partie du travail réside dans la mise en œuvre de la loi.
La bataille est gagnée, mais la guerre vient seulement de commencer. Le défi de la dotation du Bénin en une loi contre la corruption est relevé, mais tout reste encore à faire sur ce terrain. En attendant les décrets de promulgation et de mise en application de la désormais nouvelle loi de lutte contre la corruption et les infractions connexes en République du Bénin adoptée par les députés hier, nombres d’observateurs de la vie socio-politico-économique du Bénin sont partagés optimisme et circonspection. Le gouvernement de la Refondation et les députés de la 6ème législature sont à congratuler pour cet acquis. Mais l’évidence est que le vote de la loi donne naissance à une kyrielle de défis que Boni Yayi et le gouvernement de la Refondation doivent s’atteler à relever avant de déclarer l’Etat béninois désormais apte pour la lutte contre la corruption. Pourtant, le système socio-politico-économique béninois a ces réalités qui nourrissent le scepticisme des uns et des autres, à moins que la «Refondation» ne réussisse à les dompter.
Le premier défi d’après loi que le gouvernement devra relever est la résolution du problème de lenteur des procédures judiciaires. Un fait qui, selon les acteurs du domaine, est inhérent au manque de ressources humaines. Et cette situation pourrait constituer un obstacle d’autant plus que l’Autorité ne va pas se substituer à la justice. Une autre question est la possibilité pour le gouvernement de faire jouer le jeu en faveur de ses «protégés». Il est vrai que d’aucuns évoqueront l’indépendance de la justice dans le système démocratique. Mais la réalité à coté de cet idéal est la connivence agissante entre l’Exécutif et le Judiciaire dans nos démocraties africaines.
L’on constate de plus en plus que la hargne qu’avait affichée Boni Yayi contre la corruption au début de l’ère du changement semble refaire surface. Mais la réalité est que nombre de politiciens qui se sont vus coller l’étiquette de «détourneurs de deniers publics» par l’opinion publique béninoise, et qui ont été épinglés par des audits commandés par le Chef de l’Etat composent actuellement avec lui et son régime.
Un aspect de la question réside dans le choix même des membres de la toute prochaine Autorité de lutte contre la corruption. Selon les informations glanées à l’hémicycle de Porto-Novo, l’un des critères de choix pour être membre de l’Autorité est de n’avoir jamais été ni corrupteur, ni corrompu. A ce niveau, ce n’est pas que le Bénin ne dispose pas de cadres de cet acabit. Mais l’on se demande comment pourra-t-on évaluer critère en eux.
L’éradication de la lutte contre la corruption implique une modification du système, du comportement et pour tout dire, faire changer les mentalités. Au-delà de l’existence d’un cadre juridique, il faut des mesures d’accompagnement hardies. Comme l’a si bien dit le Président de l’Assemblée nationale, Mathurin Coffi Nago: «Il faut une application courageuse de la loi, mais aussi des mécanismes de prévention de la corruption». Et c’est là, l’autre bataille. Sans doute la plus épique à mener, en République du Bénin, dans cette guerre contre la plus vieille gangrène née de la civilisation de l’argent.
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