Les Communes, considérées comme les Unités focales et les Moteurs du développement de notre pays, doivent être perçues, sous l’angle de la Décentralisation et de la Déconcentration de l’Administration comme des «laboratoires» qui ne souffrent d’aucune improvisation ni de négligence.
De ce fait, nombreux sont ceux qui réclament à cor et à cri le transfert des compétences et des moyens, sans que soit réglée au préalable la question fondamentale des Ressources Humaines et structurelles, par une organisation rationnelle et pragmatique. A cet effet, voici la contribution du Colonel à la retraite, Philippe AKPO, dans sa lettre en date du 15 décembre 2011 au Ministre en charge de la Décentralisation.
Cotonou, le 15 décembre 2011
A
Monsieur le Ministre
de la Décentralisation
Cotonou
OBJET: Contribution à la réussite économique, socioculturel et politique du Bénin, conditions indispensables à l’émergence du pays.
La Décentralisation en question
Monsieur le Ministre de la Décentralisation,
La présente contribution tient sa justification dans l’avant dernier paragraphe de la préface de Monsieur Joseph TOSSAVI, Président de la Mission de Décentralisation sur le «Guide du Maire», réalisé en février 2003 à savoir: «La gestion citoyenne de nos futures Communes est un exercice à la fois novateur et complexe qui nécessite un investissement humain de tous les instants, mais aussi et surtout, une bonne organisation».
S’il en est ainsi, comment comprendre et expliquer que notre pays le Bénin puisse compter des Médecins chômeurs?
Selon le guide, en effet, à la page 64, au chapitre 1er traitant de l’Administration Communale, il est indiqué les services qui pourraient être créés dans les domaines ci-après:
1- les Affaires Administratives;
2- les Affaires Financières;
3- les Affaires Techniques;
4- la Planification;
5- les Affaires Domaniales;
6- les Affaires Culturelles et Sociales;
7- les Sports et Loisirs;
8- l’information et la Communication.
A ce point, nous avons au moins huit (08) Directeurs au niveau de la Commune.
Si nous nous appesantissons sur la Santé Publique, qui se veut un secteur de spécialisation, en ce 21ème siècle, il nous faudrait en moyenne: 01Médecin généraliste, 01Ginécologue, 01Pédiatre, 01Chirurgien, 01Anestésiste, 01ORL, 01Dentiste, 01Sérologiste.
Au mieux, cela nous ferait huit (08) praticiens pour chacune de nos soixante dix sept (77) Communes, à l’exception des trois à statut particulier que sont: Porto-Novo, Cotonou, Parakou.
Au total et dans le seul domaine sanitaire, la Faculté des Sciences de la Santé devrait fournir 592 Responsables spécialistes de Santé, selon une programmation scientifique à moyen terme. Si nous ajoutons à ce chiffre, les huit Directeurs de l’Administration Communale et dans l’hypothèse que le Responsable de la Santé compterait parmi les Directeurs Communaux, nous aurons alors:
1 – 8 = 7 et 7 x 74 + 592 = 1 110 hauts cadres.
Comment dans ces conditions, notre pays pourrait compter des Médecins chômeurs avec les relèves successives des générations ?
I. ELECTION DES CONSEILLERS ET DES MAIRES
Depuis la prise de la loi n° 2000-18 du 03 janvier 2001 et celle n°98-006 du 09 mars 2000 portant régime électoral communal et Municipal en République du Bénin, nous avons inconsciemment «politisé l’Administration de nos Communes» en subordonnant l’élection des Conseillers, puis des Maires:
a) au scrutin de liste à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne dans les Arrondissements disposant de deux (02) sièges au moins.
b) au scrutin uninominal majoritaire à deux tours dans tout Arrondissement ne disposant que d’un siège (Art. 91).
Le mal ici, est le champ laissé libre aux formations politiques qui ont la charge de l’animation de la vie politique.
Or, nous savons tous qu’en fait d’animation politique, nous en sommes bien loin. En définitive, c’est la force de l’argent qui prédomine à ce sujet.
