La femme sera célébrée ce jour. Aujourd’hui vendredi 08 mars 2013, les femmes béninoises comme celles des autres pays, auront une journée à elle toute seule. Et pour l’édition de cette année, il a été décidé de réfléchir au plan national sur «l’élimination et la prévention de toutes sortes de violences faites aux femmes et aux filles».
Ce thème national ne s’écarte pas de celui retenu par l’Organisation des Nations Unies qui invite à la tenue d’une promesse faite aux femmes : Mettre fin à la violence à l’égard de la femme. Le thème retenu indique bien, ce qu’il y a lieu de faire. «Une promesse est une promesse, il est temps de passer à l’action pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes».
Flore Ballo
Les festivités au détriment des problèmes de femmes
La célébration du 8 mars au Bénin sera une fois encore festive. Et l’impression d’un pagne spécial 8 mars 2013 est annonciatrice de grandes manifestations festives en vue. Comme on peut s’en douter, il y aura le traditionnel défilé des femmes, la distribution possible de billets de banque, comme il n’en manque plus dans diverses manifestations, alcool, concert ça et là, et peut-être un atelier dont les conclusions seront sûrement rangées aux oubliettes. Et après la journée du 8 mars, les nombreux problèmes auxquels sont confrontées les femmes béninoises, notamment les violences faites aux femmes, continueront. Tout comme si la vie de femme se résumait en une seule journée, le 8 mars, sur les 365 jours que dure pourtant une année. Vivement que les choses changent pour l’épanouissement de la femme.
Yao Hervé Kingbêwé
Les femmes entre ignorance, scepticisme et laxisme
La lutte des femmes a pris beaucoup d’ampleur depuis quelques années au Bénin, et chaque 8 Mars est l’occasion par excellence, pour les différents acteurs, de faire le bilan de leurs actions. Cependant, pour certaines femmes moins impliquées dans la bataille, cette célébration parait encore comme du folklore, pendant que d’autres ne perçoivent pas encore l’importance de la lutte et n’hésitent pas, par ailleurs, à exposer leur scepticisme quant à l’issue heureuse de la lutte.
Géneviève, Femme au foyer, mère de trois enfants et commerçante à Cocotomey
«Je ne sais même pas si les femmes fêtent aujourd’hui. Ce que je sais, c’est que les femmes qui sont en haut là-bas luttent pour nous. Nous, personne ne nous connait, donc, je ne sais même pas ce qu’on peut fêter. Aussi, je me demande si on doit lutter pour quelque chose. Car, même la Bible nous demande de nous soumettre à nos maris. Quand, je me réveille au quotidien, je m’occupe de mes enfants et des travaux domestiques puis je vais vendre. Quand à mon mari, il va conduire le «Zémidjan» et revient avec ce qu’il trouve. Parfois, on se dispute et il m’a même giflé une fois, mais si je pars ou si je le convoque quelque part, ce n’est pas les femmes qui sont en haut là-bas qui viendront garder les enfants avec moi. En tout cas, quand je vois l’effort que fournit mon mari, je ne pense pas vouloir lui être égale parce que je n’aurai pas la force de faire tout ce qu’il fait pour mes enfants et moi »
Madeleine, Femme au foyer, Couturière à Cotonou
« Journée internationale de la femme ? Oui, j’en ai entendue parler, mais çà doit être le 18 Mars, non ? Moi, çà ne me dit pas grand chose parce que c’est seulement à la télévision qu’on les voit parler de parité. Depuis qu’elles se disent nos défenseuses, elles font les fêtes, roulent de grosses voitures, apparaissent tous les jours à la télévision, moi, je suis toujours ce que je suis. Mon salaire, ce sont mes prestations. Dans cette condition, un groupe de femmes ayant déjà ce qu’elles et leurs arrières petits-enfants vont manger, va me demander de dire à mon mari que nous sommes égaux ? D’accord, mais que ces femmes viennent d‘abord me donner assez d’argent pour que je puisse prendre à part égale les dépenses du foyer. Là, je peux oser, pas l’embêter, mais lui exiger par exemple de rentrer à telle ou telle heure….(rires)»
Propos recueillis par : Camille A. Segnigbindé
Prévention des violences faites aux femmes : Une lutte féministe mais d’abord féminine
Harcèlement sexuel, agressions physiques, viols, injures, mariages forcés…, les femmes subissent, de la part des hommes, plusieurs actes de violence. La lutte contre ces violences physiques, morales et psychologiques à l’égard de la femme, est une bataille commune, mais d’abord féminine.
