Yayi-Talon, la bataille finale

Attaques, bras de fer juridique par medias et avocats interposés, tentatives de médiation soldées par un fiasco… avec cette affaire d’empoisonnement manqué du chef de l’Etat, Boni Yayi, et l’homme d’affaire Patrice Talon, jouent, sans doute, le dernier round d’une lutte qui les opposent ouvertement depuis le 1er trimestre 2012.

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Chronique d’une guerre entre «anciens amis». Les films d’action hollywoodiens diffusés dans les vidéos clubs dans certains pays africains (Cote d’Ivoire, Bénin…) avant l’avènement des lecteurs cd, Vcd et dvd avaient une particularité. La quasi-totalité se termine par la bataille finale, encore appelé «dernier combat». Il s’agit, d’un face à face mortel entre le héros (brave, dans le langage enfantin et familiale) et le chef bandit. Le brave incarne les bons, la justice et surtout les victimes du chef bandit qui, lui, incarne les méchants, les malfaiteurs. L’issue de ces batailles est toujours le même ; la victoire du brave. Qui du président béninois Boni Yayi et de l’homme d’affaire de la même nationalité, Patrice Talon, accusé d’avoir fomenté le coup de l’empoisonnement manqué de Yayi peut-on qualifier de brave ou de chef bandit. On ne saura le dire pour le moment. L’évidence est que cette affaire d’empoissonnement, un énième événement du bras de fer entre les deux hommes, est semblable au scénario des films d’actions hollywoodiens. Le début remonte au premier trimestre de l’année. Même si l’histoire entre les deux  serait une idylle remontant à l’arrivée au pouvoir de Yayi en 2006. Les bruits ont couru dans l’opinion et Talon a affirmé dans son interview d’hier sur Rfi avoir financé l’élection de Yayi en 2006 et en 2011. Information réfuté par le ministre de l’Intérieur dans le droit de réponse du gouvernement aux affirmations de Talon sur Rfi.

Rounds

Acte 1: Février-mars 2012. Le bruit court dans l’opinion béninoise que le président Boni Yayi a l’intention de mettre fin au programme de vérification des importations de nouvelle génération (Pvi-ng) qui est une réforme introduite environs un an plus tôt au port autonome de Cotonou, dit-on pour accroitre les ressources douanières, rendre le port compétitif et mettre fin à la corruption dans les opérations portuaires. Par avis d’appel d’offres international, la société Bénin Control de Patrice Talon est sélectionnée pour la mise en œuvre de la réforme. D’une simple rumeur, la nouvelle de suspension du Pvi-ng devient officielle. Raison évoquée par les différents communiqués de Conseils des ministres qui s’y sont penchés : l’objectif de la réforme n’a pas été atteinte un an après son début. C’est la première bataille entre Yayi et Talon. Le gouvernement pour justifier son intention évoque la baisse des recettes et avance des chiffres que les responsables de Bénin Control refusent. Le 07 mai, le gouvernement décide de suspendre provisoirement le Pvi-Ng. Il s’en  suit une bataille juridique entre les deux sur la nature juridique du contrat Pvi. Le gouvernement soutient un contrat administratif, Bénin control penche pour un contrat privé. La guerre par avocat et medias interposés fait rage. Le gouvernement accuse Talon d’avoir fait usage de faux dans l’acquisition du marché Pvi et de vouloir déstabiliser les institutions de la république. En face, l’accent est mis sur les gros investissements réalisés. Acte2 : mars-avril 2012. Cette fois c’est sur le front de la filière coton que le combat se mène. Talon a aussi de gros investissements dans ce domaine. On accuse l’Aic dont il est président du Conseil d’Administration d’avoir tripatouillé, d’avoir fourni de fausses statistiques sur la campagne 2011-2012. Talon est gardé à vue pendant environ 24 heures au commissariat central de Cotonou pour une supposée affaire de plusieurs milliards. Le gouvernement dissout l’Aic (Association interprofessionnelle de Coton) et prend à titre provisoire en charge la gestion de la campagne. Acte 3 : Aout 2012.  Le président Boni Yayi accorde un entretien fortement médiatisé. Il ne manque pas de flécher Talon. Il avoue que ce dernier a menacé de déstabiliser son régime parce qu’il a perdu le Pvi.  Quelques jours plus tard, le ministère de l’Intérieur sort un communiqué et parle d’un complot ourdi contre la république par certains hommes d’affaire. Talon n’est pas citer nommément. Mais…

Chute ou triomphe

Le Bénin est un pays de paix. Face à ses positions tranchées, on note deux grandes tentatives de médiation. D’abord les présidents des institutions de la République. Ils rencontrent à Porto-Novo Patrice Talon. Leur initiative n’accouche de rien. Plus récemment, le président du FOGECAS (une association d’homme d’affaire africain) entre dans la danse. Sous sa houlette, Talon et Yayi se rencontre au Palais de la présidence de la République. Fiasco. Cela ne donne rien…Plus rien puis cette affaire d’empoisonnement du chef de l’Etat ayant pour supposée commanditaire Patrice Talon. Le motif de la guerre entre Yayi et son prétendu bras financier est désormais clair. Talon  affirme être victime d’un acharnement parce qu’il a refusé de financer un certain projet de révision opportuniste de la Constitution. Le pouvoir l’accuse de vouloir déstabiliser le régime Yayi parce que le Pvi lui a été arraché. Le bouchon est désormais poussé très loin. Pour une affaire d’assassinat dans laquelle la justice est impliquée, il ne faut plus s’attendre à un quelconque règlement à l’amiable. La lutte ira à sa fin aux risques et périls des deux hommes. Si Talon arrive à prouver devant la justice, pièce à conviction à l’appui, qu’il s’agit d’un «canular», une affaire «ultra grotesque», le régime Yayi s’en sortira décrédibilisé à jamais avec la mort politique de tous ses barons. Dans le cas contraire, ça sera la chute de Talon et de son empire. Dans l’un ou l’autre des cas, l’un portera le coup fatal et l’autre s’en sortira anéanti. C’est la règle du dernier combat.

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