Me Jacques Migan sur la révision de la Constitution : «Le K.o est assuré à tous les coups, si la Lépi ne connaît pas de révision»

Jadis ardent défenseur la majorité présidentielle, le bâtonnier Jacques Migan est  de devenu aujourd’hui un opposant endurci. Depuis quelques jours, sa voix se fait entendre, de plus en plus, sur les dérives et les erreurs du régime. Dans une interview qu’il nous a accordée en fin de semaine dernière à son cabinet en compagnie des confrères de ‘‘Nouvelle Expression’’, il montre que le toilettage de la Lépi est une condition sine qua non à l’organisation d’un referendum pour connaître de la révision de la Constitution.

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I – LEPI

Pourquoi, à votre avis, faut-il auditer la LEPI aujourd’hui alors que celle-ci a servi à l’élection de Boni YAYI le 13 mars 2011 ?

 

Quelles en sont les dysfonctionnements ?

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La LEPI est un processus conçu pour mettre en phase une cartographie censitaire nationale  établie sur une base géographique  avec une liste électorale informatisée.  Cette mise en phase sert à la fois à organiser  la permanence et l’apurement fréquent de la liste électorale   dont le premier caractère est  l’exhaustivité.

Le processus est organisé en diverses phases  liées entre elles  et dont les durées  sont quasi incompressibles. La durée totale est d’au moins  30 mois.

Ce qui a été fait entre Janvier 2010 et Mars 2011 est un travail précipité. La cartographie a été mal conduite et n’a pu répondre au critère d’exhaustivité c’est-à-dire que de nombreux citoyens ont été laissés pour compte. La société civile, les anciens chefs d’Etat, les Présidents Emile Derlin Zinsou, Nicéphore Dieudonné Soglo, les exclus de la liste, les responsables politiques toutes tendances confondues, avaient demandé le report des élections pour que soient corrigés les différents dysfonctionnements recensés notamment l’inscription sur la liste électorale des exclus. L’Union fait la Nation (UN) avait évoqué le chiffre de un million d’exclus. Le Gouvernement et les structures en charges de l’organisation des scrutins à savoir la CPS-Lepi et la CENA avaient quant à elles parlé de 200.000 exclus. Ce qui est certain c’est que tout le monde, Mouvance comme opposition a reconnu que plusieurs dizaines de milliers de nos concitoyens n’ont pu exercer leur droit de vote le 13 mars 2011 parce que exclus par la Lepi. La localisation technique des populations et des concitoyens en âge de voter a été totalement faussée pour ne pas dire extrapolée. La liste  tronquée qui en a été tirée n’a pu être apurée des erreurs (sur l’âge notamment) des doublons, et autres bévues. De nombreux citoyens  n’ont pu avoir leur carte d’électeur en rapport avec le bureau de vote de rattachement  régulier.  La numération et le cadrage des bureaux de votes  n’ont pu être faits.  La suite est connue.

Or pour réussir ces corrections il fallait du temps, un temps qui va au-delà du 6 avril 2011. Nous étions confrontés à deux dilemmes. Le premier dilemme est relatif à la durée du mandat du Président de la République qui est un délai préfixe, c’est-à-dire qui ne peut ni être prorogé, ni être modifié. Le deuxième dilemme était de savoir s’il fallait aller aux élections de Mars-Avril 2011 avec la Lepi inachevée, en cours de réalisation excluant plusieurs milliers de béninois et béninoises. Relativement à cette préoccupation, la Cour Constitutionnelle a décidé que ladite Lepi servira pour les élections de 2011.

Sur le plan financier, une enveloppe confortable d’environ 17 milliards de francs CFA pour l’organisation et la réalisation de la Lépi était arrêtée. L’évaluation provisoire de la LEPI serait actuellement d’environ 44 milliards dont au moins 25 milliards décaissés par le Trésor public.

