Enclenché depuis 2006 sous le régime du changement, le déclin de la démocratie béninoise se poursuit sous la refondation. Un à un, les différents piliers de notre démocratie tombent. Boni Yayi, quant à lui, peut se frotter les mains et s’enorgueillir d’avoir le pays dont il rêvait. Un pays sans grève, sans presse critique, sans syndicalistes qui revendiquent et surtout sans opposition. Un pays abruti où toutes les institutions sont à la merci du seul monarque.
C’est au vu et au su que « le crime » se commet. Depuis la dernière élection présidentielle de mars 2011 et la réélection du président Boni Yayi, la démocratie béninoise reçoit des coups fatals. Tout ce qui est considéré comme des acquis de cette démocratie sont entrain d’être remis en cause. L’élection présidentielle avait déjà donné l’apéritif de ce qui va se passer par la suite. Une élection jouée à l’avance où le vainqueur était bien connu de certains privilégiés de la république. De cette élection, personne ne saura le nombre d’électeurs, ni de bureaux de vote. La lépi qui a servi de base au fichier électoral a laissé sur le carreau près d’un million de personnes. C’est donc sans grande surprise que le Ko est venu. On ne s’en étonne guère. En tout cas, pas les observateurs avertis de la vie politique nationale. Après cette élection, le président Boni Yayi naguère débonnaire, montre une autre facette de sa personnalité : la fermeté. Au nom de la refondation devenue le nouveau concept de gouvernance politique, il annonce plein de des reformes qui selon lui, vont changer la vie des béninois et donner un nouveau souffle à l’économie du pays. C’est donc sous ce vocable très prisé actuellement de « reformes » que vont se perpétrer toute les forfaitures contre la démocratie. A la place des reformes sérieuses, ce sont au contraire des reformes étouffantes et des tentatives de suppressions de droits acquis depuis des années. C’est le cas du Programme de vérification des importations de Nouvelle génération (Pvi-nouvelle génération) qui affaiblit le pouvoir d’achat des populations. Ce qui est plus inquiétant c’est que le gouvernement entend initier une série de lois pour restreindre les libertés et amputer notre démocratie de ses fondations. Deux lois sont dans l’œil de cyclone. Il s’agit de la loi sur le droit de grève et celle sur les Règles générales applicables aux personnels paramilitaires, de la sécurité publique et assimilés. Selon les syndicalistes, ces deux textes enterrent définitivement la grève au Bénin. Face à cette menace grave sur leur combat, les organisations syndicales ont tous menacé de paralyser le pays. Le 28 septembre, pris par une vive colère, le Président menace les douaniers. La méthode s’apparente bien à celle de « Dadis Camara », l’ancien putschiste guinéen. Cette intervention a aggravé les soupçons et ravivé les inquiétudes dans la perspective d’une révision intéressée de la constitution pour s’éterniser au pouvoir. Surtout que Yayi s’en prend vertement à l’opposition qu’il accuse de manipuler les syndicats mais aussi la famille Dangnivo. Cette tendance à accuser l’opposition de tout ce qui est mauvais montre que qu’elle n’est plus la bienvenue ici et c’est ce qui explique, qu’en dépit du fait qu’elle est réduite à sa plus simple expression, persécutée, elle est toujours accusée. La réponse est simple : on en veut plus dans notre république.
Les syndicats, et après ?
Avant d’en découdre avec les syndicats, Yayi a travaillé au musellement de la presse, surtout celle de service. Celle-ci s’est transformée en machine de propagande du pouvoir. Depuis 2006, l’opposition est interdite d’antenne. Les débats contradictoires pour éclairer l’opinion publique sur les sujets d’intérêt national n’existent plus. Les institutions qui doivent jouer un rôle de contre-pouvoir comme la Haac, l’Assemblée nationale et même la Cour Constitutionnelle montrent à travers leurs décisions qu’elles sont au service du Chef de l’Etat. Certains de leurs membres ne s’en cachent même plus pour afficher de façon ostentatoire leur arrimage politique à la majorité présidentielle. Le label béninois tombe. Il ne fait plus rêver tout au moins le Danemark qui a sursis sa coopération avec le Bénin. La contradiction et le débat publics ont disparu même à l’Assemblée nationale où les députés de la majorité se comportent comme des automates qui votent « tout » sans réfléchir. Ainsi commence toujours les dictatures. Tout ce qui vient du président est bon. Alors qu’il doit être au service du peuple, c’est le peuple qui se met à son service. Dans les arcanes du pouvoir, on ne semble pas reculer. Au contraire, apprend-t-on, d’autres reformes anti-démocratiques viendront parachever le travail entamé : la marche vers la dictature. De la démocratie « nescafé » dénoncée, on glisse sans le savoir vers la « démocratie bananière » et personne ne semble s’en offusquer. La voix dissonante de l’Un, elle, n’est pas encore assez forte contrer ce vent.
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