Qu’est-ce qui fait courir après les valeurs au Bénin ?

Une conférence présentée le jeudi 12 avril 2012 aux membres de la Cellule des femmes de l’Union des professionnelles des médias (CFU) et leurs confrères. La refondation est elle une propagande, un slogan de plus après le changement ? Pourquoi le président Boni Yayi a-t-il changé de concept après le changement ? Telles étaient les questions auxquelles devrait répondre le conférencier P.K.

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«  Si le changement visait la rupture d’avec les mauvaises pratiques de gouvernance et le changement de mentalité des populations et s’est beaucoup plus adressé au sommet qu’à la base, c’est-à-dire plus à l’élite qu’au vrai peuple (les larges marges laborieuses du temps de la révolution, à mon avis),la refondation est née pour impulser un véritable changement au sein de la population, selon le conférencier. P. Koukpaki pense qu’il faut un retour collectif aux valeurs morales et éthiques pour bien bâtir la fondation du Bénin. Qui dit mieux !
« Pour réussir la marche du Bénin vers la prospérité, la jeunesse doit retourner aux valeurs fondamentales ». Une causerie débat a eu lieu ce même jour au siège de l’Institut des Droits de l’Homme et de la promotion de la démocratie autour de ce thème. C’était l’occasion pour le conférencier Jacques Adandé de stigmatiser les pratiques, la gouvernance et les comportements qui handicapent la marche vers le développement et la consolidation de la démocratie. Une rupture avec les valeurs du Dahomey d’hier qui interpelle la jeunesse mais aussi les ainés.
De mon observatoire, je constate avec beaucoup d’interrogations et de points de suspension que l’éthique et les valeurs ont refait surface dans les débats au quotidien, et j’entends dire autour de moi… Pourvu que ça dure. Notre mode de gestion de perpétuel recommencement a fini par lasser plus d’un. A qui la faute ?
Le gouvernement a réalisé une Charte nationale pour la gouvernance du développement du Bénin qui repose sur des valeurs fondamentales telles que : amour, préservation de la vie, sens élevé de la responsabilité, abnégation, audace, travail, dignité, excellence, fraternité, intégrité, justice, liberté, paix, solidarité, vérité. On pourrait continuer la liste ;  honnêteté, respect de l’autre, respect de l’ainé, respect de soi, respect de la parole donnée, rigueur au travail, conscience professionnelle… Chacun se retrouve quelque part, car de tout temps, notre pays a toujours possédé et cultivé des valeurs quoi sont considérées comme des repères communs, légitimes et donc acceptés par tous, comme base de l’exercice à la citoyenneté.

Le modèle par l’exemple

Cette éducation à la citoyenneté, passe par l’école, la famille, les médias et la société toute entière. Chacun et surtout les citoyens les plus en vue doivent servir au peuple des valeurs à travers des comportements exemplaires. En effet, la gouvernance par l’exemple qui concerne non seulement le gouvernement et son chef, mais tous ceux qui, à quelque niveau de décision qu’ils se trouvent, doivent mettre en pratique les valeurs qu’ils prônent à tue tête comme des incantations. Le modèle par l’exemple est ce qu’il y a de meilleur ; il enlève le doute chez l’incrédule qui ne croit plus en rien, qu’on lui parle de refondation après le changement ou un autre mode de gouvernance, et chez le sceptique qui hausse les épaules en déclarant : oh ! Encore du bavardage ! Tout ceci passera et on attendra la prochaine trouvaille.

Il faut noter que le Bénin est une terre d’éternel recommencement. Pourquoi refuse-t-on de lier l’ancienne corde à la nouvelle ? Si j’ai décidé d’écrire cet article, c’est pour répondre à tous ceux là qui m’interpellent sur ce que sont devenues les émissions éducatives sur la citoyenneté, intitulé « Par ci par là, vivre en bon citoyen ». Jamais je n’avais imaginé l’audience et l’impact de cette émission sur nos populations. Pas plus tard que jeudi dernier, lors d’un atelier, un participant en entendant mon nom s’écria : « Merci Mme Fassinou, pour toutes ces belles émissions éducatives que vous nous servez sur l’Ortb ». Et un autre de s’écrier : « oh ! Mais tu es parti du Bénin ça fait un moment apparemment ? Cette émission a été supprimée sur la chaîne nationale, ça fait un bail… ». « Et c’est bien dommage ! renchérirent quelques participants.
Combien de fois ces propos ont été énoncés par ci par là, par des personnes que je ne connais de nulle part, et qui me reconnaissent au son de ma voix ou après que j’ai décliné mon identité. Je me souviens encore de certains témoignages après les fêtes de fin d’année, il y a quelques temps de cela. Des témoignages très sincères de personnes qui n’avaient pas investi dans les boissons alcoolisées et autres spiritueux, tout simplement par ce qu’ils avaient retenu la leçon diffusée par cette émission qui s’insurgeait contre le gaspillage durant les fêtes.

