Le pari du riz local

Le «Consommons béninois» tient à son compteur une nouvelle recrue : le riz local. Bientôt, si tout se passait bien, si l’action des associations des consommateurs aboutissait, si la volonté politique de l’Etat suivait, les Béninois ne seraient pas peu fiers d’avoir dans leurs assiettes du riz béninois. Ce serait le début d’une révolution. Pourquoi?

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C’est d’abord que le riz est de plus en plus consommé par des franges de plus en plus importantes de nos populations. Cette céréale, dans nos grandes villes notamment, a su  faire très vite son trou à côté du maïs, du mil, du sorgho… C’est ensuite que la forte demande de riz  rencontre une offre satisfaisante avec du riz importé de la Thaïlande, des Etats-Unis, du Pakistan, de l’Inde… etc. C’est enfin que, pour satisfaire cette faim de riz des Béninois, ce sont des devises étrangères, évaluées à des milliards de nos francs, qui sont, chaque fois, mobilisées. On peut le dire, il coûte cher au Bénin et aux Béninois de manger du riz non béninois.

Ainsi, chaque fois qu’un Béninois s’attable pour manger son plat de riz non cultivé au Bénin, il contribue à l’économie d’un pays autre que le sien propre. Il y injecte de l’argent. Il y créé des emplois. On en arrive ainsi à ce paradoxe qui n’est pas loin d’une monstrueuse absurdité : un pays pauvre, de par ses habitudes alimentaires, enrichit un pays riche !

Voilà ce que la consommation du riz local est appelé à corriger. Voilà ce que ce riz doit rectifier au profit du Bénin, au bénéfice des Béninois. De précieuses devises n’iront plus se perdre dans des comptes extérieurs. Elles resteront au pays. Le riz local contribuera à ouvrir et à développer une nouvelle filière agricole. Ce qui occupera des milliers de nos compatriotes. Les Béninois mangeront ce qu’ils produisent. Les producteurs béninois s’enrichiront du fruit de leur travail au Bénin.

Mais, n’allons pas vite en besogne. La partie est loin d’être gagnée. Les habitudes sont des forces. Les habitudes alimentaires en tête. Beaucoup de Béninois mettront du temps avant d’adopter le riz local. Un marché noir de riz étranger n’est pas à exclure. Sans jeu de mots, ce marché noir ne ferait qu’une bouchée du riz local. Les intérêts en jeu étant énormes, chacun doit avoir une conscience aigüe des rapports des forces. L’étranger jouera des coudes pour vendre son riz. C’est légitime. Le Béninois doit promouvoir le Bénin, en consommant béninois. C’est patriotique.

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La promotion du riz local commence dans les champs. Il va falloir résoudre tous les problèmes liés à la production de cette denrée : des producteurs aguerris, formés, informés, équipés, encadrés ; des périmètres suffisants aménagés, des semences et des intrants disponibles, des unités de stockage et de décorticage garantis. Il va falloir, concomitamment, gagner la bataille de la recherche pour avoir les meilleures semences ; la bataille de la productivité, pour produire plus, tout en minimisant divers facteurs de production ; la bataille de la qualité, en privilégiant le service du client-consommateur.

Mais on ne lancera pas le riz local sans se préoccuper, au premier chef, d’élaborer un plan de communication. Il s’agira de concevoir, d’adopter et d’opérationnaliser un ensemble de démarches et d’approches tendant à promouvoir le riz local dans notre pays. On le fera ainsi priser et préférer par diverses cibles identifiées dans la société. On le fera entrer dans les habitudes alimentaires des Béninois. On le fera homologuer comme une nouvelle filière agricole qui génère emplois, revenus et richesses.

Le colonisateur français, pour faire aimer le pain de blé aux nôtres, en a d’abord fait l’aliment de l’élite. La minorité lettrée a alors tôt fait d’oublier les bouillies de ses petits-déjeuners au profit du pain, beurre, café et sucre. Le peuple n’a pas tardé à suivre. C’est une loi : tout le monde, riche ou pauvre, aime les bonnes choses. Voilà comment le pain est devenu un aliment de grande consommation courante. Dans un pays où l’on ne produit le moindre grain de blé.

Dans le même esprit, et s’agissant du riz local, nous pouvons  cibler les jeunes élèves de nos écoles. Les restaurants qui ceinturent nos établissements scolaires feront l’affaire. Avec l’espoir que les enfants nourris au riz local feront des adultes qui ne sauront rien manger d’autre que du riz local.

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