Auditer la LEPI, c’est établir l’état de ce qui est actuellement appelé LEPI et qui n’en est pas une.  C’est comprendre pourquoi on est passé de 17 milliards à 44 milliards sans qu’aucune inspection ne soit conduite à ce jour et établir les responsabilités

C’est ensuite dire et convenir de ce qu’il faut faire pour remplir les critères d’exhaustivité, de transparence, d’authenticité, de fiabilité et de permanence que doit remplir le fichier électoral pour que des élections puissent être qualifiées de sincères et non frauduleuses.

Il est de notoriété que le processus qui a conduit à la réalisation de la Lepi a connu d’innombrables dysfonctionnements. Je peux citer la non exhaustivité du recensement Porte à Porte ainsi que l’enregistrement biométrique des béninois qui ont 12 ans et plus ; Je peux citer la non prise en compte à temps des réclamations faites par les béninoises et béninois lors de l’affichage des listes provisoires ; Je peux citer la non effectivité du transfert de compétence entre les opérateurs technologiques et la partie nationale ;

Je peux citer la tutelle, mieux la substitution de l’organe politique CPS sur l’organe technique que constitue la MIRENA ; Je peux citer l’incapacité (budgétaire) de la MIRENA à communiquer sur le processus ;

Je peux citer l’interprétation non partagée de la démarche progressive (aire par aire) prescrite par la loi;

Je peux citer les délais relativement courts concernant les opérations de terrain (cartographie, Recensement Porte à Porte et enregistrement biométrique) pour obtenir l’exhaustivité exigée par la loi ;

Je peux citer les contestations relatives au nombre de village recensés lors du processus, et par ricochet le nombre de centres de vote, et de bureaux de vote ;

Je peux citer la non observation de la pause tant souhaitée pour une meilleure évaluation des premières étapes du processus ;

Je peux citer la non application au recensement ne serait-ce que partiellement des méthodes du recensement général de la population et de l’Habitat (R.G.P.H.) ;

Je peux citer les remises à jour multiples du chronogramme et leur non publication ;

Je peux citer l’absence de consensus de la classe politique autour de la réalisation de la Lepi ;

Je peux continuer à citer beaucoup d’autres dysfonctionnements comme la qualité apparemment approximative des KITS d’enrôlement qui tombaient tout le temps en panne ; Il y a aussi la lenteur dans les opérations du fait de l’inefficacité et de l’incompétence de certains agents enrôleurs mal formés.

Plus grave, on est allé pour la première fois aux élections sans connaître le nombre d’électeurs et de bureau de vote.

Je me rappelle que certains ont voté avec des certificats d’enregistrement contrairement à la carte d’électeur admise.

Je me rappelle que même à la veille de l’élection présidentielle plus précisément le 12 mars, les opérations d’enregistrement continuaient.

Et puis le jour des élections, le jour même du scrutin, c’est-à-dire le 13 mars 2011 personne ne connaissait la couleur du fichier électoral.

Ce sont tous ces dysfonctionnements dans la réalisation de la Lepi qui me permettent de dire que la Lepi dans sa conception actuelle doit être auditée, révisée améliorée – Et cet «audit circonstancié» pour reprendre les termes de la Renaissance du Bénin (RB) doit se faire avant les prochaines élections avec la participation de tout le monde, sous la conduite d’un organe indépendant composé d’hommes et de femmes incorruptibles intégrés, de bonne moralité.

 

On a remarqué que la RB et depuis quelque temps une certaine classe politique a la même préoccupation que vous. Est-ce que la LEPI n’était pas vraiment fiable avant de servir comme instrument pour l’organisation de la présidentielle ?

Je me réjouis de savoir que presque tout le monde exige l’audit de la Lepi avant les prochaines élections. La société civile le demande, l’opposition réclame l’audit, les jeunes ne conçoivent même pas de nouvelles élections dans ce pays si la Lepi n’est pas auditée.

La Renaissance du Bénin dans sa déclaration du 22 septembre 2011 lue pas son secrétaire Exécutif National Luc ATROKPO a réaffirmé la volonté de la RB de voir reconnaître le droit de vote de toutes les béninoises et de tous les béninois en âge de voter à travers notamment un audit circonstancié de la Lepi qui permette d’intégrer des laissés pour compte de 2011.

