DECISION DCC 11-067 de la Cour Constitutionnelle : l’article 6 de la loi référendaire jugé non conforme à la constitution

Saisie par le président de la République  pour contrôler la conformité à la constitution la Loi organique n°2011-27 portant conditions de recours au référendum,  votée  par  l’Assemblée  Nationale  le  30  septembre 2011 la Cour constitutionnelle a rendu son verdict à travers la  DECISION DCC 11-067 DU 20 OCTOBRE 2011. Il en ressort qu’à l’exception de l’article 6, toutes les autres dispositions de la loi organique portant condition de recours au référendum sont conformes à la constitution. Par contre,  les articles 21 alinéa 2, 23 alinéa 2, 24  et 32  sont aussi conformes mais sous réserve d’observations. Lisez, à la suite, l’intégralité de la décision de la haute juridiction. La Cour Constitutionnelle,

Saisie  d’une  requête  du  11  octobre  2011  enregistrée  à  son Secrétariat à la même date sous le numéro 033-C/131/REC, par  laquelle Monsieur le Président de la République, sur le fondement des  articles  117  et  121  de  la  Constitution,  défère  à  la  Haute Juridiction, pour  contrôle de  conformité à la Constitution la Loi organique n°2011-27 portant conditions de recours au référendum,  votée  par  l’Assemblée  Nationale  le  30  septembre 2011 ;

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VU la Constitution du 11 décembre 1990 ;

VU la Loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique   sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la Loi du 31   mai 2001 ;

VU le Règlement Intérieur de la Cour Constitutionnelle ;

Ensemble les pièces du dossier ;

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Ouï le Professeur Théodore HOLO en son rapport ;

Après en avoir délibéré,

 

INSTRUCTION

DU RECOURS

Considérant que la  loi  déférée  à  l’examen  de  la  Haute  Juridiction est une loi organique dont les conditions de vote sont  réglementées par l’article 97 de la Constitution ; que selon l’article 97  de  la  Constitution  :  « …  la  proposition  ou  le  projet  de  loi  organique n’est soumis à  la délibération et au vote de  l’Assemblée Nationale  qu’après  l’expiration  d’un  délai  de  quinze  (15)  jours après son dépôt sur le bureau de l’Assemblée. Le texte ne peut être adopté  qu’à  la  majorité  absolue  des  députés  composant l’Assemblée… » ;

 

Considérant  qu’il résulte de la réponse à la mesure d’instruction  de  la Cour que  la proposition de  loi a été déposée au Secrétariat  Particulier du Président de l’Assemblée Nationale le 23 août 2011 et a été adoptée le 30 septembre 2011 ; qu’entre ces deux dates, il s’est écoulé plus de quinze (15) jours ; que par ailleurs, ladite loi a été votée par cinquante neuf  (59) voix pour sur  les quatre vingt-trois (83) composant l’Assemblée Nationale ; qu’il s’ensuit que les conditions  exigées  par  l’article  97  de  la  Constitution  pour l’adoption d’une loi organique sont respectées ;

 

EXAMEN DE LA LOI

Considérant que  l’examen  de  la  loi  ci-dessus  citée  fait  apparaître  que  certaines  de  ses  dispositions  sont  conformes  à  la Constitution  sous  réserve  d’observations,  qu’une  autre  est contraire  à  la  Constitution  et  que  toutes  les  autres  sont conformes à la Constitution ;

 

En ce qui concerne les dispositions conformes à la Constitution sous réserve d’observations

 

Considérant   qu’il ressort de  l’examen de  la  loi que certaines de ses  dispositions  sont  conformes  à  la  Constitution  sous  réserve d’observations ;

 

Article  21  alinéa  2 : en  ce  que  le  décompte  des  voix  tel  que  prescrit ne  garantit pas  la  transparence  et  la  vérité du  scrutin ;  qu’en effet, cette disposition indique que lors du dépouillement, le président du bureau de vote prend chaque bulletin, le donne à un assesseur qui  le  lit à haute voix et  le classe selon  les catégories, mais  elle  ne  précise  pas  qu’il  doit  montrer  chaque  bulletin  au public avant de  le remettre à  l’assesseur qui  le  lit à haute voix ; qu’il  s’agit  de  bulletin  unique  comportant  deux  couleurs différentes  imprimées  en  caractères  identiques ;  qu’afin  d’éviter toute  éventuelle  contestation,  le  législateur  devrait  exiger  que chaque  bulletin  soit  montré  au  public  avant  la  lecture  de  la  mention  « OUI »  ou  « NON »  par  l’assesseur  et  le  classement  dudit bulletin ;  qu’ainsi,  la  troisième  phrase  de  l’alinéa  2  serait reformulée comme suit : « … Il prend chaque bulletin, le donne à un  assesseur  qui  le montre  au  public,  le  lit  à  haute  voix  et  le classe selon les catégories suivantes … » ;

