Bénin : le diagnostic qui sauve

Qui sait diagnostiquer le mal dont il souffre s’assure d’être sur la voie de la guérison. La vie publique, chez nous, au Bénin, souffrent de trois maux majeurs, parmi des dizaines d’autres.

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 Nous avons le devoir de les identifier. Nous avons intérêt à les circonscrire. 

 Sinon, nous serons et resterons des chasseurs pris au piège, perdus dans une jungle, par nuit noire.

Suite à une plongée dans les profondeurs de notre administration, nous avons fait remonter à la surface un gros filet de maux et de tares. Les uns et les autres pèsent d’un poids lourd sur l’action publique ainsi décrédibilisée. Les uns et les autres balafrent notre administration publique restée le refuge des pécheurs, si ce n’est la caverne d’Ali Baba.

De tous les maux qui affectent notre administration et qui plombent l’action publique, concentrons-nous sur au moins trois. Ils forment le trio infernal sur lequel le Bénin doit garder les yeux ouverts. S’il ne veut pas voir ses efforts de développement se perdre, comme les eaux d’un fleuve, dans l’immensité océane. Quels sont donc ces trois maux ?

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Il se trouve, d’abord, que par démagogie ou par manque de courage, nous ne savons pas prendre des décisions, a priori impopulaires, mais que nous estimons pourtant justes et salutaires. Il y a, ensuite, que nous ne savons pas démissionner quand il le faut. Nous ne savons pas rendre notre tablier quand les circonstances l’exigent de nous. Un déficit du sens des responsabilités ? Un rapport plutôt douteux à l’éthique et à la morale ? Il y a, enfin, que nous ignorons que le service public, c’est d’abord le service des autres. Un service sans contre partie que la satisfaction du bénéficiaire du service, loin de toute intention de se laisser corrompre ou de toute volonté de chercher à escroquer.

Une décision qui pourrait être qualifiée d’impopulaire, c’est bien la libération de la berge lagunaire. Une action courageuse et courageusement engagée par le ministre de l’Environnement. Une polémique, depuis, a fait jour. Chacun y va de son commentaire. Nous sommes en démocratie. Le débat est nécessaire. Mais recadrons- le. Des hommes et des femmes se sont installés depuis longtemps sur un site. Aucun acte légal n’a eu à le leur affecter, n’a eu à leur en donner la jouissance. Il s’agit d’une occupation à la fois illégale et indue. Voilà la double faute.

Alors, avant de défendre l’indéfendable, on aurait été bien inspiré si l’on s’était préoccupé de connaître le coût de cette occupation illégale et anarchique. En termes d’hygiène et de salubrité, sur la santé et le bien être des hommes, des femmes et des enfants ainsi condamnés à vivre l’enfer au quotidien. Dans un pays qui ambitionne d’être un Etat de droit, il vaudra toujours mieux que les autorités perdent quelques voix ou perdent carrément une élection plutôt que de différer des actions salutaires pour leur communauté.

La démission. Parlons-en. Ceux qui estiment qu’ils ont eu tant à grenouiller pour obtenir et pour tenir une position avantageuse, ne sont prêts, pour rien au monde, à lâcher celle-ci. Ils vous le diront : la démission, c’est pour les Blancs, c’est une pratique de Blancs. Alors, le mot d’ordre est clair : j’y suis, j’y reste contre vents et marées, quoi qu’il en soit et quoi qu’il en coûte. Mettre sa démission dans la balance de ses responsabilités, par principe, sur l’honneur, par devoir moral, c’est quelque chose que nous ne connaissons pas. Ou si peu. On comprend, de ce fait, pourquoi nous nous dépêchons de détourner, de maquiller en propriété privée toute parcelle du patrimoine public dont on nous confie la gestion.

Enfin le service. C’est le sens premier de l’administration publique. Les Anglo-Saxons l’ont bien et mieux compris que les Latins. Ils désignent, en effet, le fonctionnaire par l’appellation hautement éloquente et significative de « Civil servants ». Ce qui, littéralement, veut dire des serviteurs civils. La notion de service qui affleure dans la conception anglo-saxonne de « Civil servants » rapproche de l’idéal de service qu’appelle l’administration publique. Ce n’est point le cas du fonctionnaire. Un agent de l’Etat qui fonctionne, cela ne veut rien dire, cela ne signifie rien. Voilà l’héritage que nous avons à assumer intelligemment. Un service rendu est comparable à une connaissance acquise. Celui qui la donne tout comme celui qui en bénéficie s’enrichissent mutuellement d’une saine complicité entendue. C’est ce qui a fait dire aux sages bambara du Mali : « La meilleure des connaissances est celle qui mène l’homme vers les autres hommes ».

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