Le Chef de l’Etat lui-même a reconnu les insuffisances et les ratés de la Lepi à travers son «pardon» inopiné au peuple le 13 mars 2011. Je ne connais pas de béninois et béninoises qui pourraient penser que la Lepi dans sa conception actuelle n’est pas tronquée.

 

Comment envisagez-vous ladite correction ?

La Lepi doit être vue comme un instrument porteur de paix, de démocratie et de développement. La Lepi ne doit pas être une liste  réalisée uniquement à des fins électorales.

Une Lepi bien réalisée permettra la modernisation du système électoral, l’amélioration de la qualité des consultations électorales, la réduction des contestations électorales, la réduction des coûts d’organisation des élections, la fiabilisation du fichier électoral, l’amélioration de l’état civil.

Une Lepi bien réalisée peut servir à une meilleure organisation des recensements et enquêtes de populations.

Une Lepi bien réalisée peut aussi dans l’administration territoriale permettre d’actualiser, via une loi, la liste des villages, et quartiers de villes avec les coordonnées géographiques.

Une Lepi bien réalisée peut aussi assurer un meilleur aménagement du territoire par la réalisation des cartes des infrastructures sectorielles géo-référencées, notamment sanitaires, scolaires, culturelles, touristiques, énergétiques, routières etc…

Et puis, concernant les données du recensement porte à porte, lorsque les opérations sont bien menées dans le cadre de la Lepi, elles permettent l’amélioration des projections démographiques sur la base d’hypothèses tangibles, ensuite l’amélioration des calculs des indicateurs socio-démographiques et enfin l’amélioration de la construction des pyramides des âges et la planification socio-économique jusqu’au niveau local.

S’agissant des données biométriques issues du recensement national approfondi (RENA) qui seront collectées toujours dans le cadre de la Lépi, toutes les structures de l’Etat à différents niveaux peuvent l’exploiter, soit pour élucider scientifiquement des enquêtes judiciaires, soit pour aider efficacement la justice dans le règlement des conflits domaniaux par l’authentification des empreintes digitales, soit enfin pour aider à la production de documents administratifs sécurisés tels les cartes d’identité, les passeports, les titres de transport, les assurances, les banques, les cartes d’étudiant, etc….

Fort de ces atouts qu’on peut attendre de la Lépi il faut un organe qui dispose de toutes les compétences en matière de ressources humaines et logistiques nécessaires.

La loi n’a pas précisé l’organe qui doit procéder aux corrections de la Lépi. Quand on se réfère à l’article 9 al 3 de la loi n° 2009-10 du 13 mai 2009 portant rena-lepi, il est dit laconiquement que ″…..l’organe compétent désigné pour procéder aux corrections du fichier électoral national et de la liste électorale permanente informatisée …….″ La loi précitée renvoie en son article 66 aux ″……décrets pris en conseil des ministres pour déterminer en tant que de besoin, les modalités d’applications″ de l’organe.

Selon moi, l’organe dont s’agit ne doit jamais être le SAP/CENA tout simplement, parce que celui-ci est sous la tutelle de la présidence de la République.

Il faut un organe indépendant composé d’hommes et de femmes intégres, incorruptibles, de bonne moralité, apolitiques.

Il reviendra à cet organe indépendant composé d’hommes et de femmes intègres de faire appel aux experts sélectionnés pour auditer la Lépi, de faire les corrections nécessaires en vue de l’amélioration de celle-ci.

La correction doit être conduite de manière transparente.

 

Est-ce que la correction sera livrée à la discrétion du pouvoir ou en collaboration avec l’Union Européenne, surtout quand on sait que les partenaires techniques ont restitué à l’Etat tout le patrimoine sur la LEPI ?

Par ailleurs qui va financer les corrections à apporter à la Lépi ?

Il faut distinguer  la propriété de l’Etat sur les équipements acquis par les structures de réalisation de la LEPI,  de  la LEPI  elle-même.