II. CONSEQUENCE
Si dans les pays du Nord, l’ouvrier maçon, charpentier et autres peuvent prétendre à la fonction de Conseiller ou de Maire, c’est loin d’être le cas dans nos Collectivités africaines où les gens sont à peine alphabétisés.
En Afrique, les politiciens cherchent et s’emploient à placer leurs «pions», manipulables à souhait. Dans la mesure où le futur Maire et les Conseillers sortiront de cet ensemble hétéroclite, des individus inaptes et mal élus, plus réactionnaires que patriotes, sont ainsi portés sur des strapontins puis, Bonjour les dégâts… On assiste par la suite à des contestations et des votes de défiance, si ce n’est le statut quo par endroit, pour éviter de déchoir un fils du terroir. Dans ce dernier cas, le manque de volonté politique et de courage entraîne par conséquent, un retard de cinq (05) années à certaines Communes dans leur développement, en attendant les prochaines élections.
En conclusion à ce qui précède, il nous faut mettre l’accent sur l’absence de critères minima, pour le choix des Conseillers et des Maires, en lieu et place de l’appartenance à un parti politique.
III. LA SITUATION ACTUELLE SUR LE TERRAIN
Dans la plupart des cas, les postes de Conseillers et de Maires sont pris d’assaut par des individus inadaptés et peu qualifiés, par rapport aux multiples défis de la Décentralisation. Très tôt, ces individus ont intégré les Conseils Locaux et les Mairies.
Ils ont pris goût très tôt à la gestion opaque, facile et solitaire, pour leur enrichissement personnel. Ils s’accrochent désespérément à la chose commune, quitte à liquider, au moyen des forces occultes, tous ceux qui s’aviseraient de les déloger de leurs piédestaux.
IV. PROPOSITIONS
1- Il faudra que le Gouvernement du Président Boni Yayi adopte comme priorité à ses réformes, l’élaboration de critères fiables et incontournables à tous les futurs Candidats aux postes de Conseillers et de Maires, en attendant que l’Ecole Nationale d’Administration nous forme des Administrateurs, à moyen terme, pour l’encadrement et la gestion de nos Communes.
Ces futurs cadres, d’un patriotisme avéré, devront faire le tour de plusieurs Communes Rurales au Nord, au Sud, au Centre, à l’Ouest et à l’Est du pays, pendant leur formation, pour s’imprégner des réalités du terrain.
Le succès de la Décentralisation à la base, dès 2012, sera à ce prix, en attendant des Administrateurs bien formés. Voilà la politique de la formation-Emploi, dans ce domaine précis.
2-L’emploi des diplômés sans emploi devra être revu sous cet angle pour donner les mêmes chances à nos Communes, avec citation et récompense chaque année, pour les meilleurs Maires.
La qualité des Ressources Humaines est plus que jamais à l’ordre du jour.
Je ne doute pas que notre pays étonnera l’Afrique et le monde.
En effet, c’est au prix d’un courage indien que nous mettrons un terme au pouvoir de l’argent, afin que notre pays le Bénin soit véritablement émergent. Cessons donc de tout raccrocher à la politique politicienne.
Il est sûr et certain que la présente approche suscitera une levée de bouclier et des réprobations venant de toute part car, toutes les lois électorales de notre Etat donnent la prééminence aux partis politiques.
Mais, à l’heure de la refondation et face à nos devoirs vis-à-vis des générations futures, le Gouvernement du Président Boni Yayi doit assumer ses responsabilités historiques et prendre les Béninois, tels qu’ils sont, à l’étape actuelle de notre développement.
Voici en effet, plus de deux décennies que nous clamons «démocratie!, démocratie!» et sommes toujours sur une pente raide pour la descente aux enfers.
Lieutenant-colonel
Philippe AKPO
Officier à la retraite
06 BP 1538 – COTONOU
Tél: 21 33 25 34 /
95 79 86 10
Ampliations:
Monsieur le Premier Ministre KOUPAKI
Monsieur le Ministre d’Etat chargé de la Défense
Monsieur le Ministre du Développement
Madame le Ministre du Travail
Madame le Ministre de la Santé Publique
Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique
Madame le Ministre de l’Economie et des Finances
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale
Monsieur le Président de la Cour Suprême
Monsieur le Président de la Cour Constitutionnelle