A la faveur d’une conférence de presse hier, mardi 12 mai 2012, à l’Institut français du Bénin (Ifb), le célèbre écrivain franco-congolais Alain Mabanckou a expliqué les objectifs de son séjour au Bénin.
Alain Mabanckou est au Bénin depuis le lundi. L’écrivain franco-congolais y est revenu neuf ans après une première visit-éclair. Il y est pour des raisons précises. Lesquelles, il a dévoilé aux médias locaux à la faveur d’une conférence de presse qu’il a donnée dans la matinée de ce mardi 12 mai 2012 à l’Institut français du Bénin (Ifb), site de Cotonou. Il est accompagné de son confrère et ami béninois, Florent Couao-Zotti.
Alain Mabanckou est au Bénin parce que son passage en 2003 lui a laissé de bons souvenirs. Il avait donc en projet de revenir «voir comment le cœur de ce quartier latin de l’Afrique continue de battre», à l’en croire. Un quartier de forte potentialités culturelles. Un quartier toujours présent dans ses œuvres. Quelque part, sur les pages de ses livres, toujours un pêcheur béninois qui se promène avec son hameçon ou son filet. L’écrivain a donc saisi l’invitation de l’Ambassade de France près le Bénin et de l’Ifb pour réaliser ce projet.
Alain mabanckou est aussi au Bénin pour rencontrer ses jeunes confrères béninois et les acteurs de la littérature béninoise en générale. Ceci dans l’optique d’élargir ses relations avec ceux-ci. «Je viens aussi peaufiner cette relation avec les écrivains de dedans» a-t-il expliqué. Longtemps, il est resté dans une proximité imaginaire avec certains écrivains béninois et critiques littéraires.
«Il est au Bénin pour parler de la littérature et de la culture en général» informe Florent Couao-Zotti. Ceci, à travers des rencontres dans plusieurs villes du Bénin. Déjà ce mercredi, dans la matinée, il sera au département des lettres modernes à l’Université d’Abomey-Calavi. Le soir, la soirée sera consacrée à une séance de dédicace à partir de 18h30 à la librairie Buffalo de Cotonou. Jeudi et vendredi, l’écrivain va animer deux conférences respectivement à l’Institut Tévoédjrè de Porto-Novo et à l’Ifb.
Littérature africaine : «Il y a une soif qui n’est pas étanchée»
S’il est vrai qu’aujourd’hui, il y a une certaine désaffection à la littérature avec l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui elles, vont très vite alors qu’il faut plus du temps avec la littérature, le lauréat de l’édition 2006 du prix Renaudot pense que les écrivains sont d’une certaine manière, responsable de la situation. Il cite en exemple, des poètes qui écrivent des lignes qu’ils sont seuls capables de déchiffrer, comprendre. Il se demande comment le public peut accepter une œuvre dont l’auteur est le seul détenteur de la clé de compréhension. «Dès qu’une littérature est coupée du quotidien du peuple, elle ne peut pas être appropriée par ce peuple». Le peuple se dit qu’elle n’est pas écrite pour lui. Ce qui, d’après Alain Mabanckou, ne permet pas l’essor d’une telle littérature. «Il faut dire ce qu’on est dans la littérature, et le peuple vient à cette littérature» conseille l’homme devenu aujourd’hui une personne ressource pour la littérature africaine et francophone. De cette analyse, l’enseignant de la littérature francophone à l’Université de Californie-Los Angelos (Ucla), pense qu’il faut cesser de dire qu’en Afrique, on ne lit pas. Plus loin, au lieu de parler d’une désaffection, il préfère plutôt dire «Il y a une soif qui n’est pas étanchée». «C’est qu’il y a des écrivains qui ne connaissent pas leurs lecteurs.»
«La nouvelle génération reste à venir»
Il y a toujours un manque de la présence de la littérature béninoise au plan international même-si la présence de certains écrivains comme Florent Couao-Zotti offre une existence à cette littérature à ce niveau, à en croire Alain Mabanckou. Ceci, explique-t-il, parce qu’il n’y a pas eu cette sorte de relais. Toutefois, il ne perd pas espoir. «La nouvelle génération reste à venir» martèle-t-il. Et il œuvre pour. «Nous sommes dans une démarche pédagogique pour penser que nous aurons d’ici peu, d’autres grands écrivains béninois.» Sa visite au Bénin compte beaucoup pour cette vision afin que comme lui, il y ait d’autres écrivains de la nouvelle génération grâce à qui la littérature africaine va connaître encore plus de visibilité.