Les équipements appartiennent à l’Etat qui les tient à disposition de l’organe qui en a besoin pour réaliser la mission de service public ou de concorde nationale qu’est la réalisation de la LEPI.

La LEPI  n’appartient à personne en particulier  et en tant que liste nominative comportant des données personnelles, elle appartient à chacun pour ce qui le concerne et doit bénéficier de la protection et de la confidentialité prévue par la loi et ne peut être manipulée par personne sans l’avis de la CNIL instituée par la loi ;

Précisément, la correction de la LEPI doit regrouper la CNIL, l’INSAE, et d’autres ressources ou panel de consultants béninois et étrangers experts en la matière.

En principe, il  est normal que le Gouvernement par le ou les départements compétents procède à la mise en place de la liste électorale.  Dans le meilleur des mondes, on aurait pu, aidé par une mission technique sérieuse et apolitique,  partir des chefs de quartier et remonter jusqu’aux préfets pour établir le fichier électoral. Cette mission de localisation et d’administration publique  se trouve dans les attributions de ces différentes autorités. Le problème dans nos Républiques dites « bananières » pour ne pas dire non démocratiques, est que le Gouvernement ne joue quasiment jamais un jeu franc et loyal. C’est que les autorités décentralisées et déconcentrées sont à des soldes politiques diverses et variées  et que  leur démarche  n’est jamais dirigée dans le sens du bien public, du développement. Le dirigeant au pouvoir et toute la caste qui l’entoure, s’organisent systématiquement pour conserver le pouvoir et manipuler tous les outils qui permettent l’accession au pouvoir. Les animateurs du débat politique sont trop opportunistes. Parfois, l’opposition politique  n’est que la défense acharnée ou cupide de privilèges et d’avantages souvent illégitimes.

Dans cet environnement où la confiance a disparu il n’est pas possible de laisser le Gouvernement réaliser la LEPI  sauf à établir une suzeraineté.  «  Le chien  n’abandonne jamais sa façon éhontée de s’asseoir. » (p. 153 – Le soleil des indépendances Ahmadou Kourouma). En d’autres termes, les mauvaises habitudes ne disparaissent pas du jour au lendemain.

L’Union Européenne  n’est pas pour moi une garantie de fiabilité et de transparence. La Représentation de l’Union Européenne est animée par des hommes et ces hommes ont leur part de complaisance, de complicité, d’ignorance ou d’étroitesse d’esprit.  L’Union Européenne est aussi un agrégat d’intérêts étrangers. Et il faut sortir de l’illusion du partenariat désintéressé, neutre et obligatoirement porteur de plus value.  Souvent le partenariat est un plâtrage forcé de solutions  ou d’expériences faites sous d’autres cieux,  (réalisé sous diktat de conditionnalités,) et qui ne sont pas forcément adaptées à nos réalités.

Je crois qu’il faut compter sur nos propres forces. Le développement,  c’est compter sur soi même, réaliser par soi même.

Tout ceci pose en fait la question de Qui pour réaliser la LEPI. Loin de moi tous les sempiternels débats politiques. Ce qui m’intéresse est la réalisation technique de la LEPI afin de mettre à la disposition de tous un instrument qui départage sincèrement et indiscutablement tout le monde.

Et je crois qu’on peut imaginer en ce sens un comité technique de réalisation dont les membres recrutés sur appel d’offre international seront chargés pour une durée déterminée à conduire un travail technique déterminé dont les termes de référence sont dans la loi.  Ce comité bénéficiera de la collaboration des organes (INSAE, CNIL  etc…) et des autorités compétentes.  Ce comité sera rémunéré au résultat  c’est-à-dire qu’il n’y aura pas de sortie et de gaspillage de fonds sans un produit donné en main. Le financement sera réuni sur appel public à don et centralisé entre les mains des banques primaires  de la place. Le produit technique sera soumis à la discussion de tous, citoyens, partis politiques, députés, Gouvernement.

