Teriba ou le talent au féminin

Il faut y croire. La prochaine occasion sera la bonne. Le trio musical Teriba qui portait nos couleurs et nos espoirs au Prix Découvertes RFI-France 24, édition 2012,  s’est fait coiffer au poteau par l’artiste musicien namibien Elemotho.

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Le groupe Teriba ne boudera pas sa deuxième place arrachée en phase finale. Dix nominés étaient en compétition.

On peut le dire : la réputation du trio Teriba a  largement dépassé, désormais, nos frontières nationales. Mais qui sont ces trois artistes qui ont failli se hisser et hisser le Bénin sur la plus haute marche du podium continental ? Pour ceux qui ne le sauraient pas, le trio Teriba, c’est trois femmes. Elles ont nom Tatiana, Carine et Zékiath. Elles ont choisi de se mettre dans les liens d’un mariage d’amour et de raison avec la musique. Elles y ont trouvé leur passion de vivre et de faire revivre le patrimoine artistique et culturel de leur pays.

Car qui s’attend à entendre des sonorités consacrées par la mode ou homologuées par la World Music, sera déçu. Le trio Teriba, tout en étant conscient que la musique  est un langage universel, ne milite pas moins pour la diversité des expressions musicales et l’affirmation des identités culturelles des peuples. Sur le mode de notre confrère de RFI, Alain Foca, nul n’a le droit de brider le génie créateur d’un peuple. Car un peuple qui ne libère pas son expression musicale propre, risque de danser sur les rythmes des musiques des autres.

C’est pour que nous nous voyions et que nous nous reconnaissions dans notre propre miroir que le groupe a fait le choix, à chaque fois, de nous entraîner aux sources de nos traditions. Par l’accoutrement sur scène qui affiche les couleurs et les touches propres à un passé remis au jour ou au goût du jour. Avec les instruments de musique qui résonnent et vibrent du caquètement des calebasses, du bourdonnement des gourdes, du jacassement des castagnettes ou du tintement des clochettes. Grâce aux rythmes de nos divers terroirs mélodieusement revisités et harmonieusement habillés d’un chœur a cappella. Et le message jaillit, « d’éclairs et de foudre », des profondeurs de ce bouquet multicolore.

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Le groupe Teriba est, au vrai, un phénomène musical surgit sur la scène culturelle de notre pays. Nous sommes loin d’en saisir la portée, tant sont énormes les potentialités créatrices de ses trois animatrices talentueuses.  L’encombrement de la scène musicale ne permet toujours d’accéder à nos valeurs les plus sûres. Un ciel chargé masque les étoiles. Quelques pépites d’or ne s’offrent au bout des efforts de l’orpailleur qu’après que celui-ci se fut débarrassé d’une masse impressionnante de résidus. Pensons à Diogène. Il cherchait un homme sous le soleil de midi, une lampe à la main. Pour dire que les valeurs sûres sont des valeurs rares. Elles sont à chercher. Et l’on les recherche.

La sortie remarquée du groupe au plan international, à travers le Prix Découvertes RFI-France 24, édition 2012, lui donne une dimension nouvelle. Comme si après avoir convaincu les Béninois à l’intérieur, il doit s’appliquer, à présent, à aller à la conquête de l’Afrique, à la conquête du monde. Sans qu’elles y pensent vraiment, Tatiana, Carine et Zékiath arborent le manteau et s’auréolent des attributs d’ambassadrices du Bénin auprès du vaste monde. Elles auront mission à dire qui  sommes-nous, qui voulons-nous être, avec qui voulons-nous construire un monde de justice, de paix et de fraternité ?

Voilà une facette souvent ignorée ou méconnue de la mission sociale de l’artiste. Point n’est besoin d’être un ambassadeur plénipotentiaire attitré, dûment accrédité et nanti des pouvoirs et des privilèges de l’emploi, pour être une voix qui porte dans les arènes du monde. Point n’est besoin d’avoir fréquenté Harvard, d’être sorti d’Oxford et d’avoir été un produit de la Sorbonne pour être de la cohorte des leaders qui façonnent le visage du monde d’aujourd’hui et de demain.

Qu’on cesse donc de regarder certains de nos talentueux et valeureux artistes comme de pauvres hères. Sans contribution pertinente à l’histoire en train de s’écrire. Sans participation convaincante à l’édification d’un monde meilleur. Le phénomène Teriba est porteur d’une philosophie profonde. Il renouvelle notre regard sur l’art. Il remet la culture à la place qui n’aurait dû jamais cesser d’être la sienne. C’est en cela que l’artiste a toujours été, dans toutes les sociétés humaines, un prophète. Celui ou celle qui bénéficie du privilège divin d’annoncer les temps nouveaux.

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