Emission éducative?

« Par ci par là » contribuait énormément à l’éducation citoyenne pour une acquisition des valeurs fondamentales, tout au long de la vie de nos citoyens. Qui a pris sur lui de supprimer pareille émission ? Pour la remplacer par quoi ? Beaucoup d’enseignants s’en servaient pour illustrer leur cours d’éducation civique. Où sont passées nos émissions? m’interpelle-t-on à-tue-tete. L’animateur principal Mr Dongbehounde Justin a fait valoir ses droits à la retraite. Mais est il mort ? Et pourquoi ne pas renouveler les textes si ceux qui existent sont dépassés. Vous avez dit dépassés ! Est-ce qu’une valeur peut être dépassée ? Les rédacteurs nombreux sont encore là et ne demandent qu’à continuer le travail gratuitement, comme nous le faisions par le passé. Personnellement, j’avais toujours offert mon savoir faire sans rien attendre en retour. Je payais ainsi ma dette à ce pays qui m’a tout donné ; ma contribution à l’éducation civique de mon peuple, à l’édification d’une société qui cultive en permanence des valeurs qui devraient lui servir de boussole. Afin qu’elle ne soit pas rongée de l’intérieur par des contrevaleurs, des maux qui in fine la conduiront à sa perte. C’est dire que les valeurs sont une denrée impérissable, permanente et qu’il faut une veille citoyenne, des gardiens du temple, afin que chaque jour que Dieu fait, elles soient au menu du jour dans nos maisons, à l’école, dans nos marchés, et services… dans nos rues. Partout où l’homme évolue et a besoin d’un bréviaire, un guide pour conduire ses pas. 

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Peut-on arguer du fait que ces émissions étaient dépassées ? Les valeurs sont des denrées impérissables et tous les problèmes que nous abordions là dedans demeurent d’actualité. Chaque jour, avant de se mettre en route pour son travail, c’est du moins ce qui m’a été rapporté, une enseignante prenait le temps d’écouter l’émission du jour. « J’aimais surtout les vôtres, tellement vous parliez de nos réalités africaines, surtout béninoises». Et pourquoi a-t-on rangé les bandes au placard, comme a été rangé dans les tiroirs du MRrai ce document sur « l’Education à la citoyenneté avec un accent particulier sur la lutte contre la corruption », document réalisé par un comité d’enseignants du secondaire et du supérieur dont je faisais partie en 2008? C’est à l’issue de la première édition de la journée nationale de lutte contre la corruption que le ministère en rendant compte des conclusions au MRAI de la dite journée a suggéré au gouvernement la prise en compte de l’éducation à la citoyenneté avec un accent particulier sur la lutte contre la corruption dans les programmes d’éducation scolaire(confère relevé n°13 des décisions du conseil des ministres du 28 mars 2007). Une très bonne initiative, si on sait que si nous autres adultes sommes « des cabris morts », au moins la jeune génération, en pleine possession de toutes ses facultés d’acquisition de valeurs positives saura donner une nouvelle inclinaison à la courbe sociétale du Bénin. Nos enfants ne demandent qu’à absorber, consommer tout ce que nous leur offrons de bon, de beau et de grand pour continuer l’œuvre de développement du pays. Qu’est devenu donc ce précieux document rédigé à l’intention de nos apprenants? Eternel recommencement ! L’administration, n’est-ce pas une continuité ?

Et pourtant, nous devons vaincre la fatalité. Pour le bonheur de notre peuple. Pour un avenir serein des générations futures, inculquons-leur les valeurs par l’exemple. Ils seront plus séduits, plus convaincus, plus motivés que par de beaux discours, discours d’un temps, d’une époque, d’une mode. Les valeurs n’ont pas d’époque, ni de mode. Les valeurs sont éternelles. Et nous devons les consommer sans modération. Pour réussir chez nous à présenter des modèles par l’exemple ; à nous-mêmes, à notre jeunesse, à notre peuple.

Adélaïde Fassinou
Allagbada
Prof de Lettres-Ecrivain
CT à l’Emploi des femmes au MCMEJF

Dans l’Autre Quotidien n°1880 du vendredi 13 avril 2012 on peut lire :
« Concept de la Refondation selon Pascal Koupaki. Reconstruire un modèle social basé sur les valeurs éthiques ».

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