Curieux pays qu’est le nôtre où les grandes valeurs universelles sont reniées, bafouées et foulées au pied.
L’honoré est déshonoré, le sacré est désacralisé et le vénéré profané. Les morts sont adulés et portés au pinacle et les vivants battus combattus.
Sowéto est mort comme un bon vilain chien errant dans l’indifférence totale de tous.
Le Cardinal Bernardin GANTIN aurait sûrement préféré voir de son vivant son nom accroché au fronton de l’aéroport international de Cadjèhoun. Triste ! Oui triste et dramatique, d’ailleurs le drame fait partie du quotidien dans le pays.
Un autre drame est en train de se jouer. Un drame qui a tout d’un complot soigneusement préparé sûrement des années durant et exécuté de main de maître par le ministère de la santé depuis maintenant cinq (05) mois. Il s’agit, comme cela se disait en d’autres temps, de liquider définitivement l’un des plus prestigieux joyaux du patrimoine national : notre médecine traditionnelle dont l’éclat, le respect et le prestige sont connus et reconnus dans le monde entier. Le Dahomey d’hier, le Bénin d’aujourd’hui a su s’imposer dans le secteur par son savoir et ses savoirs capitalisés laborieusement et patiemment des années durant. Nous constituons aujourd’hui une référence sûre dans le monde et la confiance qu’on place en nous ne s’est jamais démentie, et nos immenses ressources et potentialités en spiritualité y contribuent pour beaucoup comme en témoignent nos hauts faits dans moult secteurs d’activités.
L’argument béton pour attenter à l’existence et à la vie de cet immense joyau qu’est notre médecine traditionnelle que tout le monde nous envie sont les publicités tapageuses et mensongères que passent certains tradipraticiens sur les radios et les télévisions pour faire connaître leurs produits médicamenteux naturels et autres. Pour remettre de l’ordre dans le secteur et à la demande du Ministère de la Santé, la HAAC a pris la décision numéro n°12-001/Haac du 04 janvier 2012 … portant interdiction temporaire de la publicité en matière de la pharmacopée et de médecine traditionnelle Officiellement selon les explications fournies par le ministère de la santé, il s’agit d’une mesure conservatoire juste le temps de mettre en place un code de bonne conduite pour discipliner les acteurs du secteur. C’est beau, c’est propre, c’est élégant mais il y a un «mais». En fait, nous n’avons rien contre la mesure, mieux nous l’approuvons et sommes même de ceux qui pensent que certains tradipraticiens en font un peu trop. Comment un même produit peut soigner avec succès la tête, les pieds, le tronc, les intestins, les yeux, les oreilles et j’en passe. Force et ordre doivent être à l’Etat. Aucune Autorité digne de ce nom ne peut laisser s’éterniser une pagaille du genre. Mais ce qui nous gêne et que nous reprouvons et dénonçons, c’est que cela fait plus de cinq (05) mois que dure la fameuse mesure conservatoire. Cinq (05) mois pour rédiger un code de bonne conduite, reconnaissons quand même que c’est un peu trop car même en écrivant une (01) ligne par jour, on en serait déjà à plus de cent cinquante (150) lignes. «L’interdiction temporaire» serait-elle devenue «une interdiction temporaire définitive»? Ce n’est qu’une question.
La mesure conservatoire pour remettre les pendules à l’heure est juste, nous ne cesserons jamais de le répéter mais l’application est calamiteuse et à la limite irresponsable parce que rien ne justifie les cinq (05) mois d’interdiction de publicité à nos tradipraticiens. Nous dénonçons cette attitude désinvolte et provocatrice et appelons gentiment le Ministre à remettre les pendules à l’heure cette fois-ci à son niveau parce qu’il y a dans cette affaire manifestement :
- abus de pouvoir ;
- non-respect et non considération de la corporation ;
- inhumanité flagrante pour ne pas dire méchanceté gratuite parce qu’il y a des hommes et des femmes qui ne vivent que de ce secteur d’activité ;
- privation du droit d’information des populations qui n’ont rien fait pour mériter cette censure ;
- improductivité évidente de la pérennisation de la soi-disant interdiction temporaire de publicité parce qu’il y a, c’est une évidence, un manque à gagner difficilement quantifiable pour notre économie.
Et pour terminer, nous voulons demander avec beaucoup de respect à nos dirigeants de cesser de ramer à contre-courant. Au moment où les médicaments de la pharmacie conventionnelle sont inaccessibles aux populations, au moment où le développement durable, l’environnement, l’écologie sont à l’honneur partout dans le monde et à ce moment précis où on est à quelques jours seulement du Sommet de la Terre de Rio (il se tient du 20 au 22 Juin 2012), nous ne pouvons pas comprendre que l’on empêche délibérément des hommes et des femmes de valoriser librement les ressources naturelles du pays pour nous soigner efficacement à moindre coût avec des médicaments naturels fabriqués chez nous. Une simple question de bon sens, d’équité et de souci du développement du pays.
