Encore un petit effort et nous serons le quartier chrétien de toute l’Afrique

Nous avons réussi le pari redoutable d’héberger chez nous pendant trois jours le chef suprême de l’Eglise catholique, et cela sans aucune fausse note rédhibitoire, sans aucun drame humain ou matériel qui aurait pu gâcher la fête. Le cadre catholique en salue d’abord le peuple béninois, ce peuple généreux qui sait faire preuve de discipline et d’abnégation quand il est convaincu de la cause. J’en salue aussi le clergé béninois qui aidé de quelques laïcs (cessons de les brocarder en les appelant les « christocrates ») a fait montre encore une fois de ses qualités d’organisation. Les quelques fausses notes mineures sont évidentes Tenons-en compte pour nous hisser au premier rang des nations qui savent réussir l’organisation d’événements mondiaux ; comme nous en félicite d’ailleurs l’ambassadeur de France. C’est surtout le dimanche 20 novembre que la fête a failli se gâter. Voyons donc.

1) Pour une messe qui aura lieu à 9heures, il est totalement inutile de faire convoyer la majorité des fidèles au Stade à 6h et en fermer sans pitié l’accès à 6h 30, pour les rouvrir à 7heures après les cris et les gesticulations habituelles. Rigueur ne rime pas avec raideur, et des mains de fer peuvent rester dans des gants de velours. Il aurait été plus pertinent d’augmenter le temps de la mise en place : 6h à 7h30 par exemple ; ce qu’on a fini par faire d’ailleurs.

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2) Un parking payant aurait pu être organisé sur la vaste esplanade de ce stade; cela aurait évité que des gens laissent leur voiture à la maison pour venir par des moyens de fortune dangereux.

Néanmoins, au niveau éthique et spirituel, la visite du Pape nous a largement comblés. A force de répéter à temps et à contretemps que Dieu nous aime, nous avons fini par donner vie à cet axiome connu en sciences sociales : l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes et de la réalité sociale finit par créer ce que les Anglo-saxons appellent « self made prophecy » ou la prophétie auto-réalisatrice. Et s’il était vrai que Dieu a un amour particulier pour nous, comme il l’avait pour son peuple élu, le peuple hébreu ? Nous battons au moins deux records dans l’accueil du Vicaire du Christ. A moins que je me trompe, nous sommes le seul pays en Afrique Subsaharienne à accueillir trois fois déjà l’évêque de Rome. Nous sommes le seul pays de l’Afrique Subsaharienne à accueillir deux fois le même Pape sur son territoire, ou record subsidiaire, à être visité par un pape et son successeur direct ! Le Bénin est terre de spiritualité avec toutes ses religions endogènes que personne n’ose plus rejeter comme païennes. Nous n’avions pas eu le premier cardinal africain, mais nous avions eu celui qui était resté longtemps à la Curie romaine, qui avait été plusieurs fois le représentant personnel du saint Père et qui bien plus, a été un papabile sérieux. Evidemment, cette grâce divine nous impose comme devoir de croyants à sa mystérieuse révélation, d’être dignes de cette surabondance de grâces : en évitant de retomber dans nos travers païens. Nous avons fait de grands efforts pour recevoir sans faute majeure notre prestigieux hôte. Mais bien recevoir le « djonon » (l’hôte) est déjà l’une de nos plus importantes valeurs. Evitons après la visite papale de renouer avec nos démons favoris. Jouissons de cette paix, de cette réconciliation pendant longtemps. Sursum corda ! Elevons nos cœurs, chers compatriotes pour mériter ce nouveau palmarès : le quartier chrétien de l’Afrique. Pour cela, il faudra d’abord faire nôtre la théologie morale de Paul de Tarse telle qu’il a su magistralement développer dans ses grandes lettres, comme cette magnifique Lettre aux Romains : cherchons la sainteté, la seule qualité qui nous rapproche de Dieu. Pour ce faire, surmontons la dictature de la chair pour laisser fructifier en nous les dons de l’Esprit saint. Cela suppose une lutte acharnée contre notre penchant au gain facile, au matérialisme jouisseur et à la corruption rampante. La seconde exigence, c’est la justice qui suppose l’amour du prochain ; ne soyons plus indifférents aux spectacles de la pauvreté et de la misère. La justice, c’est aussi une juste répartition des fruits du travail collectif. Nous disions quand nous étions vraiment décidés à transformer notre société avant que la bêtise et la paresse intellectuelle et morale nous aient conduits au fameux Discours d’orientation de Goho : « il faut s’attaquer aux inégalités de revenus en attendant de s’attaquer aux inégalités de fortune ». Eh oui ! Le Discours-programme a été élaboré par des cadres patriotes. Beaucoup sont morts, mais certains sont encore vivants. Ils ne disent pas autre chose lorsqu’ils réclament derechef le changement, l’émergence, la refondation.

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