«Tayiland», le nouveau nom du Bénin

«Ta» de Talon, «Yi» de Yayi, et «land», pour dire terre et le tout donne «Tayiland». Au regard du pouvoir de l’homme d’affaire Patrice Talon et de celui du Président Boni Yayi, et l’impact que la «guerre» entre les deux personnages pourrait avoir sur le Bénin, Tayiland est le nouveau nom qu’on devrait attribuer au Bénin. D’autant plus que les deux tiennent désormais le destin des Béninois.

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« Ce qu’on doit faire actuellement, c’est de compter le nombre d’habitants que fait le Bénin, vendre le pays et partager l’argent aux populations.»  C’est en ces termes qu’un jeune confrère journaliste, visiblement désespéré, donnait son sentiment sur l’état actuel de son pays. Une situation nationale marquée par des affaires de scandales ça et là, désespoir au niveau de la jeunesse, de complots manqués sur fond de bras de fer entre le Président Boni Yayi, et l’homme d’affaire Patrice Talon, qui dit l’avoir financé pour son élection en 2006 et sa réélection en 2011. Mais qu’est-ce qui les oppose ? Selon le président de la République, Talon lui en veut  parce qu’il l’a empêché de s’enrichir sur le dos de la République avec, notamment, le Programme de vérification des importations dite de nouvelle génération (Pvi), finalement suspendu. Du côte de l’homme d’affaire, on explique la «rage» du Chef de l’Etat par le fait que Talon a refusé de financer «son projet de révision de la Constitution pour briguer un troisième mandat». Et depuis 2012, ces deux hommes, anciennement  supposé proches, tous puissants chacun dans son domaine, se sont déclarés depuis fin 2012 une guerre qui  se dépeint sur la vie publique béninoise et la gestion du pays par le régime de  Yayi.

Je suis puissant…

L’un a la puissance économique, l’autre a la puissance politique, avec à sa disposition toutes les structures et tous les instruments de l’Etat. L’homme d’affaire Patrice Talon, devenu depuis peu «l’ennemi n° 1 au Bénin de Boni Yayi», est, à lui seul, une force économique très pesante dans le monde des affaires béninois.  Au moment où tout allait encore bon train entre lui et le régime Yayi, on le désignait dans la presse par le sobriquet du magnat du Coton, compte tenu de son emprise sur cette première filière de l’économie béninoise.  Dans cette filière coton, Talon avait aussi bien le monopole du sous secteur égrenage que celui de la production des intrants. C’est lui, qui contrôlait la Société de développement du Coton (Sodeco) ; l’outil industriel de la société nationale de promotion de l’agriculture (Sonapra), qui compte une vingtaine d’usines d’égrenage de l’or blanc.  Avec sa société de distribution des intrants (SDI), Talon contrôlait aussi, l’accès des producteurs aux intrants. C’était lui le Président du conseil d’administration de la défunte Association interprofessionnelle de coton (AIC). Un creuset qui regroupe tous les professionnels de la filière que sont les producteurs, les distributeurs d’intrants et les égreneurs. Il était actionnaire majoritaire de la CSPR, un groupe d’intérêt économique,  associée aussi à la gestion de la filière coton. Talon avait par la grandeur de ses investissements et sa présence dans toutes ces structures, le monopole de la filière coton. La difficulté pour le Gouvernement de trouver des intrants pour  assurer la campagne transitoire 2012-2013 après la suspension de l’accord cadre le liant à l’Aic est bien évocatrice du poids de Talon dans la filière.

En plus de tout cela, il s’est retrouvé comme acteur incontournable du port de Cotonou, la vache à lait de l’économie béninoise, avec l’avènement en 2011 du Pvi dont sa société Bénin Control était chargée de la mise en œuvre jusqu’à sa suspension provisoire le 07 mars 2012. Avant la lune de fiel entre Boni Yayi et lui, cet homme d’affaire très discret avait donc la main mise sur les deux principaux pôles économiques actuels du Bénin : le coton et le port. Tout cela lui a sans doute permis d’avoir des hommes de confiance dans certaines arcanes du pouvoir. Interrogé il y a quelques mois sur Rfi dans le cadre de l’affaire empoisonnement, il avait affirmé qu’ «il connait tout ce beau monde (parlant de l’entourage du Chef de l’Etat)».

…moi aussi

Si Talon est fort économiquement, Boni Yayi est quant à lui le pouvoir politique et étatique.  Capitaine du navire Bénin, il est le Président de la République, Chef de l’Etat, chef du Gouvernement et en plus ministre de la Défense. Il a donc sous sa coupole, toute la force publique. A savoir les institutions de la République, les forces de défense et de sécurité, les services de renseignements etc. Novice dans le jeu politique béninois au début de son règne en 2006, il a pu avec le temps acquérir de l’expérience en la matière, si bien qu’il contrôle le Parlement, a su affaiblir l’opposition avec sa politique dite de main tendue. Mieux, les adhésions aux Forces cauris pour un Bénin émergent, la force qui l’a porté au pouvoir se multiplient alors qu’il est à son dernier mandat. En plus donc des pouvoirs que lui confère la Constitution béninoise, Boni Yayi a à ses cotés la quasi-totalité de la classe politique béninoise.

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On veut parler développement!

Quand dans un pays comme le Bénin, deux hommes aussi puissants comme Boni Yayi et Patrice Talon décident d’en découdre l’un avec l’autre, cela se répercute sur l’avenir du pays. Et pour preuve. Depuis le premier trimestre 2012 où le torchon a commencé à bruler entre ces deux qui entretenait une relation incestueuse mais idyllique, le Bénin semble au ralenti. Malgré le défi qu’il s’est lancé avec une vaste campagne de communication à l’appui, le Gouvernement n’a pu faire que 204 mille tonnes de production cotonnière alors qu’il tablait sur 400 mille. La production n’a pu dépasser celle de l’année dernière, au moment où Talon et son empire était aux affaires, que de 30 milles tonnes. Echec. Le port, lui est empêtré dans plusieurs difficultés que l’équipe directive s’évertue à juguler au jour le jour. Et dans le coton comme au port, on a l’impression que tout ce que le Gouvernement entreprend désormais, il le fait par défi pour Talon. Au niveau sécuritaire, c’est la psychose. Affaire d’empoisonnement manqué du Chef de l’Etat par ci, soupçons d’organisation d’insurrection et coup d’Etat déjoué par là. Et comme des vagues soumises à la direction du vent, le sort du Bénin est, dirait-on, conditionné par les avatars de ce bras de fer Yayi-Talon. Et si, ces deux hommes se sont lancés des défis à mort, tel qu’on le véhicule dans l’opinion, la situation restera telle jusqu’au O6 avril 2016, où un autre président prêtera serment à la tête du Bénin. Les vraies questions de développement du pays passent ainsi au second rang.

Pourtant au moment où c’était la lune de miel entre les deux, le Béninois lambda n’était pas là. Tout ce qu’intéresse ce dernier, c’est la fin de ces scandales économique et administratifs tous azimuts, la fin du délestage qui ne pourra pas permettre au Bénin de devenir un pays émergent, l’augmentation du Smig qui est resté statique alors que le cout de la vie ne cesse d’augmenter, la paix pour que le Bénin…

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