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Colloque de l’association Béninoise de droit constitutionnel sur la constitution du Benin

(Autour de notre dame du 11 décembre 1990!) Les 08, 09 et 10 août prochains, Cotonou accueille une grand’messe intellectuelle. Venus d’Afrique et d’Outre Atlantique, les plus grands spécialistes du droit constitutionnel croiseront leurs lectures de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990. 

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Occasion de joutes intellectuelles. Mais aussi occasion-hommage au Professeur Maurice Ahanhanzo-Glèlè,et à son œuvre, inspirateur de notre Constitution et père de toute une génération de juristes africains.

Cotonou, la Constitutionnelle!

La capitale économique du Bénin se jouera les belles villes du Constitutionnalisme africain les 8, 9 et 10 août 2012. Soyons juste, Cotonou ne se jouera pas. Elle sera, en vérité, le lieu d’attraction des plus grands penseurs, théoriciens et praticiens du droit constitutionnel d’Afrique et d’ailleurs. Entendons résonner les noms attendus. Les professeurs : Jean du Bois de Gaudusson de France, Francis Wodié, Martin Bléou, Djedjro Francisco Meledje de la Côte d’Ivoire, Théodore Holo du Bénin (membre de la Cour constitutionnelle), Kofi Ahadzi Nonou du Togo, Ismaïla Madior Fall et Alioune Sall du Sénégal, Augustin Loada du Burkina Faso, Luc Sindjoun du Cameroun, André Mbata Mangu d’Afrique du Sud et de la RD Congo. Les Présidents et membres des juridictions constitutionnelles : Encore Francis Wodié, Président du Conseil constitutionnel de la Côte d’Ivoire, Robert Dossou, Président de la Cour constitutionnelle du Bénin, Amadi Tamba Camara, Président de la Cour constitutionnelle du Mali, Albert Dè Milogo, Président du Conseil constitutionnel du Burkina Faso, le juge constitutionnel allemand Andreas Paulus. La litanie des Saints constitutionnels est loin d’être exhaustive… Mais qu’est ce qui peut réussir à faire venir chez nous les grands des plus grands pendant trois jours ?

Notre Dame du 11 décembre 1990 ! Cette belle et grande, aujourd’hui majeure (21 ans), sortie des entrailles des dix jours qui ont changé, du 19 au 28 février 1990, à l’hôtel PLM Alédjo, le Bénin. Aujourd’hui, plus que jamais, elle vogue au gré du vent, faisant – qui sait ? – jalousie et  envie de la part de ses amies, et nervosité et agacement de la part de ses courtisans. Jalousie et envie de ses amies togolaise, centrafricaine, ivoirienne, nigérienne atteintes, tournées et retournées, faites, surfaites, refaites et défaites sous toutes les coutures dans le lit de la préférence du Prince et de ses acolytes ! Et de celle malienne, voire ! Sa plus sérieuse concurrente sur le terrain de la virginité. Menée a hue et a dia. Par Kati. Par tombouctou. Par Gao… dans le chaos.

Et pourtant, Notre Dame du 11 décembre 1990 refuse de se faire dépuceler. L’on ne sait, par quels miracles, elle réussit à résister à la libido révisionniste des acteurs politiques. Même les plus habiles don juan d’entre eux n’ont pu la faire choir et l’attoucher. Quels sont les secrets alors de son pucelage ? Ses vertus qui lui ont fait tenir deux décennies durant la démocratie béninoise ? Ses qualités qui font d’elle une constitution modèle ?

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La grand’messe sera présidée par un célébrant principal, le Professeur Francis Wodié, et des concélébrants, chacun dirigeant un acte. Professeur Francis Wodié, acte n°1 : Aux origines de la Constitution du 11 décembre 1990. Professeur Jean du Bois de Gaudusson, acte n°2 : Le modèle constitutionnel en question. Professeur Luc Sindjoun, acte n°3 : Constitution et institutions politiques. Professeur Théodore Holo, acte n°4 : Constitution et élections pluralistes. Robert Dossou, acte n°5 : Constitution et droit comparé.  Professeur Demba Sy, acte n° 6 : Justice constitutionnelle et droits fondamentaux. Professeur Stéphane Doumbé-Billé, acte n°7 : Constitution, Etat de droit et Démocratie. Professeur Koffi Ahadzi-Nonou, acte n°8 : L’audace du juge constitutionnel béninois en question. Professeur Augustin Loada, acte n°9, table ronde spéciale : Constitutions et résolutions des crises et conflits en Afrique. Abraham Zinzindohoué, acte n°9: Constitution et justice. A l’intérieur de chaque acte, il y a une panoplie de communications d’éminents constitutionnalistes et politistes, des jeunes et des moins jeunes.

