Opération Serval : la guerre n’est pas encore terminée!

Ce jeudi 7 mars, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, était sur le front malien, afin d’encourager les soldats de l’Opération Serval, ainsi que pour remonter le moral de ses troupes de plus en plus touchées.

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A cette occasion, il déclarait en substance, aux envoyés spéciaux de France 24, que la guerre au Mali était loin d’être terminée…Une précision majeure, quand on sait que le retrait progressif des troupes françaises était précédemment annoncé pour ce mois de mars, par Laurent Fabius, Ministre des Affaires Etrangères. Il est donc désormais clair que la France est en train de revoir toute sa stratégie militaire sur le terrain, dans le sens d’allonger la durée d’intervention de l’Opération Serval. Quelles sont les implications de cette nouvelle donne ? Comment la France va-t-elle pouvoir gérer son désengagement ? Ou s’achemine-t-on vers une « présence permanente » de Serval au Mali, sous d’autres appellations et aménagements, bien entendu ! Nos analyses…

Une nouvelle donne sur le front malien…

La promenade de santé des soldats français au Mali, pour en finir avec la menace terroriste dans la région saharienne, est en train de se transformer, ces derniers jours en combats meurtriers. Et la France commence par payer un lourd tribut : 4 militaires déjà tombés sous les balles des terroristes djihadistes…

Nul n’ignore à quel point la vie d’un Français compte pour les autorités hexagonales, ainsi que pour leurs concitoyens. Alors, quatre soldats tués sur un front étranger, en moins de trois mois, c’est beaucoup trop !

Ce «lourd tribut en vies humaines» payé par la France dans une guerre qui n’est point la sienne, commence un peu par «agacer» les Français, tout en soulevant de nombreuses critiques dans les rangs de l’opposition française, notamment au sein de l’UMP, en l’occurrence le Président Sarkozy qui n’a pas manqué, lors de sa dernière sortie médiatique, d’envoyer quelques piques à son successeur à l’Elysée.

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… Oblige l’Etat-major français à revoir sa stratégie l

Aussi, conséquence immédiate, le ministre de la Défense est vite monté au créneau, pour quatre raisons, selon nous:

1) Rassurer les partenaires sur le terrain, notamment le Tchad ;

2) Montrer que Paris contrôle toujours la situation, malgré les violents combats qui ont redoublé d’intensité dans le massif des Ifoghas ;

3) Préparer l’opinion à une « guerre d’usure au lieu de la guerre-éclair annoncée », notamment les Français touchés par la crise et qui voient d’un mauvais œil que leur argent soit « gaspillé » dans une guerre dont ils ne voient pas les retombées immédiates, une guerre à 1 million d’euros par jour (elle coûtait 70 millions d’euros au 7 février 2013, pour à peine deux mois d’opérations) ;

4) Enfin, procéder aux réaménagements stratégiques induits par la nouvelle donne, avec la nécessité de poursuivre la traque des terroristes dans ces grottes qui n’en finissent pas – un vrai jeu de chat et de souris – jusqu’à  la sécurisation complète de la région d’Amétetai.

Pendant ce temps, à Bamako…

Oui, pendant que Paris s’inquiète et se préoccupe de la tournure inquiétante que prennent les opérations dans le massif des Ifoghas, à Bamako, par contre, tout porte à croire que les autorités se sont faites à l’idée de «laisser la France mener sa guerre contre les terroristes», tandis que les militaires maliens se redéployent petit à petit dans les villes, justement libérées, il y a quelques semaines à peine par Serval, bombant le torse comme les militaires savent le faire, alors que tout le travail a été effectué par des militaires étrangers, en l’occurrence les soldats français soutenus par les troupes tchadiennes.

On dirait que les politiciens de Bamako sont plus occupés à se faire une place, pendant que «les Français chassent les terroristes pour nous (pour eux)»!

Leur dernière trouvaille dans leur tentative désespérée d’exister : Une commission nationale de dialogue et de réconciliation. On n’a même pas fini de libérer entièrement le pays, de sécuriser leur territoire, qu’ils pensent déjà à «aller s’asseoir sous l’arbre à palabre», laissant les questions de défense et de sécurité du territoire aux «braves soldats français»!

Voilà qui est bien déplorable : un régime qui a abdiqué face à une guerre qui le dépasse. De toute évidence, les autorités maliennes ont été très bien inspirées par les récentes «parlottes stériles» à Yamoussoukro, où la Cedeao a révélé à l’opinion internationale toute son incapacité à gérer les crises dans la sous-région, pendant que des soldats étrangers se font tuer pour un territoire qui n’est pas le leur.

Et Serval contraint de jouer des prolongations!

Un enseignement élémentaire de stratégie militaire : Ne jamais abandonner un territoire fraichement conquis, au risque de voir l’ennemi rappliquer et reprendre ses positions ! A qui la France va-t-elle pouvoir laisser le soin de gérer l’après-Serval ? A l’armée malienne qui a montré toutes ses limites, ou à la Misma qui tarde à être constituée? Voilà une équation bien « embêtante » pour Paris.

D’une part, un Etat-major français contraint de maintenir ses troupes sur le terrain, pour éviter que les terroristes ne se reconstituent pour reprendre des villes sans défense après le départ des soldats français, réduisant à néant tous les efforts consentis pendant plusieurs mois, et transformant à  nouveau le Sahara malien en repaire de tous leurs trafics, otages, armes, drogue…

D’autre part, des autorités politiques, dont le Président Hollande, obligés de prendre en compte les préoccupations des Français qui, dans leur grande majorité, sont de plus en plus sceptiques par rapport à l’engagement de leur armée et de leurs contributions fiscales déjà insuffisantes pour sortir l’Hexagone de la crise, dans une guerre qui n’est plus la leur… Désenchantement !

Serval n’a pas vocation à s’éterniser dans ces déserts inhospitaliers. Or, le voilà contraint à jouer des prolongations… la guerre d’usure prenant la place de la guerre-éclair…

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