 

Pensez-vous que le gouvernement accèdera à cette demande de correction, gage selon vous, de transparence des élections et de paix sociale ?

Dans l’absolu le Gouvernement  n’est pas le Bénin. C’est une partie de ce peuple qui ne peut en faire à sa tête  ni suivant sa seule volonté.  Nous touchons en effet avec la LEPI l’une des pierres angulaires du contrat social et de la démocratie. Si le Gouvernement s’oppose à la correction de la LEPI,  ce sera la preuve qu’il s’installe dans la fausseté et qu’il ne veut pas la paix dans ce pays.

Le seul argument qui peut justifier ce refus est la non disponibilité de fonds pour financer les travaux. Et c’est là qu’il faut que ce peuple prenne ses responsabilités. Le financement sera réuni par appel public à la contribution de chaque citoyen et des plus nantis pour d’autres. L’évaluation du coût des travaux permettra de déterminer la contribution de chacun et s’il faut contribuer à hauteur de 25 francs ou de 5000 francs, pour sauver  le Benin, et éviter la guerre, chacun devra se priver de la bière au restaurant du coin ou du pagne pour les cérémonies pour défendre  son droit de citoyen.

 

Dans le cas où vous n’obtenez pas gain de cause, comment allez-vous vous y prendre, pour forcer le gouvernement à accéder à cette demande prioritaire ?

Forcer le Gouvernement ?  Loin de moi tout usage de force et toute idée de conflit avec le Gouvernement. Je suis un citoyen et chaque citoyen a le pouvoir de reprendre en main son droit citoyen  et l’un des droits du citoyen est de contribuer à la bonne administration de la chose collective ou publique.  Je  n’ai pour moi que l’espoir de convaincre le plus grand  nombre d’exiger  la mise en place d’une vraie LEPI.

 

Irez-vous jusqu’à boycott des prochaines échéances électorales si la correction n’était pas faite ?

Le boycott des prochaines échéances électorales n’est pas la solution. Boycotter les élections est une démission de ses devoirs de citoyen – C’est laisser le champ libre au pouvoir en place – Boycotter c’est devenir son complice pour maintenir la Lepi dans sa conception de Lepi truquée, tronquée et bâclée.

 

On a appris qu’avec cette LEPI le KO est assuré à tous les coups. Vrai ou faux ?

 

Le KO est assuré à tous les coups si la Lepi ne connait pas de révision – Je vous rappelle que lors de la dernière élection présidentielle, avant même la proclamation des résultats par la CENA et la Cour Constitutionnelle, on nous avait déjà annoncé le KO dès le premier tour. Si cette Lepi a servi à l’établissement de ce KO, c’est dire qu’elle participera à d’autres KO si elle n’est pas auditée.

 

Iriez-vous jusqu’à proposer un prélat à la tête de la commission chargé du nettoyage de la LEPI ?

Etre prélat  n’est plus en ces temps gage de sagesse et d’exemplarité. Du jour où les églises et autorités confessionnelles ont commencé à recevoir des coups de mains intéressées, à se laisser manipuler par des laïcs complices du système, dès ce jour s’est anéanti leur autorité morale et leur capacité à être au dessus de tout soupçon. Alors à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu.   Mais tout prélat est citoyen.

 

Pourquoi faites-vous de la correction de la LEPI, une condition sine qua none avant tout scrutin ?

 

Parce que la Lepi dans sa conception actuelle est tronquée, truquée et bâclée ; elle est fausse et le faux corrompt tout. Nous ne pouvons pas continuer avec ce qui est faux, corrompu, tronqué, truqué, bâclé.

Je voudrais inviter toutes les béninoises et tous les béninois à faire la veille citoyenne pour exiger les corrections préalables de la Lepi avant toute consultation du peuple, avant toute révision de la Constitution afin que celle-ci (Lepi) soit un instrument porteur de paix, démocratie, développement.

