Psychose, morosité économique, délestages intempestifs : comment le régime Yayi conduit le Bénin dans le «Noir»

Au Bénin, l’on vit depuis bientôt un an dans la psychose. C’est sans compter avec la cherté de la vie, le chômage galopant, la saga des scandales financiers et administratifs et la morosité économique. A tout cela se sont ajoutées, depuis quelques semaines, les coupures intempestives. Le pays est dans le Noir.

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« Comment va le Bénin ? » Ainsi s’intitule le blog de Wilfried Léandre  Houngbédji, journaliste analyste politique de renommée nationale. Sur son blog, Wilfried Léandre Houngbédji  fait des commentaires et analyses, émet très librement ses opinions pour « participer à la Refondation du Bénin. » Mais si ce « comment va le Bénin » était une question adressée aux citoyens lambda au Bénin, la réponse de la grande majorité serait : «Mal.» Ils ajouteront, sans doute : « Très mal »… Depuis que les délestages, parfois capricieux, de la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee), a laissé place à des coupures pendant plusieurs heures, voire toute une journée du courant électrique.

En effet, depuis plusieurs semaines, les Béninois passent plus de temps sans l’énergie électrique qu’ils n’en passent avec.  Au cours d’une sortie médiatique, les responsables de la Sbee ont expliqué cela par le fait que le Nigéria a retiré au Bénin une partie de sa fourniture au pays. Et pour juguler la situation, les responsables de la Sbee ont trouvé comme stratégie de desservir les différents quartiers de Cotonou, et même les localités du pays, par rotation. Avec, dans la théorie, des coupures de deux heures par zone. Mais dans la pratique, cela va bien au-delà.

Depuis ce mardi, la situation a empiré. Les temps de coupure se sont allongés, et les zones qui se retrouvent sans l’électricité au même moment plus étendues. Explication : il y a un problème au niveau du fournisseur au Nigéria. Ainsi, le Bénin qui ne produit que 10% de sa capacité énergétique actuelle, se retrouve dans le noir, depuis que l’un de ses principaux fournisseurs a d‘abord réduit la quantité de l’énergie fournie, puis s’est retrouvé ensuite face à des difficultés (lire ci-dessous les explications du ministre de l’Energie).

Et depuis, les nuits deviennent plus longues pour ceux qui sont habitués à les passer au frais, et les journées très stressantes pour les chefs d’entreprises. Une réalité très loin de celle d’un pays qu’on a promis mettre sur les rails de l’émergence, il y a sept ans.

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L’autre échec du régime Yayi

A son arrivée au Pouvoir en Avril 2OO6, le Président Boni Yayi avait promis mettre le pays sur les rails de l’émergence. Ce qui impliquait, il en a fait cas, d’augmenter la capacité de production énergétique du pays. Dans les premiers mois, on a vu un président engagé pour cette cause. Il a pris les dispositions financières pour injecter des milliards dans la Sbee en vue de payer les dettes de la société vis-à-vis de la Ceb. Le projet de construction de turbines à gaz à Maria Gléta, sur fonds propres, a été lancé. Sur initiative du Chef de l’Etat, le pays a pu négocier et obtenir des engagements de fourniture d’énergie chez le grand voisin de l’Est et chez des pays comme la Côte d’Ivoire et le Ghana. Mais tout mène aujourd’hui le Bénin dans le noir. Simplement parce qu’on n’a pas été prévenant.

Lire aussi : Délestage, L'inexcusable excuse

En dehors de ces quelques actions, on a comme l’impression que le Gouvernement est resté sur ses lauriers. Oubliant peut-être que la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigéria, qui ont accepté, à un certain moment, de venir en aide au Bénin, auront besoin d’un supplément d’énergie pour faire face à leurs besoins internes. C’est ce qui arrive maintenant. Et c’est quand le Nigéria a réduit la quantité d’énergie, qu’on a commencé à agiter à nouveau la question des  barrages hydroélectriques.  Depuis sept ans… qu’attendait-on ?

La centrale à turbine à gaz de Maria Gléta, est censée permettre au Bénin d’augmenter de 80 mégawatts sa capacité énergétique. Initialement prévu pour durer dix huit mois, le chantier lancé depuis avril 2008, n’a pas encore été livré à ce jour. Récemment, le Gouvernement a procédé à la réception provisoire de quatre turbines sur les huit prévues. Ces quatre turbines devraient produire quarante mégawatts. Mais, au niveau du chantier se trouve un problème majeur. Le gaz naturel qui devrait permettre de faire fonctionner les turbines, manque. Cela est dû, selon plusieurs sources, à un problème intervenu au niveau du gazoduc du Wapco (The West African Gas Pipeline Company) qui part du Nigéria et aboutit au Ghana, en passant par le Bénin et le Togo. Faire fonctionner les turbines au jet A1, un produit alternatif plus cher, occasionnera une hausse du prix du courant. A cela s’ajoute la question de l’assurance qu’il faut régler avant de mettre la centrale en service.

La centrale de quatre vingt mégawatts est là… Mais le Bénin végète dans le noir. C’est le retour du délestage sauvage. Tout ce que le ministre de l’Energie trouve à dire, c’est que « nous subissons en ce moment les politiques successives en matière d’approvisionnement en énergie électrique, qui ont précédé l’avènement du gouvernement Yayi Boni.» C’est un faux fuyant et un aveu de l’échec du Gouvernement. Ce n’est d’ailleurs plus le genre de discours à tenir quant l’on se retrouve, après sept ans au pouvoir, face à un problème qu’on avait promis résoudre lorsqu’on est venu au pouvoir.

