Ce que cache la grâce présidentielle accordée à Me Agbo et Berthe Cakpossa

Diversion, peur de la contre publicité et l’agrandissement du cercle des «frustrés». C’est sans doute, les raisons inexprimées pour lesquelles le président Boni Yayi a, contre toute attente décidé d’accorder la grâce présidentielle à Me Agbo et à la journaliste Berthe Cakpossa, condamnés respectivement à six et trois mois d’emprisonnement ferme pour l’avoir offensé.

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L’information est tombée tard dans la nuit de ce mercredi et reprise largement par la presse dans sa livraison d’hier. Me Lionel Agbo et la journaliste Berthe Capkossa, directrice de Canal 3 Bénin, condamnés respectivement à six trois mois d’emprisonnement ferme pour «complicité d’offense» et «offense au chef de l’Etat», ont été tous deux graciés par le président Boni Yayi, qui est pourtant l’auteur de la plainte ayant conduit à leur condamnation. La décision du chef de l’Etat a été portée à l’attention de l’opinion par un communiqué signé du Secrétaire général de la Présidence de la République, Emmanuel Tiando.

Le communiqué (lire en page 03) précise : «Le Président de la République qui fait de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption et l’impunité, les principes cardinaux de son action, a souhaité que ces prétendus milliardaires soient identifiés, raison pour laquelle il a porté plainte contre l’intéressé afin que toute la lumière soit faite sur ces graves accusations contre sa personne et qui concernent aussi la gestion des affaires de notre cité commune.» Il justifie la grâce présidentielle par le fait que «dans un souci d’apaisement», le Président Boni Yayi,  «agissant en Père de la Nation, a décidé de retirer sa plainte et de lui accorder son pardon et sa grâce conformément aux prérogatives que lui confère la Constitution.»

Les non dits

Les vraies raisons du changement de position inattendue et spectaculaire du Chef de l’Etat pourraient se trouver bien ailleurs au regard de certaines informations qui nous sont parvenues et de l’analyse de la situation. La première raison est la peur d’une contre publicité. Selon des sources concordantes, Me Lionel Agbo préparerait une intervention sur Rfi pour exposer certains dessous de cette affaire. Ce qui va susciter un nouveau rebondissement. De plus, le président Boni Yayi prépare une visite de travail à Paris pour le vendredi 08 Février 2013. La marina redoute donc que soit ressassé dans la presse internationale les circonstances de ce procès à l’occasion de cette visite de Boni Yayi en France, alors que dans notre pays qualifié de modèle démocratique en Afrique, un homme politique est «condamné à six mois d’emprisonnement» pour avoir dénoncé la corruption au sommet de l’Etat. Pis, qu’un journaliste l’ait aussi été pour avoir diffusé les propos de cet homme politique. Le président voudrait paraître au cours de sa visite en France, blanc comme neige.

 Ensuite, on pourrait mentionner  la peur qui s’élargit dans le cercle des mécontents et des remontés contre le régime actuel. La méthode de gouvernance et d’autres grosses affaires ont occasionné le départ du pays  de plusieurs personnalités qui entretenaient dans un proche passé des rapports idylliques avec le chef de l’Etat. Et retrouver un ancien porte-parole du Palais de la présidence – qui est sans doute une personnalité importante du pays – dans le camp des courroucés ne sera pas du tout une bonne nouvelle.

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Diversions et pressions diplomatiques?

Enfin, la troisième raison, c’est la diversion.  Le pays est marqué par d’énormes dossiers de scandale qui touchent des proches du président Boni Yayi. Le dernier de ces scandales, est le tripatouillage et la magouille dans le dernier concours de recrutement au profit du ministère des Finances. Ces différentes affaires suscitent certaines frustrations et une tension dans le pays. La stratégie est de poser encore un acte qui fait détourner l’attention de l’opinion de ces dossiers-là mais aussi d’autres questions essentielles.  Il faut donc créer non seulement diversion, mais aussi montrer que Boni Yayi, ce «Père de la Nation» a le «souci d’apaisement». A côté de toutes ses raisons, il y a les éventuelles pressions qui pourraient venir de Paris. Me Agbo est un citoyen français ayant même exercé au barreau de Paris. Il vient d’être condamné dans sa première patrie à l’issue d’un procès qualifié par les observateurs de politique. Et quand un citoyen français se retrouve dans cette posture, on sait tous comment ça se passe entre Paris et les palais présidentiels africains.

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