 

II– LA REVISION DE LA CONSTITUTION

Aujourd’hui il y a polémique autour de la question de la révision de la constitution. Même si nous sommes tous d’avis qu’il faut amender la constitution en y introduisant par exemple la Cour des Comptes, la Cena, le Médiateur de la République, nombre de béninois craignent néanmoins une révision opportuniste de la loi fondamentale par référendum. Laquelle donnerait lieu à nouvelle République qui mettrait le compteur à zéro, favorisant ainsi un Chef d’Etat qui a fini ses deux mandats constitutionnels de briguer un troisième mandat. On cite le cas actuel du Sénégal et de la Russie où l’on observe les va et vient de Poutine et de Medvedev.

Réponse : Je ne suis pas d’avis qu’on intègre une Cour des comptes, une CENA ou un Médiateur. L’inflation d’institutions aussi budgétivores qu’inefficaces n’apporte rien à ce pays

Cour des comptes : Il  y a déjà une chambre des comptes auprès de la Cour Suprême.  Nous avions opté pour  un système juridique unitaire  où la Cour Suprême coiffe tout le système judiciaire  et juge autant en matière administrative qu’en matière de compte.  Le Code de procédure civile qui vient d’être voté et promulgué prend en compte ce fait.  Voilà que tout à coup  il faudrait créer une institution budgétivore pour assurer une masse de travail quasi insignifiante. N’est-ce pas paradoxal ?

Le prétexte est qu’un acte de droit  communautaire dérivé y obligerait le Bénin.  Tel  n’est pas le cas.  Il  n’est pas requis du Bénin de créer une Cour des comptes,  mais d’organiser une juridiction  des comptes avec des prérogatives déterminées et des privilèges garantissant un fonctionnement efficace.  La question est de savoir s’il faut après la Haute Cour de Justice organiser encore une institution juridictionnelle budgétivore et créer une nouvelle caste de privilégiés ?

CENA : Dans ce pays pour ne pas vacciner le chien enragé on le tue ou on accuse son maitre de sorcellerie.  Quand on ne veut pas réformer le code de procédure pénale pour interdire aux magistrats du Parquet et aux juges d’instruction d’abuser de la détention préventive, on crée les para juristes  pour engloutir des aides internationales  et comme la solution était mal trouvée on essaye désormais d’inscrire dans la constitution des principes qui subissent tellement d’exception que seule la loi est un cadre adéquat pour les organiser.

Il est temps de regarder les problèmes en  face et de chercher les causes réelles et d’y apporter des solutions adaptées. Les placébos, les palliatifs, ne sont que des fuites en avant qui dégradent toujours plus la situation et rendent difficile toute solution véritable.

La CENA est le symbole du manque de confiance entre nos acteurs politiques. Celui de la recherche d’un départiteur indépendant et neutre. Elle a échoué dans cette mission  parce que le mode de composition était vicié et parce que les hommes ont perdu certaines valeurs d’honnêteté et de dévouement à ce pays. Ce n’est pas en faisant de la CENA  une institution constitutionnelle qu’on résoudra ces questions, au contraire, le problème du choix des hommes est déplacé à un niveau où la solution va être difficile à trouver.

Le Médiateur : la verve d’un homme, sa capacité rhétorique, la mode institutionnelle  ne doivent pas conduire à donner  vie constitutionnelle à un processus alternatif de règlement de litige  dont l’existence signifie la faillite de la justice, la carence du service public et de l’administration, l’absence de débat d’idées et de société au plan politique.

On ne peut pas continuer dans ce pays d’alimenter des institutions budgétivores alors que les recettes fiscales  sont insuffisantes à couvrir les dépenses de l’Etat. C’est une course stupide vers l’appauvrissement, l’asservissement ou la faillite.

En 20 ans d’existence dites-moi, qui la Haute Cour de la République a jugé  dans ce pays.

 

1 – Selon vous, quelles dispositions faut-il intégrer dans la prochaine constitution pour empêcher un Président qui a fini ses deux mandats d’être à nouveau candidat dans une nouvelle République ?

Je rappelle que la constitution a prévu les conditions de sa révision à travers des articles précis.

