Poursuivi par la Cpi pour les violences électorales de 2008, Uhuru Kenyatta vient d’être « définitivement » élu à la tête de son pays, le Kénya. Que deviendra alors la plainte du Procureur de la juridiction internationale contre lui.
Il y a eu plus de peur que de mal. Les élections présidentielles kényanes de mars 2013 ont connu une issue plus favorable qu’on ne le redoutait. Contrairement à ce que l’on craignait, les vieux démons de 2008 sont restés terrés dans leur tanière. L’annonce des résultats définitifs par la Cour Suprême du pays, ce samedi, a donné lieu à quelques violences, suite notamment à quelques mouvements de protestation des partisans du perdant, Raila Odinga. Il y a eu quelques morts. Mais, rien de comparable avec les violences interethniques de 2008 qui ont duré deux mois et fait 1.000 morts et 600.000 déplacés.
Néanmoins, le déroulement plus ou moins pacifique du scrutin ne clôt pas, tout de même, le débat sur le pays. Le statut du nouveau président, Uhuru Kenyatta en ouvre en effet, un autre.
Uhuru Kenyatta dont la victoire à la présidentielle a été confirmée par la Cour Suprême, fait l’objet de poursuites devant la Cour pénale internationale (Cpi). Il est en effet, inculpé de crimes contre l'humanité par la Cpi, pour son présumé rôle dans les violences de fin 2007. Présumé innocent, il jouit encore de tous ses droits et a même pu se faire élire chef d’Etat. Mais Uhuru a comparu récemment, lors d’une audience de comparution initiale, pour entendre les charges dont on l’accuse. La chambre d’accusation de la Cour a déjà fixé les dates des audiences, 15 et 21 septembre, ce qui déterminera s’il existe suffisamment de preuves pour un éventuel procès.
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Interrogations
L’on se demande ce qui va se passer, maintenant que Uhuru est élu chef d’Etat et bénéficie de l’immunité que lui confère par cette fonction. La question est d’ailleurs de savoir si, avec son statut de chef d’Etat en fonction, Uhuru Kenyatta peut toujours comparaitre devant la Cpi, ne serait-ce que pour les audiences initiales, avant même d’en arriver au procès. Il est vrai qu’avec le cas du Soudanais El Béchir, la Cpi a montré qu’elle est compétente pour juger, et elle a même lancé un mandat d’arrêt international contre un président en exercice. Mais du Soudan au Kenya, de Béchir à Uhuru, le contexte n’est pas le même. Et tout comme les chefs d’Etat africains n’ont pas voulu ouvrir la boite de pandore, en s’opposant, pour leur majorité, à la comparution de Béchir, ils vont sans doute aussi se solidariser, avec leur désormais homologue Kényan.
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On attend de voir le débat juridique auquel font s’adonner les spécialistes, si la Cour venait à confirmer qu’il existe suffisamment de preuves pour aller à un procès. Si c’était le cas, la Cpi va-t-elle délivrer un second mandat d’arrêt international contre un chef d’Etat en fonction ? Pendant le procès, Uhuru sera-t-il gardé en détention provisoire à la prison de la Cpi, ou lui sera-t-il permis de conserver son fauteuil, être libre de ses mouvements, puis comparaitre dans le même temps. Autant de questions qui font penser que le cas Uhuru est désormais un dilemme pour la Cpi.