L’amazone du septentrion

Une seule femme dans la forêt des maires des communes du Bénin. C’est Mme Abiba Dafia, maire de Kérou, qui bénéficie de ce privilège. Bien triste privilège qui illustre la sous représentation des femmes dans les instances publiques de direction et de gestion de notre pays. 

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Une seule femme telle une tour solitaire au milieu des 76 autres maires des communes du Bénin. Doit-on en rire? Faut-il s’en préoccuper? Ne refermons point ce mois de la femme sans appeler les feux de l’actualité sur ce cas.

Commençons par reconnaître l’exploit individuel sous-jacent. Abiba Dafia, n’est parvenue à ce niveau de responsabilité qu’en bousculant ce qui participe, pour une majorité de Béninois, d’un ordre normal des choses. Quand, dans un pays, on s’est fait à l’idée que la femme n’a rien à faire aux postes de responsabilités publiques et que sa place est plutôt à la cuisine ou ailleurs, on ne ressent aucune gêne à avoir une seule femme maire sur un effectif total de 77 administrateurs de cités.

Ainsi vu, Abiba Dafia constitue une exception. On parlerait volontiers d’accident, d’une fausse note dans une symphonie ; d’un mensonge dans un champ de vérités. Alors, pour une cohérence du propos et une logique de la démarche, l’exception Abiba Dafia mérite d’être expliquée. Pourquoi le destin qui a désigné, partout, des hommes comme maires a-t-il   trébuché à Kérou?  Beau sujet de recherche que l’exception Kérou!

C’est en découvrant quelques pans du parcours d’Abiba Dafia que nous avons trouvé un début de réponse à nos interrogations. Notre conclusion fondamentale, là voici: l’exploit d’Abiba Dafia à Kérou est à la portée et au pouvoir des femmes, partout où elles se trouvent sur le territoire national. Elles peuvent le rééditer. Elles peuvent devenir, à leur tour, des sujets de succès et de réussite.

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Du portrait que Alain Tossounon de l’hebdomadaire «Le municipal», édition du 11 au 17 mars 203, dresse de Mme Abiba Dafia, nous avons retenu ces quelques points. Le leadership prématuré mais non moins affirmé de la petite fille. Elle naquit en 1958 à Kpikiré. A 6 ans, elle se détachait déjà comme une figure de proue au milieu de ses amies d’âge. Toutes choses marquées, le long d’une scolarité studieuse et brillante par le rôle de responsable de classes. Foudroyant parcours professionnel qui la vit gravir les échelons d’agent du Trésor, de chef de section, de chef de division avant d’atterrir à Parakou comme responsable de la Caisse du Trésor. En 1996, elle entra dans le commandement au titre de sous-préfet de Kérou, plus tard de Natitingou. A l’heure de la décentralisation, les siens étaient allés la chercher une torche à la main, sous le soleil de midi. On connaît tout le reste. Un parcours digne d’éloges qui révèle un caractère fort et un tempérament de gagneur. Ceci sur fond d’un leadership féminin qui sait résister aux préjugés et aux   pesanteurs du milieu. Peuvent ainsi se laisser identifier quelques uns des facteurs qui ont contribué à faire d’Abiba Dafia une femme d’exception, dans toute l’acception du mot.

Il y a, d’abord, l’école de type moderne. Elle a ouvert à Abiba Dafia les autoroutes du savoir et de la connaissance. Certes, dans toutes nos contrées, il y a des femmes valeureuses. Mais elles sont souvent pénalisées pour déficit de cette plus-value décisive que seule apporte l’école.

Il y a, ensuite, l’expérience professionnelle. Abiba Dafia a exercé le métier qu’elle a appris. Elle a acquis une expérience certaine, doublée d’une certaine autonomie financière. Sa montée régulière en grades achève de la désigner comme un bon produit avec lequel on doit compter.

Il y a, enfin, l’école du commandement aux postes de sous-préfet à Kérou et à Natitingou. Elle y a appris à diriger et à gérer les hommes. Tâche difficile s’il en est. Constatons, de ce fait, que Abia Dafia, maire de Kérou, n’est pas et ne peut être le fruit d’une génération spontanée. Elle s’est forgée sur l’enclume du devoir. Elle a muri à l’ombre d’une solide expérience des êtres et des choses. Un proverbe mauritanien nous apprend (Citation): «Qui est amoureux des perles plonge dans la mer». (Fin de citation). Il faut croire que nos amazones se reconnaissent, de temps en temps, dans certaines de nos contemporaines et s’y réincarnent. Abia Dafia en est un exemple.

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