Repenser nos élections

Nous affirmons que les Béninois savent tout faire. Mieux, les Béninois savent bien tout faire bien. Sauf que, comme l'exception qui confirme la règle générale, les Béninois ne savent par organiser des élections propres, des élections au-dessus de tout soupçon.

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Sur ce chapitre, de mémoire de Béninois, aucune des élections organisées au Bénin, d'hier à aujourd'hui, ne l'a été à la satisfaction de toutes les parties concernées et impliquées.

L'élection, en tant que mode de désignation d'une personne par un vote, reste, sous d'autres cieux, une formalité. C'est une activité ordinaire et courante, normée et maîtrisée. Chez nous, au Bénin, il en est encore tout autrement. Nos élections, qu'elles soient politiques, syndicales, corporatives et autres, sont presque toujours grosses de menaces et d'incertitudes. Tous les voyants passent au rouge : alerte et alarme, tocsin et   sirène. Des élections à haut risque qui prennent les allures   d'un tsunami social, mettent à mal le consensus national, charrient tous les vilains sentiments. Tout pue doute et suspicion, méfiance et effroi.

Nous ne sommes pas loin de penser que le jour où le Bénin s'ouvrira les chemins apaisés et sereins d'élections propres et sans taches, il aura réussi également à s'ouvrir les chemins d'un développement indépendant et durable. Les Béninois, de leurs doigts, autour de la jarre trouée, auront fait incarner un bel idéal. Ils auront donné corps et forme au rêve du roi Ghézo. Une manière d'attester que la clé de l'avenir du Bénin est à chercher et à trouver dans l'organisation d'élections propres. Mais comment y parvenir ? Risquons quelques propositions.

La première proposition a trait à la structure en charge des élections dans notre pays. Nous la voulons une et unique, centrale et centralisée. Toutes les élections de l'espace public, qu'elles soient administratives ou politiques, professionnelles ou corporatives, devraient relever de cet organisme unique. Les compétences de celui-ci couvriraient l'organisation du scrutin à ses différentes étapes : du dépôt des candidatures à la proclamation des résultats, sans oublier la gestion du contentieux post électoral…

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Cette super structure, en charge de la gestion du vaste domaine des élections, bénéficiera de l'inestimable avantage de concentrer les moyens aujourd'hui épars. Elle pourra ainsi les ordonner rationnellement et efficacement en vue et en fonction d'un objectif précis : l'organisation, à la satisfaction de toutes les parties, d'élections propres. A titre illustratif, les prochaines élections consulaires, avec la Chambre de Commerce et d'Industrie, ainsi que les prochaines élections locales, auraient relevé des compétences de cette structure. "Commission électorale nationale autonome" (CENA)? La dénomination de celle-ci importe peu. Pourvu que son autonomie soit effective, respectée et garantie.

La deuxième proposition a trait à la spécialisation, à la professionnalisation de l'activité électorale. Des groupes d'hommes et de femmes, nommés à saisons régulières pour les besoins de cause, mais sans référence et sans compétence avérées en matière électorale, cela fait désordre. On a le sentiment que des forces en coulisses se livrent un combat de Titans par leurs marionnettes interposées. La manipulation devient vite la règle. Toute l'organisation électorale est à affecter d'un zéro pointé. La boîte de Pandore est ainsi ouverte et bonjour les dégâts ! On peut le comprendre aisément : les élections sont une activité hautement névralgique, compte tenu des enjeux. On ne saurait plus les laisser en des mains inexpertes, voire téléguidées. L'homme qu'il faut, doté de l'expertise et de l'expérience nécessaires, à la place qu'il faut. Et nos vaches électorales seront bien gardées.

La troisième et dernière proposition a trait à la qualité des prestations de ces experts en matière électoral. Hors leurs compétences techniques, ces spécialistes sont à triller sur le volet grâce à une enquête de moralité systématique et en règle. Nous aurons besoin de savoir qui est qui ? A qui déléguons-nous des pouvoirs de gestion et de décision aussi considérables ? Pour quels résultats ? Toutes ces propositions répondent à un unique souci : chercher sans trêve la bonne formule pour organiser nos élections plutôt que de nous en remettre aux modèles standards ou venus de loin.  Nous devons devenir des penseurs au sens où l'entendait Valéry : "Les penseurs, écrivait-il, sont des gens qui repensent et qui pensent que ce qui fut pensé ne fut jamais assez pensé ".

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