 

Article  23 alinéa  2 : en  ce  qu’il  ne  prévoit  pas  les  éventuelles réclamations des  électeurs  comme mentions à porter au procès verbal ;  qu’il  y  a  lieu  d’insérer  par  souci  de  transparence  un cinquième tiret formulé comme suit :

– les réclamations des électeurs s’il y en a ;

 

Article  24.- en  ce  qu’il  ne  précise  pas  que  la  Cour  Constitutionnelle  conformément  aux  articles  4  et  117  de  la  Constitution veille et statue sur la régularité du référendum ; qu’il y a donc lieu de reformuler cet article comme suit :

« La Cour Constitutionnelle veille et statue sur  la  régularité  du référendum.

Elle  désigne  des  délégués  chargés  de  suivre  les  opérations.

Le contentieux du référendum est de la compétence de la  Cour Constitutionnelle » ;

 

Article  32 : en  ce  qu’il  est  superfétatoire  de  rappeler  une  telle disposition  dans  la  présente  loi,  la  loi  organique  sur  la  Cour Constitutionnelle ayant déjà confié à  la Haute Juridiction  le soin  de  veiller  et  de  statuer  sur  la  régularité  du  référendum ;  qu’en conséquence, il y a lieu de supprimer cet article ;

En ce qui concerne la disposition contraire à la Constitution

 

Considérant que  l’examen de  la  loi  fait  ressortir que  l’article 6 est  contraire  à  la Constitution  en  ce  qu’il ne  cite  pas  toutes  les options fondamentales de la Conférence Nationale de février 1990 et  qui  sont  reprises  par  les  articles  42,  44  et  54  de  la Constitution ; qu’il s’agit du nombre de mandats présidentiels, de la  limitation d’âge pour  les candidats à  l’élection présidentielle et de  la nature présidentielle du  régime politique dans notre pays ; que l’article 6 doit donc être reformulé comme suit :

« Ne  peuvent  faire  l’objet  de  questions  à  soumettre  au référendum,  les  options  fondamentales  de  la  Conférence Nationale de février 1990, à savoir :

 

– la forme républicaine et la laïcité de l’Etat ;

–  l’atteinte à l’intégrité du territoire national ;

–  le  mandat  présidentiel  de  cinq  ans,  renouvelable  une seule fois ;

– la limite d’âge de 40 ans au moins et 70 ans au plus pour tout candidat à l’élection présidentielle ;

– le type présidentiel du régime politique au Bénin. » ;

 

En ce qui concerne les dispositions conformes à la Constitution

Considérant que toutes  les autres dispositions de  la  loi déférée sont conformes à la Constitution ;

 

DECIDE :

Article 1er : Les articles 21 alinéa 2, 23 alinéa 2, 24  et 32  sont conformes à la Constitution sous réserve d’observations.

Article 2 : L’article 6 est contraire à la Constitution.

Article  3 : Est  inséparable de l’ensemble  du  texte de  la loi l’article 6 visé à l’article 2 de la présente décision.

Article  4 : Toutes  les  autres  dispositions  de  la  loi  déférée  sont conformes à la Constitution.

Article  5 : La  présente  décision  sera  notifiée  à  Monsieur  le Président  de  la  République,  à  Monsieur  le  Président  de l’Assemblée Nationale et publiée au Journal Officiel.

 

Ont siégé à Cotonou, le vingt octobre deux mille onze,

 

Messieurs Robert S. M.

DOSSOU Président

Madame Marcelline – C.         GBEHA  AFOUDA

 

Vice-présidente

Messieurs Bernard Dossou   DEGBOE

 

Membre

Théodore  HOLO

 

Membre

Jacob  ZINSOUNON

Membre

Le Rapporteur,  Professeur Théodore HOLO

 

Le Président,

Robert S. M. DOSSOU.

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