Janvier Zocli
A quand la publication du code pour la levée de l’interdiction?
Janvier 2012-Juin 2012. Déjà 5 mois que le ministère de la santé à travers la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) a mis fin aux publicités dites tapageuses et mensongères que passent certains tradi-praticiens sur les radios et les télévisions du Bénin pour faire connaître leurs produits médicamenteux naturels et autres.
C’est par décision n°12-001/Haac du 04 janvier 2012 portant interdiction temporaire de la publicité en matière de la pharmacopée et de médecine traditionnelle que l’interdiction a été notifiée officiellement aux acteurs du secteur. Elle est intervenue afin de mettre fin à ce que d’aucuns ont appelé « la pagaille » qui régnait dans le secteur. Allusion à l’absence de régulation du secteur qui fait que n’importe quel bonimenteur peut se lever et vanter sur les médias l’efficacité supposée de tel ou tel produit. Mais allusion surtout aux dangers qui guettent les consommateurs des produits de la pharmacopée dont personne ne connaît les effets indésirables, qui laissent des séquelles parfois irréversibles sur la santé des populations.
La place de la médecine traditionnelle
Cela dit, l’intention de réglementer la publicité dans un secteur encore si peu connu est louable mais force est de reconnaître qu’il y a urgence .Parce que quoi qu’on dise, la publicité dite sauvage n’est pas vraiment le problème. Le problème c’est la place qu’occupe la médecine traditionnelle dans la résolution des problèmes de santé dans notre pays. Et là les statistiques les plus fiables établissent de manière irréfutable que c’est plus de 80% de nos populations qui y ont recours, avec ou sans publicité, pour des raisons évidentes qui tiennent à la faiblesse du pouvoir d’achat pour faire face au coût exorbitant des médicaments de la médecine moderne. Le paradoxe c’est que les autorités en charge de la santé reconnaissent le phénomène et dans les discours, l’accent est mis sur la nécessité d’une cohabitation des deux médecines mais la réalité est tout autre. C’est la politique de l’autruche. On sait que les populations n’ont pas les moyens de supporter les charges découlant de la fréquentation des hôpitaux et qu’elles ont plutôt recours à la médecine traditionnelle tant décriée par les médecins modernes, mais on préfère ne rien voir pour se donner bonne conscience. Certains pays comme le Mali, le Sénégal, le Ghana pour ne citer que ceux-là ont fait le choix de la cohabitation des deux médecines et ont surtout posé des actes dans le sens de les rendre complémentaires sur le terrain. Ici au Bénin, on est toujours au stade des discours et des pétitions de principe.
Des chercheurs modernes
Or, il existe dans notre pays une nouvelle race de tradi- praticiens bien connus issus du milieu traditionnel comme du monde universitaire qui essaient d‘associer avec succès la connaissance de notre pharmacopée avec les méthodes rationnelles d’extraction des principes actifs de nos plantes. Certains d’entre eux sont reconnus ailleurs en Afrique et sont sollicités pour l’efficacité de leurs produits dans la guérison des maladies où la médecine moderne peine à trouver des remèdes efficaces. De sources proches du ministère et des acteurs de la médecine traditionnelle, des séances de réunions seraient initiées par le ministère de la santé pour l’adoption d’une feuille de route et d’un code de bonne conduite en vue de la levée de cette interdiction. Mais force est de constater que cette interdiction temporaire, selon la décision prise par la Haac en accord avec le ministère de la santé, est en train d’être érigée en une interdiction définitive qui frappe indifféremment les vrais guérisseurs et les charlatans. Du coup, c’est le secteur de la médecine traditionnelle béninoise qui est en train d’être fermée, soutiennent plusieurs acteurs du milieu.
Il convient de reconnaitre qu’en décidant d’assainir le secteur, le ministre de la santé est dans ses rôles. Mais fermer la filière serait un péché contre la nation béninoise tout entière. Quoi qu’on dise, il existe des professionnels de cette médecine reconnus par ce même ministère à qui des autorisations en bonne et due forme ont été délivrées. Malheureusement pour la médecine traditionnelle béninoise, tout le monde est mis, pour ainsi dire, dans le même sac. Les meilleurs payent ainsi les frais de l’irresponsabilité des amateurs et autres bonimenteurs qui foisonnent dans le milieu. Pour la relance de la médecine traditionnelle béninoise, il est urgent d’accélérer le processus de règlementation pour que vive ce noble patrimoine béninois.
Blaise Ahouansè