Présidentielle sénégalaise : Le requiem des Wade

Papy Wade sortira par la porte de service. La petite. Pour n’avoir pas su écouter la voie de la raison. Pour n’avoir pas vu venir la déconfiture. Pour avoir de ses mains creusé sa propre tombe politique. Le compte à rebours de la gouvernance Wade a donc commencé. Rien ne devrait plus pouvoir expliquer une éventuelle victoire du Parti présidentiel sénégalais et de son candidat octogénaire. Rien ou si peu de choses. A condition bien sûr que le vieil « enfarineur » ne sorte un de ces tours de magie électorale dont de trop nombreux chefs d’Etat africains, candidats avant lui à leur propre succession, ont appris à faire usage pour se faire reconduire.

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S’il est encore une chose à faire pour le président sénégalais afin de sortir avec le peu d’honneur qu’il lui reste de la scène politique sénégalaise, ce serait de mener le plus loyalement ce dernier combat de sa carrière qu’il voulait interminable. Au sortir de ce premier tour de la présidentielle sénégalaise du 26 février 2012, on a en effet pu se rendre compte que les malversations électorales redoutées par les uns, espérées par les autres n’ont pas vraiment eu lieu. De l’avis de tous les observateurs, le scrutin s’est déroulé dans des conditions convenables, et c’est ce qui explique sans doute qu’un second tour se soit invité au rendez-vous. Un second tour qui récompense celui des candidats de l’opposition qui aura le plus cru en ses chances de jouer les trouble-fêtes, Macky Sall. Car, il faut bien le dire, l’attitude des Niasse, Dieng, Seck et autres Gadio traduisait en partie entre autres choses les doutes et les incertitudes quant à leur capacité à contraindre le Vieux à un second tour. Les professions de foi proférées par chacun d’entre eux sur l’incapacité de Me Wade à gagner au premier tour procédaient plus de mises en garde envers les fraudes redoutées que de certitudes avérées.

En tout état de cause, Papy Wade ne pouvait loyalement pas gagner la présidentielle 2012 en un seul tour. Et pour l’avoir joué à la loyale, il a encore moins de chances de l’emporter au second. Au-delà des marges de progression qui sont pour lui presque totalement inexistantes dans ce cas de figure, Me Abdoulaye Wade paye plus que certainement au prix fort son rêve dynastique et son entêtement à vouloir s’accrocher au pouvoir. D’un premier abord, les Sénégalais ne voulaient certainement pas de son fils Karim pour occuper les plus hautes fonctions au sein de la république. Preuve en est son lamentable échec dans sa tentative de conquérir la mairie de Dakar en 2009, poste qui aurait pour lui été un tremplin dans la perspective des présidentielles suivantes. Conscient du manque de charisme subséquent pour son fils, toute la politique du Président Wade a été par la suite ostensiblement de porter ce dernier à bout de bras pour lui faire gravir les échelons, en brûlant les étapes si nécessaire, afin d’arriver au sommet. Le profil bas observé par Karim durant tout ce temps n’a pas dû mystifier les sénégalais.

Le second tour de la présidentielle sera donc comme un véritable référendum pour ou contre la dynastie Wade. Et pour ma part, je me permets de penser tout haut que ce sera un plébiscite contre. Les Sénégalais ont marqué à travers leurs choix au premier tour leur rejet de la génération des sexagénaires, septuagénaires et octogénaires. Les Sénégalais ont exprimé leur rejet des subterfuges et des forfaitures sous toutes leurs formes. Les Sénégalais ont choisi le changement. En cela, les abstentionnistes du 1er tour que certains voient comme le vivier de suffrages qui pourrait faire gagner Me Wade, ne risquent pas d’abonder dans ce sens. En effet, si tant est-il que l’on explique le taux faramineux d’abstention (plus de 48%) par la crainte des violences électorales ou par la sensation que les jeux étaient faits d’avance, faut-il réellement penser que ce sont les partisans du Président Wade qui se seraient le plus massivement abstenus ? Evidemment non. Le retour dans le jeu politique de ces millions d’électeurs potentiels ne devrait rien changer au sort scellé de Papy Wade et de son système.

La messe est dite. A moins de recourir à des fraudes massives, le président Abdoulaye Wade devra arrêter son règne ici. Conscient des violences que risque de provoquer cette option et une victoire volée, le Vieux devrait encore une fois la jouer à la loyale. Il a en tout cas déjà démontré, le 23 juin 2011 en retirant son projet controversé de révision constitutionnelle, que quand son pays est près de sombrer dans la violence par sa faute, il sait revenir à la raison. La voilà, la dernière porte honorable de sortie. Salut, Papy Wade !

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