Psychose et galère  dans le noir

Au Bénin, l’on vit depuis bientôt un an dans la psychose, avec les affaires de tentatives de déstabilisation de l’actuel régime, véhiculées par ci et par là. C’est sans compter avec la cherté de la vie, le chômage galopant et la saga des scandales financiers et administratifs. Et voilà que s’ajoute à tout cela le problème de l’énergie, qui, au demeurant, va ralentir l’activité économique du pays, qui n’était d’ailleurs pas au meilleur de sa forme.

 Le régime actuel nous a promis le changement, l’émergence, la prospérité partagée, la refondation et mieux, la « dictature du développement ». Mais tout cela s’est pour le moment soldé par un fiasco.

Roger Gbégnonvi a publié récemment un ouvrage intitulé l’Afrique entre enfer et purgatoire (après 50 ans de suffocation). Vu la situation actuelle du Benin, il faudra peut-être modifier le titre du livre du professeur en mettant : « le Bénin entre enfer et purgatoire ». Mais la bonne nouvelle, c’est que le professeur qui se veut afro-réaliste, n’est pas pessimiste sur toute la ligne. Il y a encore de l’espoir. C’est à juste titre que la couverture de son livre est faite sur un fond bleu avec, seule, la carte de l’Afrique, peinte en noir. Et il reste trois ans à Yayi pour ne pas foncer dans le noir avec le Bénin.

« Il s’agit réellement d’un déficit en énergie », dixit le ministre Kassa

Le ministère de l’Energie, Barthelemy Kassa était l’invité du journal de l’Ortb (télévision nationale) dans la soirée de ce mercredi 20 mars. A travers les réponses aux questions à lui posées par le présentateur  Prévert Noutéhou, le ministre Kassa est revenu, chiffres à l’appui sur les raisons du délestage chronique et accrue que connait le Bénin actuellement, avant d’annoncer les mesures prises par le Gouvernement. Extrait.

« Le Chef de l’Etat, Dr Boni Yayi, présente ses excuses aux Béninois suite aux chocs que connaît en ce moment chacun des ménages du Bénin en rapport avec le déficit dans la fourniture de l’énergie.  Les différents délestages que nous vivons aujourd’hui, les différentes coupures de courant, sont dus, ou bien à des pannes techniques observées sur le réseau, ou bien à un déficit en énergie. Cette fois-ci, il s’agit réellement d’un déficit en énergie. Hier soir (Ndlr : le 19 mars 2013), le Bénin disposait, pour ses besoins de 200 mégawatts, d’à peine 40 mégawatts d’énergie électrique. En ce moment, nous disposons à peu près de 70 mégawatts, alors que les besoins sont à peu près de 200 mégawatts. Vous comprenez qu’on est dans l’impossibilité de satisfaire chacun des ménages, tel qu’on le faisait d’habitude. A quoi cette pénurie est due ? Simplement à la politique d’approvisionnement en énergie de notre pays. C’est vrai que l’Etat est une continuité. Mais nous subissons en ce moment les politiques successives en matière d’approvisionnement en énergie électrique, qui ont précédé l’avènement du gouvernement Yayi Boni. Le Bénin a opté, comme le Togo, pour l’importation de l’énergie au lieu d’investir beaucoup plus dans la production.

Chiffres à l’appui

Avant l’arrivée du Président Boni Yayi, on produisait à peine 5% de notre consommation. Aujourd’hui, nous produisons environ 10% de notre consommation. Donc les 90%  sont achetés du Nigeria, du Ghana ou de la Côte d’Ivoire. Du Nigeria, nous achetons 200 mégawatts pour le Bénin et le Togo. Mais vous connaissez la qualité du courant provenant du Nigeria qui n’est pas stable. C’est cela qui fait que, dès qu’il y a coupure au Nigeria, du coup, 200 mégawatts sont effacés du réseau. Si 200 mégawatts s’effacent du réseau, on a très peu d’énergie disponible à gérer. Vous avez constaté la volonté et la nouvelle politique du Chef de l’Etat qui a tout fait pour investir sur fonds publics dans la construction de la centrale de 80 mégawatts de Maria-Gléta, pour laquelle nous venons effectivement de finir la réception de l’installation et nous sommes en train, en ce moment, de conclure la souscription à une assurance, parce qu’on ne peut pas produire 80 mégawatts des turbines de ce genre,  sans assurance. Nous sommes en train de conclure le contrat d’assurance  et dans les prochains jours cette centrale doit nous venir au secours, surtout aux heures de pointe, pour soulager les besoins des populations

Dans l’immédiat, nous allons mettre en service  Maria-Gléta. Demain (Hier jeudi, Ndlr) j’irai au Togo où il y a une centrale auprès de laquelle nous pouvons solliciter de l’énergie supplémentaire. Mais tout cela n’est pas sécurisant et ce sera sécurisant lorsque nous allons pouvoir compter sur nos propres forces. Il faudrait que vous nous aidiez à sensibiliser la population pour qu’elle puisse patienter, un tant soit peu. Nous sommes en train de prendre les dispositions qu’il faut pour gérer la crise et faire en sorte que demain, chaque Béninois puisse compter sur toute la politique de sécurisation de l’énergie. »

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