Tout sauf un cynocéphale!

La police a réalisé un exploit bien saugrenu lundi dernier à Kpankpan, en banlieue de Cotonou. A la place de malfrats et de braqueurs qui essaiment la ville, les agents de police ont brandi un cynocéphale, abattu tel un trophée.

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Les policiers du commissariat de Sègbèya ont brandi le primate abattu après des heures de caprice, devant des populations en liesse et soulagé après des heures de stress et d’angoisse. L’animal avait réussi à s’échapper des cages de son maître pour se taper quelques airs de liberté au cours desquels il a blessé deux individus. Incapables de le ramener à son gîte originel ou d’arrêter ses escapades, les populations se sont résolues à faire appel à la police. Venus sur les lieux, les hommes du  commissaire Sylvain Lima n’ont trouvé autre solution que d’abattre l’animal indélicat. Un agent se positionne sur un toit, vise l’animal. Le premier coup passe à côté. Le deuxième suit mais l’animal est toujours debout. Il a fallu le troisième pour que le cynocéphale soit atteint. Selon des déclarations de certaines personnes sur place, l’animal a blessé deux individus. AKpankpan ce jour, toute la population a exulté. Je me désole de voir la police de mon pays s’offrir en spectacle devant des caméras de télévision. La police était-elle si désœuvrée pour s’occuper des bêtes en divagation? Non, car, il y a quelques jours, les malfrats ont abattu de sang froid une jeune étudiante à Calavi. Avait-elle le droit de se glorifier pour un animal sans défense dont la mort est obtenue après de longues peines ? Non. En vérité, c’est la direction des eaux et forêts qui devait s’occuper de ce cas. Elle devrait tout faire pour prendre l’animal vivant. Et ceci à plusieurs intérêts. Attraper l’animal vivant signifie, au cas où besoin sera, faire des analyses cliniques pour suivre l’état de santé des deux personnes mordues. Cela pouvait aussi nous éviter les gaspillages de balles dont on a besoin pour réprimer la pègre. Trois balles, c’était pourtant important. Enfin, l’importance économique et écologique de cet animal n’est plus à démontrer. Dans un monde où les questions environnementales prennent de l’ampleur, c’est une hérésie que d’abattre un cynocéphale, une espèce de singe de plus en plus rare et qui fait courir des milliers de touristes dans le Parc national de la Pendjari. Dans un pays plus sérieux où la prise en compte de questions environnementales fait partie des préoccupations des uns et des autres, on ferait tout pour protéger cet animal et le prendre vivant. La police ou la direction des eaux et forêts tireraient des carabines à anesthésie pour endormir le primate et le prendre vivant. Dans ces pays-là, le développement de l’écotourisme et les devises qu’il génère sont des arguments importants pour ne pas abattre aussi facilement un animal. Normalement, la direction des eaux et forêts devrait sauter sur cet « braconnage » qui ne dit pas son nom et nous éclairer en demandant des comptes à la police. Nous devons travailler pour accroître la conscience écologique des populations qui, en temps normal, devraient s’opposer à l’abattage de l’animal. La police, elle, pourrait chercher d’autres exploits auprès d’une population persécutée par l’ampleur prise par l’insécurité dans les grandes villes. Vivement que cela cesse.

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