Energie: c’est cher, c’est rare, c’est nase

Mercredi noir que ce 21 novembre 2012. La Société béninoise d'Energie électrique (SBEE) a failli sur toute la ligne dans la fourniture du courant électrique. Tous les quartiers de Cotonou en ont souffert. Maisons et artères plongées dans les ténèbres.

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Appareils électroménagers hors circuit. La paralysie totale. Dans un pays normal, qui aspire à la modernité, ce délestage de grande ampleur aurait déclenché des réactions en cascades.

Les associations de défense des consommateurs se seraient fait les porte-voix des populations. Elles auraient relayé, dans les formes requises, le ras-le bol de ces dernières. Cela ne se serait pas passé comme ici où tout le monde a accusé le choc, où tout le monde a encaissé le coup sans mot dire. Nous avons été habitués à ravaler notre révolte et à souffrir en silence. Nous n'avons même pas besoin qu'on nous présente des excuses.

Avec les autorités politiques, au plus haut niveau de l'Etat, c'aurait été le branle-bas de combat. Les courbes de productions en tête, les rapports sur les conséquences de ce délestage sous les yeux, elles auraient battu le rappel. Convocation d'un Conseil extraordinaire des ministres. Annonce de mesures conservatoires. Mise en place d'un Comité de crise. Organisation planifiée de l'information du public. C'est déjà assez éprouvant d'être dans l'obscurité, par manque de lumière. C'est la totale de rester dans l'obscurité par manque d'informations.

Les secteurs organisés de l'opinion, ceux de la presse notamment, auraient multiplié des reportages. Histoire de faire prendre à tous la juste mesure de ce qui conviendrait de tenir pour une catastrophe nationale. La parole aurait été donnée à diverses personnes et personnalités. Soit pour exprimer l'état d'esprit des populations. Soit pour mettre le doigt sur les dysfonctionnements à l'origine d'un tel état des choses. Soit pour situer les responsabilités. Soit pour éclairer la lanterne de chacun et de tous, empêchant les pêcheurs en eaux troubles de noyer le poisson.

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Mais il se trouve que nous sommes au Bénin. On ne peut s'attendre à plus que le silence des uns, que le calme apparent des autres. C'est notre manière à nous de vivre ces choses là.  Mais attention : nous devons nous méfier de l'eau qui dort. Il y a trop de frustration non déclarée. Trop d'exaspération trop longtemps contenue. Les gens commencent à en avoir gros sur le cœur. Le trop plein de la bouche finit par se muer en mots qui fâchent ou se condenser en injures qui blessent. Le bras se tend et se détend, avant qu'il ne frappe avec la rapidité de l'éclair. Et l'on se surprend de voir les plus pacifiques d'entre nous dans des postures inattendues. Ce qui montre qu'un fauve sommeille en chacun de nous. Qui a intérêt à le réveiller?.    

Notre intérêt sur la question de l'énergie, c'est de mettre toutes les cartes à plat, c'est de changer les règles du jeu, c'est d'explorer de nouvelles voies, c'est de nous armer d'une ambition neuve. Nous ne pouvons pas prétendre prendre le chemin de la modernité et poser des actes qui jurent avec toute modernité. Nous devons nous convaincre que l'énergie est, pour nous, de l'ordre d'une priorité. Sans énergie, nous ne pouvons rien entreprendre avec succès dans le champ du développement de notre pays. L'énergie doit être disponible, partout suffisante. Non soumise à des caprices dans sa fourniture. Non assujettie aux fantaisies d'une mauvaise organisation dans sa distribution.

Du reste, chaque coupure de courant électrique est un coup de couteau donné à notre développement. Ne parlons pas du délestage qui s'éternise, synonyme de paralysie, de non compétitivité, de mort sociale. Si nous devions commettre des experts pour chiffrer le coût du délestage de ce 21 novembre, peut être que nous nous montrerions plus attentifs, plus réceptifs à l'éloquence hurlante des chiffres. Ils instruiraient le procès de nos laxismes joyeux. Ils nous feraient prendre la mesure du mal que nous faisons à notre pays, sinon à nous-mêmes. Ce qui relève d'une sottise monumentale. Les Wolof du Sénégal ont tranché la question. Ils nous indiquent les trois choses qui sont sans remède : la vieillesse, la mort, et justement, la sottise.

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