On le voit bien, Cotonou est aux croisements des idées. L’espace de trois jours, elle sera l’agora où les hommes et femmes de la Cité viendront écouter, pour le bien de celle-ci, les personnes doctes. Elle sera donc l’espace du remue ménage et du remue méninge. On s’imagine bien qu’à ce genre de célébrations, les esprits subversifs et les polémistes de talent et de bonne foi, à la Joseph Djogbénou, ne manqueront pas à l’appel. Certainement, poseront –ils la question : « Oui, les vertus et la singularité de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990. Et après ? » Peut-être y en aura-t-il pour démontrer qu’il y a longtemps que Notre Dame du 11 décembre 1990 a perdu sa pucellité. Que, comme à l’habitude des dames le plus souvent, Notre Dame, a fini par céder, sans jamais nous l’avouer, à son éternel protecteur, le juge constitutionnel béninois en l’occurrence. Il l’a possiblement révisée, par une audace jurisprudentielle qui sera en question, se substituant de temps en temps au constituant. Il devient ainsi non plus un juge constitutionnel mais un juge constituant. Encore les senteurs et signes de la subversion, de la polémique et de la suspicion heureuses : « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : modèle de Constitution ou Constitution modèle ? », question d’Ismaïla Madior Fall ; « Les révisions jurisprudentielles de la Constitution », postulat de Frédéric Joël Aïvo ; « La Cour constitutionnelle béninoise en fait-elle un peu trop ? » interrogation de Dandi Gnamou faisant écho à celle de Philippe Blacher en d’autres temps et en d’autres lieux.

Mais en tout cas, malgré ces défauts, véniels ou profonds, sa virginité à elle volée depuis, Notre Dame du 11 décembre 1990, telle la femme de César, ne saurait être accusée. Elle demeure une grande et belle !  Alors, si, comme il est de coutume, derrière «un grand homme se cache une grande femme», il peut en aller de même inversément,–l’élection de Nkosazana Dlamini-Zuma à la Présidence de la Commission de l’Union africaine en est l’illustration – derrière une grande femme, comme celle du 11 décembre 1990, se cache un grand homme.

Notre «Vedel» à nous!

Le Professeur Maurice Ahanhanzo-Glèlè. Agrégé de droit public et de science politique en France en 1974, le premier  dahoméen et béninois agrégé en droit, et l’un des tout premiers africains. Professeur déjà. Nombre d’agrégés des premières heures en droit public et science politique d’Afrique francophone sont passés par ses fourches caudines. C’est vraiment le Doyen. En 1980 déjà, avant le concours du CAMES, il était membre du jury d’agrégation que la France organise au profit de la Côte d’Ivoire. Et quand le CAMES ouvre le premier concours en 1983, Maurice Ahanhanzo Glèlè est membre du jury. Il en sera le président au 3ème, en 1987. Professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en France dès 1975, le vent et l’odeur de l’Afrique ne le quittent pas. Il revient sur le continent souvent en tant que professeur invité et conférencier dans plusieurs universités dont l’Université de Dakar, l’Université nationale du Bénin (aujourd’hui Université d’Abomey-Calavi) et l’Académie Internationale de Droit Constitutionnel de Tunis. Il en sera le Vice-Président. Professeur toujours. Fonctionnaire international aussi. A l’UNESCO, Directeur des études et politiques culturelles, conseiller juridique. Puis confectionneur de la Constitution dahoméenne de 1968. Et surtout de celle qui a fait florès partout en Afrique post-1989 : la Constitution du 11 décembre 1990. Vouloir dire qu’il fut membre du Haut Conseil de la République au sortir de la Conférence nationale de février 1990 ; qu’il fut membre de la 1ère Cour constitutionnelle du Bénin ; qu’il fut le 1er président de la Haute Cour de Justice du Bénin. Vouloir tenter une bibliographie du Professeur Glèlè, ou plus généralement sa bio-bibliographie, c’est vouloir remplir les tonneaux de Danaïde. Et c’est trop prétentieux.

