Tout faux est faux

Il ne s’embarrasse pas de protocole. François Abiola, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, publie systématiquement dans la presse les noms des faussaires, des faux diplômés identifiés par ses services. La volonté d’assainir son département semble aller de pair avec un sens affirmé de l’éthique et de la morale.

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La dernière fournée de tricheurs et de faussaires a ainsi livré à l’opinion une liste de 196 individus. Ils sont indûment porteurs de diplômes nigériens, burkinabé, ivoiriens, togolais…Identifier ces faux diplômés, établir leur culpabilité, c’est suffisant pour qu’ils subissent la rigueur de la loi. La publication de leur nom dans la presse participe, sans nul doute, de la volonté de leur infliger un châtiment supplémentaire. En effet, dans un contexte socioculturel comme le nôtre, la honte conserve encore toute sa charge correctionnelle et punitive.

Les Fon du Bénin parlent volontiers de «Gbê Ougnan». C’est-à dire que la honte qui sanctionne le fait qu’on vous déshabille sur la place publique vous poursuit toute votre vie. Cette honte ne laisse pas intacte votre communauté. Elle est partagée par tous vos proches, parents, amis et alliés. Un peu comme pour justifier ce proverbe (Citation): «Un seul âne a mangé de la farine et tous les autres en ont le museau blanc» (Fin de citation). La démarche de François Abiola, c’est de frapper de manière exemplaire le délinquant, tout en secouant   la conscience de tous. C’est grave, en effet, de trafiquer ses diplômes, de se fabriquer des parchemins, de s’octroyer des titres et des grades complètement bidon.

Mais cette pédagogie de la punition de François Abiola, pour être encore plus efficace, doit passer les murs de son ministère. Elle doit toucher d’autres sphères d’activités de notre société. Serait-elle encore juste une justice confinée dans les quatre murs d’un ministère, abandonnant le reste de la société à la chienlit ? Ce que l’on s’accorde à reconnaître comme bon et utile ici, mériterait bien d’être expérimenté là.  A titre d’exemples et d’illustration arrêtons-nous à quelques sphères d’activités.

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Nous supposons assez longue la liste de ceux de nos compatriotes qui émettent des chèques sans provision. Nos banques et nos établissements financiers devraient, en la matière, nous édifier. En quoi les faussaires des banques   seraient-ils différents des faussaires de nos écoles, de nos universités ? Pourquoi les premiers mériteraient-ils d’être différemment traités des seconds ? Publier, de temps en temps, leurs noms ne serait que justice. Cela nous évitera d’avoir deux poids deux   mesures.

Les forces préposées à la sécurité et à l’ordre public démantèlent chaque jour des réseaux de faussaires. Ces derniers sévissent dans divers domaines :   cartes d’identité, cartes bancaires, titres de voyage etc. Ne parlons pas des cybercriminels, les «gayeman» tels qu’on les désigne, ici, chez nous. Leur culpabilité établie, leur présomption d’innocence effacée, il conviendrait qu’il pose le masque. Nous devons les y aider pour le bien de la société toute entière.

Le marché du faux et de la contrefaçon n’a pas de limites chez nous : faux médicaments, produits alimentaires périmés, œuvres de l’esprit piratées, une gamme infinie d’articles contrefaits… Les gens qui s’illustrent à ces divers niveaux de grande nuisance sont des ennemis de leur société. Aveuglés par l’appât du gain, ils sont incapables de prendre l’exacte mesure des malheurs qu’ils sèment à leur suite. Quelles raisons avons-nous de continuer de protéger des malfrats ou de masquer les divers visages du mal qu’ils incarnent ?

N’excluons pas de ce tableau de faussaires tous ceux qui, lors de nos diverses élections, se rendent coupables de fautes graves : votes multiples, bourrages d’urnes, manipulations informatiques, substitution d’urnes, inversion des résultats… En plus de cinquante ans d’indépendance, notre pays attend toujours d’établir le record de l’organisation de sa toute première élection au-dessus de tout soupçon. Nous n’y parviendrons qu’en nous résolvant à projeter un puissant faisceau de lumière sur le visage de tous les hiboux électoraux. Jusqu’à quand insulteront-ils notre intelligence ? Jusqu’à quand nous retarderont-ils sur les chemins de notre développement?

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