« Mon mari me bat…», «je suis harcelée depuis plusieurs semaines par un homme marié»… Ces tristes confidences à nous faites par une mère de foyer résidant à Abomey-Calavi et une étudiante rencontrée hier sur le campus universitaire d’Abomey-Calavi, sont le quotidien de nombreuses femmes béninoises. C’est d’ailleurs ce que confirme une étude effectuée en 2009 par le ministère de la famille qui précise que : «69% des femmes (enquêtées) ont déclaré avoir subi des violences au moins une fois dans leur vie». Selon cette étude, les femmes sont sujettes, chaque jour, à de nombreuses violences de différents ordres. Notamment physiques (74%), morales (74%) et psychologiques (29%). Ces chiffres alarmants suscitent beaucoup d’inquiétudes et appellent à une mobilisation générale pour lutter contre ces violences qui augmentent d’années en années, surtout avec les contraintes socioculturelles.
La lutte d’accord, mais les femmes d’abord
Il n’est point besoin de rappeler que la lutte contre les violences faites aux femmes dans le monde, est nécessaire et importante. Et particulièrement au Bénin où tradition et impunité ont souvent accru l’animosité de certains hommes. Ces derniers qui, pour un oui ou un non, n’hésitent pas à violenter, soit physiquement (coups), soit moralement (injures), ou encore psychologiquement, les femmes et les filles. Toutes choses qui ont de nombreuses conséquences, pouvant aller jusqu’au décès.
Il faut lutter, certes. Mais les femmes elles-mêmes semblent ne pas vouloir de la lutte. En effet, la plupart des femmes victimes de violence ne déposent pas plainte. Mieux, elles n’osent même pas parler de cela. Et quand il leur arrive d’échanger sur leurs «souffrances» avec d’autres, elles trouvent des arguments pour camoufler la réalité. C’est le cas d’une mère de foyer ayant requis l’anonymat qui déclare : «c’est une preuve d’amour». Pour elle, «il n’est pas possible qu’une femme se refuse à son homme même si elle ne veut pas».
Les femmes semblent agir souvent contre leurs propres intérêts. Et on n’en veut pour preuve que la loi sur la parité et l’accès équitable des femmes à la Fonction Publique. Cette loi, après avoir été proposée par un député pour débats, avait été reportée sine die, après avoir recueilli seulement cinq (5) voix favorables. Alors qu’il y a plus de cinq femmes à l’Assemblée Nationale.
Lutter contre les violences à l’égard des femmes d’accord, mais les femmes d’abord.
De la lutte ouvrière à la quête de la parité
La journée de la femme, célébrée le 8 mars de chaque année, est le fruit de plusieurs luttes successives, issu d’un mouvement ouvrier.
Le Bénin, à l’instar de la communauté internationale, célèbre ce jour 8 mars, la femme. Une date choisie par les féministes pour faire le bilan des actions dans le cadre de l’amélioration des conditions d’existence des femmes dans le monde. Toutefois, il s’agit d’un résultat issu d’une longue lutte de braves femmes modernes, hors du continent africain, et en quête de la liberté.
En effet, tout est parti des mouvements ouvriers du tournant du XXème siècle en Amérique du Nord et dans toute l’Europe. Depuis lors, cette Journée a pris une nouvelle dimension mondiale pour les femmes. Le mouvement international croissant en faveur des femmes, qui a été renforcé par les quatre conférences mondiales des Nations Unies sur les femmes, a contribué à faire de cette commémoration un point de ralliement pour mobiliser le soutien en faveur des droits des femmes et de la participation de ces dernières à la vie politique et économique.
En 1975, la célébration de cette journée a connu un bond et une plus large visibilité. C’est au cours de la Journée internationale de la femme de 1975 que les Nations Unies ont commencé à commémorer la Journée internationale de la femme tous les 8 mars.
Deux ans plus tard, en décembre 1977, l’Assemblée générale adoptait une résolution proclamant qu’une Journée des Nations Unies pour les droits de la femme et la paix internationale soit célébrée par les États membres un jour de l’année. Depuis lors, La Journée internationale de la femme est devenue désormais une occasion de dresser un bilan des progrès réalisés, d’appeler à des changements et de célébrer les actes de courage et de détermination accomplis par les femmes ordinaires dans leurs pays et dans leurs communautés.
Cependant, la lutte a pris plusieurs dimensions dans le temps. Et aujourd’hui, les féministes réclament l’égalité entre les femmes et les hommes.
Camille A. Segnigbindé
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