La figure de Glèlè qui saisit le jeune béninois ces temps-ci, est celle du Patriarche-professeur, président de la Commission de relecture de la Constitution, déçu du sort réservé aux travaux de la dite commission et qui, voyant l’allure floue de la révision de Notre Dame, empoigne son bâton de Sage pour dire son mot. Afin que l’on ne dise plus tard : « il n’y avait personne par ici ». Professeur toujours. A l’Institut des Droits de l’Homme et de la Démocratie qui connaît une revitalisation inattendue ces temps derniers face à la vie politique du Bénin. Il organise avec les voix les plus autorisées et les plus exercées du pays des conférences débat mensuelles libres, publiées sur l’Etat du Bénin. Voilà notre « Vedel » à nous. Professeur, intellectuel, acteur et spectateur engagé jusqu’au bout. Voilà celui à qui l’Association Béninoise de Droit Constitutionnel, ses partenaires et la Communauté universitaire africaine souhaitent rendre la fière chandelle à Cotonou les 8, 9 et 10 août prochains. C’est au Professeur Wodié qu’il reviendra l’honneur et la charge de l’hommage, au petit matin du 8 août, en présence du Chef de l’Etat béninois, Boni Yayi, des présidents des Institutions de la République, du corps diplomatique accrédité au Bénin et des anonymes. L’homme à l’honneur, les invités, les circonstances exigent une préparation minutieuse.

A chacun, sa part de tâche… Et tout sera accompli!

A Abomey-Calavi, là bas, leur petit, discret et commun bureau fait corps à l’amphi de la Faculté de Droit et de Science politique. Les professeurs Frédéric Joël Aïvo et Joseph Djogbénou y construisent, pierre à pierre, la Tour du Colloque Glèlè. Entre les pleurs du téléphone, les sourires que suggère une bonne nouvelle provenant d’un partenaire, et une tasse de café qui réchauffe les cœurs… La porte produit son indocile et léger bruit… Quand elle s’ouvre, voici les boutes-en-train : Simon Dako, la mémoire de l’Association ; Joël Adéloui, l’argentier ; Gilles Badet, le veilleur… Voici les doctorants. Et voici les jeunes étudiants des 1ère et 2ème années de droit, rédacteurs du Journal Le Juriste. Chacun ahane sur sa part de la tâche à accomplir. Et quand pour la dernière fois, la petite indocile se referme, il est 15 ou 16 heures. La journée s’achève. A Calavi, bien sûr. Car déjà, Cotonou appelle. Le protocole d’Etat. Les partenaires techniques et financiers. La logistique et le transport.

Les signes vers … demain!

A ce colloque, l’on n’aura certainement pas le temps de brosser les autres traits saillants de la figure de Maurice Ahanhanzo-Glèlè. L’historien de son éternel royaume aimé, le Danxomè. L’homme à sa manière universel, l’hybride fon-yorouba, le chef de collectivité, Dah Kêhokpè-Affomassê Mêtogbèdji, toujours habillé à l’aboméenne royale et princière. Et le catholique fervent et pratiquant. Ce pastiche de soi de Ahanhanzo-Glèlè occupe t-il une place dans son constructivisme juridique ? Laquelle? Maurice Ahanhanzo-Glèlè et son œuvre sont un excellent prétexte pour des recherches pluri, inter et transdisciplinaires faisant croiser historiens, socio-anthropologues, philosophes, linguistes et bien entendu juristes et politistes.

Les mélanges viendront un jour, en l’honneur du patriarche Glèlè, notre Vedel à nous ! Si les actes de ce colloque n’en tiennent déjà pas lieu minimalement. Quand les rideaux descendront sur ces assises le 10 août 2012, il restera un fil d’Ariane pour nous les Béninois. Et l’observateur pourra être frappé par une image. Maurice Ahanhanzo-Glèlè, notre Vedel, a encadré Théodore Holo, notre « Favoreu »  – il n’y a pas de Vedel sans Favoreu –  qui devient agrégé en 1985. Holo, à son tour, a forgé d’autres enseignants devenus agrégés. Parmi eux, Frédéric Joël Aïvo, à la dernière session du CAMES (novembre 2011), le Président de l’Association organisatrice de ces retrouvailles intellectuelles. Et déjà, le nouvel agrégé compte, parmi les plus jeunes communicateurs du colloque, un de ses doctorants, Pierre Togbé. De Glèlè à Togbé, la chaîne n’est pas rompue ! Et c’est signe de quelque chose… De bien !

Le Professeur Glèlè, ne le sait peut-être pas, toute sa vie aura été habitée et guidée par ce que l’un de ses meilleurs amis, le Père Alphonse Quenum, appelle « la mystique du semeur ». Et aujourd’hui, la moisson est abondante et valeureuse. Par sa vie, ce colloque le démontre à suffisance, Maurice Ahanhanzo-Glèlè nous laisse découvrir en lui ce que doit être un véritable professeur d’Université. Un penseur et un passeur…

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