L’amendement de la constitution, l’adaptation de la constitution, la révision de la constitution n’entrainent pas de changement de République.

Vous avez cité le cas du Sénégal et de la Russie où les dirigeants de ces pays à travers les tripatouillages de la constitution s’accrochent au pouvoir. On peut rajouter les cas de Biya au Cameroun, Campaoré au Burkina, Tandja au Niger, Gbagbo en Côte d’Ivoire. Ces actes que posent ces chefs d’Etat s’appellent un coup d’état politique constitutionnel.

Le Bénin après avoir rejeté les coups d’Etat militaires, ne peut se permettre de renouer avec de telles pratiques.

Je ne juge pas utile qu’on ajoute à l’actuelle constitution un nouvel article pour contrer les velléités d’un Président qui a fini ses deux mandats et tenterait d’être à nouveau candidat.

Les articles 42 et 44 ont permis l’alternance qui a amené le Président Boni Yayi à être aujourd’hui Chef de l’Etat. Malheur à celui qui voudra les remettre en cause pour se maintenir au pouvoir.

Le peuple béninois accorde beaucoup de prix à ces deux articles qui ont fait leur preuve. Il serait difficile de les modifier voire de les contourner.

Je voudrais inviter toutes les béninoises et tous les béninois à faire la veille citoyenne pour exiger les corrections préalables de la Lepi avant toute consultation du peuple, avant toute révision de la constitution et en cas de révision de celle-ci qu’on ne touche pas aux articles 42 et 44.

 

Que cache un référendum populaire par rapport à l’article 154 de la constitution qui prévoit les conditions de révision par voie parlementaire sans recourir àun référendum ?

L’article 154 al. 2 dispose que « pour être pris en considération, le projet ou la proposition de révision doit être voté à la majorité des (3/4) trois quarts des membres composant l’Assemblée Nationale ».

Le pouvoir exécutif peut-il compter sur les députés de la RB pour les réformes qu’il a entreprises dont la révision de la constitution ? La RB est prête à soutenir le gouvernement dans ses réformes à condition que certains principes démocratiques ne pâtissent pas desdites réformes. Au nombre de ces principes, les droits civiques dont celui du droit constitutionnel de vote à tous les béninois en âge de voter à travers un audit circonstancié de la Lepi, est exigé par la RB.

Je déduis de ce préalable que les députés RB peuvent ne pas s’associer à la révision de la constitution en vertu de l’article 154 si le gouvernement ne procède pas au préalable à l’audit de la Lepi.

Pour contourner cette difficulté, le gouvernement pourra recourir au référendum en vertu de l’article 155 de la constitution.

Il lui faudra pour ce faire la majorité des quatre cinquièmes des membres composant l’Assemblée Nationale.

En l’état, le pouvoir peut-il compter sur les députés FCBE pour recourir au référendum dans le cadre de la révision de la constitution ?

Selon moi se posent trois priorités à satisfaire avant toute révision de la constitution :

– La première, je l’ai déjà évoquée c’est la révision de la Lepi

– La deuxième priorité est d’ordre socio-économique. Dans les marchés, dans les ménages, le mécontentement est général, le moral complètement bas. Tout coûte cher. Le tiers de la population n’est plus en mesure de satisfaire ses besoins fondamentaux. La précarité est ambiante. Le peuple s’est simplement appauvri.

– La troisième priorité, c’est la concertation populaire à susciter en vue de la révision de la constitution pour recueillir un large consensus national des béninois et des béninoises à travers leurs représentants ;

La constitution n’est pas seulement politique. Elle est aussi le reflet d’une idéologie sociale, d’un consensus communautaire.

Ainsi, une large concertation s’impose avant toute révision de la constitution.

Il faut un débat contradictoire pour son évaluation. Je rappelle que le Bénin dispose pour les besoins de la révision de la constitution de juristes de haut niveau, compétents et indépendants. Il serait inutile de faire appel à des experts internationaux. Lorsque les trois priorités précitées seront prises en compte, la révision de la constitution se fera presque à l’unanimité.

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