Il faudrait qu’on s’habitue à ce nom et surtout, qu’on apprenne à le prononcer correctement, sans buter sur les syllabes, en arguant de la difficulté à articuler un nom étranger.
Parce que avec elle, ne serait-que par le nom qui sonne fort, l’Afrique et l’Union africaine ont pris un tournant et plus rien ne devrait être comme avant. Une femme de caractère qui porte un nom africain pour une politique plus centrée sur les intérêts des Africains. Car jusque-là on a parlé de trois grandes premières à propos de l’élection de Mme Nkosazana Dlamini Zuma, sans insister sur la plus importante. La première femme à accéder au poste de président de commission, oui ! Cela plaira aux féministes d’ici et d’ailleurs. La première anglophone oui ! Pour un poste qui a presque toujours été occupé par des francophones depuis la défunte Oua , à l’exception du Tanzanien Ahmed Salim et du Nigérian Peter Onu dont il sera question plus loin.. Mais on n’a pas encore suffisamment insisté sur le fait qu’elle est la première ressortissante d’un Etat puissant. Car, jusque- là, il y avait une sorte de consensus mou autour d’une idée non écrite de laisser les petits pays-les plus nombreux- occuper le poste de premier plan, quitte à les faire doubler par des ressortissants d’un Etat puissant. Il a en été ainsi au moment où le Nigérian Peter Onu a assumé la fonction de 1er secrétaire général adjoint de la défunte Oua, en tandem avec l’Algérien Saïd Djinnit. Peter Onu n’est devenu secrétaire général que par interim, pour assurer la transition , après le mandat controversé du Togolais Edem Kodjo. C’est ce consensus mou que l’Afrique du Sud, vient de briser à travers l’élection au forceps (la campagne a duré six bons mois) de la dame Nkosazana Dlamini Zuma.
Désormais, plus rien ne s’opposera à la candidature d’un ressortissant du Nigeria, de l’Algérie, de la Lybie, ou de l’Egypte, les grands contributeurs de l’Ua. Et Mme Nkosazana Zuma ne l’a pas caché le jour même de son élection, quand elle a dit, sans prendre des gants , ne pas comprendre comment on peut en appeler à des pays puissants de contribuer plus que les autres, sans leur donner le droit de diriger. Le monde a évolué depuis la fin de la guerre froide et les pays qui ont le vent en poupe aujourd’hui sont les pays émergents. L’Afrique du sud qui est déjà un membre des Bricks et qui aspire à occuper une place de membre permanent du conseil de sécurité ne peut plus se contenter de jouer les seconds rôles sur notre continent. Il a tous les atouts d’une puissance moyenne à l’échelle de l’Afrique et pourrait être la locomotive du continent à condition qu’elle cesse de regarder les autres pays de haut et mette une sourdine aux tendances xénophobes de sa population. Comme les Etats unis en Amérique et l’Allemagne en Europe. Notre continent longtemps méprisé, dominé par les puissances impérialistes qui lui imposent leurs diktats a sa locomotive. L’Afrique « retrouve sa crédibilité », comme l’a écrit l’écrivaine Adélaïde Allagbada dans nos colonnes hier. L’Ua dirigée par Mme Nkosazana Zuma ne serait plus totalement la même que celle que dirigeait mollement Jean Ping dont l’élection avait été parrainée par Bongo –père, super gourou de la Françafrique,s’il en fut.
Cela dit, que peut réellement Mme Zuma dans une Afrique dont les dirigeants sont tiraillés entre les aspirations au développement de leurs populations et la volonté des puissances impérialistes de nous maintenir dans les liens de la sujétion? L’Ua , telle qu’elle fonctionne avec des chefs d’Etat jaloux de la prééminence de leur fonction sur celle du président de la commission qu’il considèrent tout au plus comme un secrétaire administratif chargé d’entériner leurs décisions, cette Ua là, est une lourde bureaucratie et surtout un syndicat de chefs d’Etat plus ou moins mal élus défendant tout, sauf les intérêts du continent. Il est à craindre que Mme Nkosazana Zuma n’ait jamais les moyens d’imposer sa politique volontariste autour des intérêts de l’Afrique, à moins de procéder autrement que son bulldozer de président. Il se trouvera toujours des présidents pour soupçonner l’Afrique du sud de visées hégémoniques. Il se trouvera toujours un chef d’Etat pour la remettre à sa place , comme l’a fait sèchement Obasanjo, alors président en exercice de l’Ua à Alpha Oumar Konaré, quand ce dernier avait adopté une ligne de conduite plus ferme à l’égard du Togo, après le coup de force de Faure Gnansingbé ,suite au décès subit de Gnansingbé Père. Konaré avait renoncé à solliciter un second mandat largement à sa portée, parce qu’il a compris que ses anciens pairs ne sont pas prêts à laisser les coudées franches au président de la commission pour agir en leurs lieu et place. Lui d’ordinaire si « tchatcheur » s’est muré depuis lors dans un mutisme qui en dit long sur la frustration qui a été la sienne au regard de l’absence de volonté politique des présidents pour adopter des postions fermes à l’égard de l’Occident impérialiste et surtout pour aller vers l’unité du continent dont a rêvé l’Osageyfo Kwame Nkrumah.
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