Les beninois et la sagesse de la fourmi

J’admire énormément les béninois pour leur intelligence. En effet, plus que le « bon sens », l’intelligence semble être la chose la mieux partagée au Bénin car, pour paraphraser Descartes, « chacun pense en être si bien pourvu, que ceux là même qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose, n’ont point coutume d’en désirer plus qu’ils en ont ».

D’ailleurs, Emmanuel Mounier a évoqué cette intelligence par la célèbre citation selon laquelle « Le Dahomey est le quartier latin de l’Afrique. Mais cet intellectualisme fait de méchanceté et de mesquinerie est de nature à retarder le développement du pays ».

Apparemment ce colon, connaissait bien les dahoméens (futur béninois). Ils sont tous intelligents ; ils s’estiment tous plus intelligents les uns que les autres. Ils estiment tous avoir raison au même moment. Si Joël (prénom pris au hasard) a une opinion, ils n’ont cure qu’il y ait une once de bon sens dans ce que Joël pense. Ils ont chacun et tous raison à la fois. Ils sont prêts à lui donner tous les noms d’oiseau. Quant à la vérité ils n’en ont que faire. Ils préfèrent voir qui argumentera le mieux sur toutes les questions et ils aspirent tous à être le leader.

Voilà une autre caractéristique que soulignait déjà dans les années 60 le professeur Maurice AHANHANZO-GLELE dans sa thèse publié sous le titre « Naissance d’un Etat noir, l’évolution politique et constitutionnelle du Dahomey, de la colonisation à nos jours ». En raison de l’association de divers territoires conquis, la non-existence préalable d’un empire fortement institutionnalisé avec des castes établies comme ailleurs, la quantité et la qualité des cadres, chacun peut prétendre et aspire à être le chef. Non seulement il est tout aussi, sinon plus intelligent que l’autre mais surtout, il est prêt à vilipender l’autre juste pour se prouver sa valeur à lui. Il n’est pas étonnant qu’on ait eu tant de chefs qu’on ait même eu – chose rare- un triumvirat à un moment de l’histoire.

J’admire également la fourmi car elle n’est pas si intelligente mais elle est laborieuse. Comme il est écrit quelque part dans la Bible – je ne me rappelle pas la citation exacte- « il n’a ni chef, ni maître mais il moissonne en son temps ». Les fourmis sont capables de grands travaux à leur échelle. Je ne sais qui les dirige, qui est à leur tête. Certes, elles ne sont dotées ni d’intelligence, ni de parole pour se permettre luxe de pérorer et de prouver leur valeur les uns aux autres. Néanmoins, elles sont efficaces et unies à leurs tâches et réussissent. On argumentera qu’elles sont dotées d’instinct et de secrétions chimiques qui leur permettent de se reconnaître de communiquer pour travailler ensemble.

Qu’est-ce qui nous empêche nous de considérer notre amour – j’ose le croire- du Bénin comme le ferment fédérateur pour travailler tous dans le même sens, celui du progrès du pays, au lieu de toujours se détruire les uns autres ? Si la fourmi n’a pas de chef, elle travaille quand même pour la cause des fourmis ; peu importe la fourmi de tête. Quelle que soit le Président, le travail commun est le même : le développement du Bénin. Il suffit que chacun apporte sa pierre à l’édifice chaque jour de la meilleure manière possible.

J’admire les fourmis, car au lieu de focaliser en permanence sur la fourmi de tête, elle ajuste en permanence leur trajectoire et efforts vers l’objectif commun au lieu de se détruire réciproquement. Elles ne chantent ni leur intelligence, ni leurs talents comme des cigales pendant 50 ans sans pour autant avancer. Le problème n’est pas nécessairement l’homme de tête ou celui qui ose donner son opinion : C’est notre propension à tous de raisonner et critiquer tout le temps au lieu de réfléchir et travailler tous pour la même cause. Cette réflexion et le travail ardu amèneront à coup sûr les hommes vertueux à la tête et aussi le progrès auquel nous aspirons tous.

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